Par K. Kerbouche* C�est devenu une litanie quotidienne que ce soit dans le 20 heures ou dans les journaux, il y a un affichage pl�thorique de chiffres dans tous les domaines sans aucune explication ni commentaire et encore moins le but vis� par ce d�ballage et l�int�r�t qu�il suscite aupr�s du citoyen m�me muni d�un bon niveau en math�matiques et dot� d�un bon degr� de compr�hension. Mais si dans le journal, on a la possibilit� de lire et relire, voire se faire lire et expliquer l�article et les chiffres qui vont avec, il n�en est pas de m�me des chiffres toutes cat�gories confondues affich�s � sur fond bleu � par l�Unique et r�p�t�s par une voix off � la vitesse de la lecture d�un bulletin d�information dont les images sont aux antipodes du commentaire d�ball� d�une mani�re vertigineuse par des pr�pos�s � la lecture, imperceptibles et incompr�hensibles, ce qui pose la question de l�utilit� de la d�marche et le but vis� surtout lorsqu�on prend en consid�ration le prix de revient de la minute de diffusion. A titre d�exemples non limitatifs, si le commentaire d�un responsable local sur une op�ration de relogement � sans aborder les tenants et les aboutissants et d�tails de l�op�ration, c�est-�-dire entendre ceux qui r�futent et contestent le bien-fond� de l�op�ration, sa transparence et son caract�re juste et �quitable � si ce bla-bla peut �tre perceptible et acceptable, � qui sont destin�s ces chiffres dont seul l��diteur a le secret sur ce qu�ils rec�lent ? Et ce branchement au gaz de ville accompagn� de tout un discours et des chiffres en nombre et en pourcentage ? Et ce barrage qui va retenir des millions de m�tres cubes d�eau pour l�usage domestique et pour l�irrigation de l�agriculture alors qu�� 50 kilom�tres de la capitale et dans une grande ville, les habitants ne voient l�eau que tous les deux jours et seulement la matin�e? Et ces l�gumes aux prix exorbitants dans la Mitidja qui n�est m�me plus vou�e au foin ? Et ce nombre de b�n�ficiaires du �couffin de Ramadan� sans pour autant envisager un seul instant l�inanit� et le scandale de ce qui est rapport� et qui est qualifi� �d�information� d�niant par l� m�me le principe universel que la mis�re des pauvres gens doit �tre dissimul�e et le principe canonique que l�aum�ne doit �tre discr�te et non publique pour ne pas attenter � la dignit� et l�amour-propre du b�n�ficiaire ? Et ces chiffres sur le nombre des malades chroniques toutes maladies confondues sans pour autant en arriver � dire que les m�dicaments y aff�rents sont disponibles et � la port�e des indigents et que les moyens techniques (radio, scanners, fibroscopie, etc.) se trouvent � l�h�pital et qu�il n�est pas n�cessaire de se d�placer dans d�autres wilayas (des centaines de kilom�tres parfois couch� � l�arri�re d�une camionnette) et faire l�examen chez le priv� ? Et ce nombre de retraits de permis de conduire, pire de morts (jusqu�� 10 par jour si ce n�est plus) et de bless�s (par dizaines) sur les routes ? Et ces kilos, voire dizaines et m�me centaines de kilos de drogue saisis ? Et ces meurtres � l�arme blanche (de 1 � 5 par jour en moyenne) ? Et ces suicides qui d�ciment la jeunesse, voire ces suicides collectifs constitu�s par la parano�a du harraga et s�il est publi� les chiffres de ceux qui ont �t� �arr�t�s�, il n�y a jamais les chiffres des cadavres � ou ce qu�il en reste � rejet�s sur les c�tes et dont les m�res ne pourront faire le deuil ? Et ces chiffres et pourcentages de r�ussite au bac � contest�s par ailleurs par des enseignants � quelle finalit� ont-ils et quels joie et plaisir offrent-ils aux laur�ats et � leurs parents apr�s l�espoir et l�attente de toute une vie lorsqu�ils commenceront � ingurgiter le calice des inscriptions et �orientations� � l�universit� laiss�es � l�appr�ciation de la machine et � l�application de gens qui n�ont rien � voir avec la gestion du �bon p�re de famille� pr�vue et r�glement�e par le code civil ? Et ce taux d�inflation de + 5 % pour le seul mois de juin 2010 ? Et ces chiffres de la criminalit� � en nette progression � et tout ce qu�elle couvre comme infractions, d�viations et atteintes aux bonnes m�urs et � la famille ? Ces chiffres balanc�s � la t�te des citoyens vont-ils inciter les charg�s de la pr�vention, de la recherche, des statistiques et des sp�cialistes des questions sus-�num�r�es � se plonger dans l��tude du ph�nom�ne, voire de la catastrophe d�en faire la synth�se et de proposer la ou les solutions idoines aux autorit�s concern�es avec pour finalit� d�imposer leurs avis et d�cisions au nom de la salubrit� et l�ordre public et la sauvegarde de la morale d�abord et de la sant� de la soci�t� ensuite et arriver � en faire une l�gislation contraignante et non r�pressive � outrance � tel point qu�elle perd de son innocuit� � tr�s court terme. Il en est que de voir les nouvelles dispositions sur le code de la route qui n�ont en rien diminu� les h�catombes sur les routes et les voies de fait dans les ruelles des villes l� o� l��il du gendarme ne porte pas. Pourtant des solutions ont �t� sugg�r�es (voir contributions des 4,3 et 6,4 2010 dans le Soir d�Alg�rie. Mais encore une fois, qui s�en soucie et qui a le geste de la sauvegarde du citoyen et de la soci�t�, de la gestion du domaine public, ou de la r�glementation n�cessaire et suffisante ? Et ces milliards dissip�s dans des op�rations imaginaires et d�autres engag�s dans des d�penses mirobolantes de constructions fastueuses et de prestige qui n�ont rien � voir avec l�utilit� publique si ce n�est de pr�senter une facturation astronomique pour augmenter les dividendes des pr�dateurs � l�origine du projet et qui ne voit le jour et la mise en activit� qu�apr�s moult et moult r��valuations aux fins de gonfler le montant de la pr�bende et du pillage ? Un exemple relev� dans un quotidien paru le 19 juillet 2010 fait �tat de �1 000 milliards de dinars sur la p�riode 2010-2014 pour la mise � niveau de 20 000 PME� . A quoi sert de d�baller ces chiffres ? Ou � plus proprement parler est- ce que ces chiffres int�ressent le citoyen ? Lui donnent-ils � manger ? Le logent-ils ? Lui donnent- ils un travail ? Auront-ils une influence quelconque sur sa vie de tous les jours ? El�vent-ils son niveau de vie ? C�est cela qui l�int�resse de prime abord et qui constitue son souci permanent. Quant � distribuer �1 milliard de dinars � 20 PME en 5 ans, soit 5 milliards de centimes par PME sur 5 ans (1 milliard par an) pose le probl�me de savoir quelle est exactement l�activit� de cette PME et � quoi sert-elle si ce n�est d�engloutir des milliards qui peuvent tr�s bien �tre affect�s ailleurs en termes de rentabilit�, � moins que� l�on ne parle pas du m�me �lieu� de rentabilit�. Et le d�tail de ces chiffres-l� n�est ni publi�, ni mont� en �pingle, ni m�me divulgu� au citoyen ou � qui de droit, car il n�int�resse que ceux dont le but est de les �r�colter� . Pendant ce temps-l�, les citoyens n�cessiteux attendent de savoir � quelle sauce ils vont �tre accommod�s ce Ramadan, au couffin ou au ch�que ? D�autres attendent la publication de la liste des �F2� qui vont leur �tre distribu�s et dans lesquels il vont s�entasser dans une promiscuit� suffocante qui ne leur laisse m�me pas le loisir de respirer ni de vivre d�cemment ; et encore ces listes sont truff�es d�affid�s et d�hommes de main et revendeurs de tous acabits, ce qui oblige le citoyen y figurant � �tre recal� ou n�y figurant pas � exercer un recours, renvoyant aux calendes grecques son entr�e en jouissance dans le logement et donc l�incitant � commettre des incivilit�s, des r�bellions, des d�gradations des �difices publics et obstruction des voies publiques privant d�autres citoyens de leur travail et des moyens d�risoires mis � leur disposition. D�o� l�intervention des forces de l�ordre qui se r�sume au matraquage, arrestation et pr�sentation devant la justice qui se conclut par une peine de privation de libert� et une forte amende (encore une fois pas de chiffres). Tout cela pour avoir fait valoir son droit � un toit pour loger sa famille et cacher sa mis�re physique et morale alors que des pillards � o� sont les chiffres concernant leur nombre ? font �difier � avec quel argent ? � juste en face ou pas tr�s loin ou m�me � l��tranger ou acqu�rir sur le dos des victimes des �subprimes� (encore des mis�reux qui trinquent) des villas fastueuses dont on n�entend parler que dans les films am�ricains. Et cet �tat de fait donne naissance � une mentalit� de rejet et du non-recours aux services de l�Etat quelle que soit leur d�nomination pour s�infiltrer subrepticement � l�int�rieur par la voie bien connue et qui fait couler beaucoup d�encre malgr� les textes � qui disparaissent sous des couches de poussi�re en attendant de les remplacer par d�autres qui subiront le m�me sort �, voire le contournement de ces services en empruntant des chemins tortueux toujours par le m�me syst�me que ci-dessus � ou par le faux, enfin en derni�re mesure l��vasion pure et simple devant les services de l�Etat, c'est-�-dire ne s�arroger que des droits sans aucune obligation ni devoir et � titre d�exemple prendre un gourdin, s�approprier une portion de la voie publique et soumettre le citoyen � une taxe, aux menaces, aux voies de fait, � l�extorsion de fonds et cela parfois sous les fen�tres de son appartement pour stationnement de son v�hicule. Un espace qui, par ailleurs, lui est disput� par un �tal ou une camionnette de l�gumes depuis l�aube et quand il quitte les lieux, il laisse derri�re lui non seulement des immondices mais une puanteur et une chauss�e impraticable ni en �t�, ni en hiver. Et si le citoyen paie un imp�t sur le salaire (convoit� par tant de rapaces) un imp�t et une taxe fonciers sur la propri�t� de son domicile, eux ne savent m�me pas ce que le mot veut dire, pas plus d�ailleurs que registre du commerce ou affiliation � l�assurance sociale et autres obligations inh�rentes � l�activit� ni m�me respect du code de la route en chargeant des vieilleries de v�hicules � ras bord de pommes de terre et autres comme s�ils ne traversaient aucun barrage de s�curit� (sujet d�j� abord� dans une pr�c�dente contribution in le Soir d�Alg�rie ci-dessus), donc m�me pas une amende au profit du Tr�sor alors qu�il exerce une activit� tr�s lucrative mais n�faste, marginale, dangereuse pour le citoyen et la soci�t� et attentatoire � l�ordre public et cela alors que le gardien de l�ordre public est omnipr�sent, regarde, observe et� laisse faire an nom de la l�thargie g�n�rale ambiante sinon de l�anesth�sie populaire et sa mise sous perfusion par divers �dulcorants connus dans le milieu de l�intox. Donc � quoi et � qui sert-il de publier ces chiffres d�abord incompr�hensibles � la mani�re dont ils sont d�bit�s ? Et qui int�ressent-ils dans le contexte global de la situation du pays ? Et comment s�est-il trouv� un individu qui en a fait une information et a-t-il d�cid� qu�il fallait la mettre � la disposition des citoyens ? Et pour quoi faire ? Et � plus proprement parler, que doit faire le citoyen d�s l�audition de ces chiffres ? Est-ce qu�il lui est demand� son intervention et de quelle nature (et de rentrer dans le circuit infernal cit� plus haut ?) ou bien tout simplement enregistrer comme le reste ? Ou bien certains s�adonnent � ces morbidit�s pour �d�glinguer� un peu plus le peuple et remettre en cause la mission de l�Etat ? Et les commis de l�Etat charg�s de faire respecter la r�glementation de la vie en soci�t� quid de leur mission ? Et devant cette carence, pourquoi cette Unique t�l�vision n�est pas incit�e � faire des �conomies � encore des chiffres mais ceux-l� seraient int�ressants � et s�en tenir aux informations qui cadrent avec les images qui d�filent et arr�ter le refrain qui tourne comme un sempiternel man�ge qui doit d�abord fatiguer les techniciens qui s�y adonnent ensuite en offre une pi�tre image tant � l�int�rieur qu�� l�ext�rieur. En effet, au lieu d�informer le citoyen de la construction de 2 000 ou 10 000 logements � un jet de pierre de la baraque qu�il occupe ou des dizaines de milliers de milliards consacr�s � l��radication de l�habitat pr�caire quand lui en est �cart� alors qu�on lui fait savoir en m�me temps qu�il y a 1,5 million de logements inoccup�s, il serait plus judicieux de r�pondre � ses questions et dont il est fait �tat plus haut, de le mettre au courant de la vie quotidienne dans ces logements, de son d�racinement, de la scolarit� de ses enfants, de l�eau potable qu�on lui promet H/24 , de l��clairage public, de l�alimentation en gaz de ville, de l�enl�vement des ordures, de la fermeture d�une d�charge publique qui d�truit la sant� de centaines d�habitants, de l�accaparement d�un espace public au milieu de la cit�, r�serv� aux enfants et aux vieillards qui n�ont pas d�autres endroits o� se rencontrer et discuter de toutes les mis�res qu�ils subissent, de ces nuisances sonores (cris et bruits de toutes sortes), de ces rues coup�es et interdites � la circulation cr�ant des embouteillages sans discontinuer et donc des milliers de tonnes de gaz d��chappement qu�il faut ajouter aux odeurs naus�abondes d��gout et � la canicule, d�un travail quelconque avec un salaire d�cent afin qu�il mesure sa dignit� et sa fiert� qu�il est dans un pays ind�pendant. Enfin ce sentiment d�impuissance qui confine � l��touffement devant le fait accompli et le diktat d�une minorit� d�individus qui, se parant de l�action au nom de l�ordre public ou du bien public, agissent au gr� de leurs convenances et en d�pit du droit, de la l�gislation et de toute r�glementation non seulement pour faire �chec aux droits les plus �l�mentaires des citoyens mais encore dans le seul but de nuire pour montrer leur omnipotence et leur pouvoir alors qu�au regard de la masse, ils ne sont qu�un atome qui peut �tre d�plac� et m�me converti (comprenne qui veut) et m�me pour carr�ment d�poss�der le citoyen de la �guenille� de droit qui lui reste ou bien pour en tirer quelque chose ou bien pour le plaisir de voir l�exercice de �cette� autorit� qui n�est rien d�autre qu�un leurre dont il se rendra compte t�t ou tard � l�actualit� est l� qui le prouve mais ils sont encore nombreux ceux qui continuent � agir ainsi impun�ment sachant que la plainte quand elle est av�r�e n�apportera de sanction que tr�s longtemps apr�s l�infraction. A preuve, il n�y a qu�� les voir tenir discours quand ils sont amen�s pour une futilit�, qui n�int�resse personne, qui est superflue ou tout simplement ne concerne en rien la population qui a d�autres sujets de pr�occupation, d�autres centres d�int�r�t, d�autres urgences mais qui ne sont pas appr�hend�s par ceux qui en ont la charge car ils sont occup�s � d�biter des chiffres �sur la nomenclature des si�cles � venir�. Alors, � quand la fin de l�ind�chiffrable et des questions sans r�ponse ? Du matraquage des masses pour les d�tourner de leurs revendications �l�mentaires ? Quelle g�n�ration de citoyens pourra un jour d�clarer s��tre �mancip�e du joug qui enserrait le cou des pr�d�cesseurs et a�eux ? Qui ne conna�tra pas la signification du mot p�nurie, m�pris, insulte, d�ni de droit ? Qui pourra circuler librement et sans aucune contrainte dans ce vaste pays sans �tre bouscul�, pi�tin�, �cras�, priv� de droits ou de libert�, ran�onn� par un groupe d�individus ayant d�tourn� l�autorit� l�gale � leur profit personnel et g�r� le pays et ses habitants comme bon leur semble ? Et par l� m�me, ils en arrivent � oublier les vertus de l�histoire et de la m�moire. K. K.