La revalorisation annuelle des pensions de retraite et d'invalidité est inscrite dans la loi. Ces dernières années — vu la situation financière désastreuse de la CNR —, les pouvoirs publics ont longtemps tergiversé quant à l'octroi de cette revalorisation, effective légalement tous les 1er mai. A un mois de cette échéance, les retraités ne savent toujours pas ce que va décider le gouvernement. Si nous évoquons la notion de tergiversations de la part des autorités concernées, soit une mauvaise communication ou une annonce tardive, ou pire encore des informations confuses à visée populiste et électoraliste, c'est qu'il y a eu ces dernières années de nombreux exemples à ce sujet, désorientant totalement les 3 millions de retraités pour qui cette revalorisation est très attendue, notamment les plus démunis d'entre eux. Pour rappel, et contre toute attente, la revalorisation pour 2019 avait été annoncée dès…. novembre 2018. Dans «Le Soir Retraite» du mardi 13 novembre 2018, nous nous étions interrogés sur cette information publiée par l'APS (agence gouvernementale) : le ministre en charge de la Sécurité sociale aurait annoncé une augmentation en 2019 des pensions de retraite de 5% au titre du budget de son secteur. Information incomplète ou propos flous du ministre ? Ce dernier avait présenté le mercredi 7 novembre 2018 le projet de budget de son secteur pour 2019 à la commission des finances et du budget de l'Assemblée populaire nationale (APN) dans le cadre du projet de loi de finances 2019 où il aurait annoncé — selon le journal gouvernemental El Moudjahid (édition du 10 novembre 2018) —, que «le gouvernement a décidé la revalorisation des pensions de retraite. En effet, une hausse allant jusqu'à 5% en faveur de 3,2 millions de retraités algériens est prévue dès 2019». Fin de citation. Dans la dépêche de l'APS (datée du 8 novembre 2018), toujours à propos de la même réunion, le ministre avait précisé que «les affectations octroyées au titre des dépenses de la solidarité nationale pour l'exercice 2019 sont estimées à 97,539 milliards de DA consacrées à assurer la couverture sociale des franges vulnérables, notamment à travers une allocation complémentaire mensuelle au profit des retraités et des invalides et une revalorisation exceptionnelle des pensions de retraite dans le cadre de la Cnas et de la Casnos». Fin de citation de la dépêche de l'APS. La question que nous nous étions posée mardi dans «Le Soir Retraite» était la suivante : «Alors, est-ce une augmentation en 2019 des pensions de retraite à la charge de l'Etat ou l'annonce anticipée de la revalorisation annuelle des pensions de retraite financée par la CNR ?» Nous avancions même l'hypothèse du cumul des deux à la fois : augmentation des pensions dès le 1er janvier 2019 et revalorisation annuelle des pensions dès le 1er mai 2019 (conformément à la loi relative à la retraite). Pour étayer cette hypothèse, d'abord concernant l'augmentation à la charge du budget de l'Etat : le ministre parle d'«une revalorisation exceptionnelle des pensions de retraite dans le cadre de la Cnas et de la Casnos» pour 2019, financée au titre des dépenses de la solidarité nationale, dépenses chiffrées à près de 100 milliards de DA. Ne pas refaire le «mauvais coup» de 2019 Donc cette augmentation serait différente et distincte de la revalorisation annuelle des pensions, qui n'a jamais eu un caractère exceptionnel, puisqu'elle est inscrite dans la loi. Si le ministre en fait faisait allusion uniquement à la revalorisation annuelle des pensions — qui, elle, n'est pas à la charge de l'Etat mais de la CNR (pour les salariés) et de la Casnos (non-salariés) —, pourquoi l'annoncerait- il aux députés dans le cadre de la loi de finances pour 2019 et plus de 5 mois avant le 1er mai (date d'effet de son application) ? Il est regrettable que le ministre ou ses collaborateurs ne soient pas revenus plus en détail et plus clairement sur cette importante information. Nous n'avons rien trouvé à ce sujet sur le site internet du ministère de tutelle, hormis la dépêche de l'APS évoquée plus haut et déjà citée dans «Le Soir Retraite». Pour en savoir plus, il a fallu attendre la publication de la loi de finances pour 2019, donc la fin décembre 2019 : aucune disposition exceptionnelle n'y avait figuré concernant une augmentation des pensions de retraite. En fait, cette fausse annonce s'inscrivait dans la préparation d'un 5e mandat pour le chef de l'Etat en place, promettant monts et merveilles à l'électorat. Des taux dégressifs allant de 6 à 1,5% en 2019 Finalement, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale avait annoncé, jeudi 2 mai 2019, à Alger, une revalorisation des pensions et allocations de retraite pour 2019 à des taux allant de 1,5 à 6% à compter du 1er mai courant. «Dans le cadre de l'amélioration du pouvoir d'achat des retraités, le gouvernement a décidé, après examen par le conseil d'administration de la Caisse nationale des retraites (CNR), la revalorisation des pensions et allocations de retraite au titre de l'année 2019, à des taux allant de 1,5 à 6% à compter du 1er mai 2019», avait précisé le ministre qui supervisait les travaux d'une Journée d'information sur la prévention sanitaire dans le milieu du travail en compagnie du ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière. «Ces augmentations qui seront versées en juin seront calculées en fonction d'un taux variable qui tient compte du montant global des pensions et allocations de retraite, a expliqué le ministre précisant que «les augmentations seront de l'ordre de 6% pour les pensions dont le montant est inférieur ou égal à 20 000 DA, 3% pour les pensions dont le montant est supérieur à 20 000 DA et inférieur ou égal à 40 000 DA, 2,5% pour les pensions dont le montant est supérieur à 40 000 DA et inférieur ou égal à 60 000 DA, 2% pour les pensions dont le montant est supérieur à 60 000 DA et inférieur ou égal à 80 000 DA et 1,5% pour les pensions de plus de 80 000 DA». Que décidera le gouvernement Djerad les prochains jours ou les prochaines semaines dans un contexte, cette année, très particulier ? Epidémie de Covid-19 et effets désastreux du confinement sur le pouvoir d'achat des plus démunis ; début du mois de Ramadan dans un peu plus de 3 semaines ; baisse drastique des recettes du pays suite à l'effondrement des prix du pétrole ; et très forte dépendance des dépenses de la CNR vis-à-vis du budget de fonctionnement de l'Etat. Il serait utile que l'Exécutif se prononce assez rapidement en direction des retraités. Il est fort probable que la CNR ait inscrit une enveloppe «revalorisation annuelle» dans ses dépenses prévisionnelles pour 2020, mais est-ce que son Conseil d'administration s'est réuni pour faire ses propositions de revalorisation au ministre de tutelle, comme le prévoient les lois en vigueur ? Djilali Hadjadj