Quand ça ne leur coûte rien, il arrive aux hommes politiques du système de jouer aux seigneurs et faire preuve d'« élégance ». En refusant le cadeau d'une chaîne de télévision qui consistait à annoncer sa « candidature à la candidature » alors que la centaine d'autres prétendants sont restés jusque-là des… numéros anonymes, il pensait peut-être marquer les esprits par sa « hauteur intellectuelle. Mais il se rattrapera très vite en passant aux… choses sérieuses. Dès qu'il a abordé l'essentiel, on a compris. Enfin, on aura compris bien avant mais il est toujours utile d'entendre de la bouche de quelqu'un ce qu'on savait déjà. Parce que ce n'est pas vraiment de la qualité ou de l'épaisseur de la candidature de M. Mihoubi qu'il s'agit en l'occurrence mais plutôt de… sa candidature ou non. Si cet « engagement dans la compétition » avait fini par se préciser, il n'était pas évident pour autant. Non pas parce que quelqu'un attendait de l'ancien ministre de la Culture qu'il soit sensible à ce que pense la majorité des Algériens du scrutin prévu en décembre prochain mais parce que Azzedine Mihoubi n'a jamais accédé au cercle des clients du système qui peuvent prétendre aux premiers rôles. Les choses étant au point où elles sont, même son accession à la tête du RND était envisagée en haut lieu comme un… changement. Ancien journaliste, ministre de la Culture qui a aussi quelques prétentions littéraires, il n'était pas vraiment l'incarnation de l'apparatchik traditionnel et on a cru, quelque part, que c'était peut-être suffisant pour faire croire au changement, voire à la rupture, tant qu'on y est ! Et si, sur le fond, il n'y a rien de nouveau en haut lieu, quelque chose a quand même changé dans la démarche formelle : avant, on connaissait le candidat du système, on ne s'en cachait même pas, et les politiques du « niveau d'intégration » de Mihoubi s'empressaient de le soutenir. Cette fois-ci, ce qui est attendu d'eux, c'est d'« aller au charbon », en se portant candidats. La situation exige autre chose des « réservistes de la République ». Le mouvement populaire, lui, peut attendre. Non seulement on est sourd à ses demandes mais on ne l'imagine même pas dans ce qu'on lui… impose comme solution. Et M. Mihoubi ne se gêne pas. On pensait que les jeunes qui battent le pavé depuis huit mois pouvaient être une partie de l'alternative, le candidat du RND nous apprend qu'ils ne sont qu'une « force de proposition respectable ». Comme s'il redoutait de n'avoir pas été assez clair, il nous dit aussi que « le Hirak est la classe politique de demain » ! Et aujourd'hui alors ? Puis, il a bouclé la boucle : « Mes soutiens ne sont pas sur Facebook. Sur les réseaux sociaux, je m'attends au pire .» On le savait. Mais par acquit de conscience, on a attendu que ça sorte de votre bouche. S. L.