L'accélération de la propagation du Covid-19 en Algérie inquiète les sociétés savantes qui ont décidé de se réunir, via une visioconférence, pour discuter de la gestion sanitaire du coronavirus. Le professeur Bouzid, chef du service oncologie au CPMC et président de la Société algérienne d'oncologie médicale, appelle à aller vers un dépistage massif de la population « le plus tôt possible », pour pouvoir «gagner cette guerre». Salima Akkouche - Alger (Le Soir) - La situation sanitaire en Algérie liée au coronavirus est-elle grave ? Sans aucun doute. En plus des cris de détresse du personnel de santé, les sociétés savantes viennent de tirer, à leur tour, la sonnette d'alarme et appellent à des mesures urgentes pour éviter un scénario catastrophique. «L'Algérie vient de dépasser mille nouveaux cas et les cent décès par la pandémie Covid-19. L'heure est grave et il est temps d'arrêter de tenir le bâton par le milieu », a lancé le professeur Bouzid, président de la Société algérienne d'oncologie médicale. Qu'il y a-t-il lieu de faire ? Le chef de service d'oncologie du CPMC a expliqué qu'il existe «deux attitudes stratégiques dérivées des deux grosses expériences : l'une asiatique et allemande et l'autre européenne. Les résultats en sont significatifs en faveur de l'expérience asiatique et allemande». À souligner que les Asiatiques et les Allemands ont privilégié la piste du dépistage massif de leurs populations pour limiter la propagation du virus, tandis que l'expérience européenne a opté pour la stratégie du confinement de la population. Selon le professeur Bouzid, il n'est pas nécessaire d'aller vers le confinement total de la population, puisque, souligne-t-il, ni la mentalité algérienne ni les conditions de vie d'une certaine frange de la société ne permettent cette option. La meilleure solution ? Aller vers le dépistage de tous les sujets, y compris asymptomatiques, ainsi que les sujets contacts, préconise-t-il. «Les soignants sont prioritaires dans ce dépistage», précise cet expert qui appelle également à généraliser les tests de dépistage du Covid-19 à tout le territoire national, «dans les plus brefs délais». Avons-nous les moyens d'aller vers un dépistage massif de la population ? Oui, affirme le professeur qui dit qu'il faudra impliquer les laboratoires des hôpitaux et ceux du secteur privé dans cette démarche. Le personnel de ces structures est-il formé pour établir des tests à base d'appareils PCR, sachant que le ministère de la Santé n'a toujours pas validé les tests rapides de dépistage ? Le professeur Bouzid estime qu'il suffit de mettre à la disposition de ce personnel les appareils PCR s'il n'en dispose pas. Pour faire les tests, dit-il, les microbiologistes et les virologues maîtrisent très bien les techniques. Ou pourquoi, ajoute-t-il, ne pas privilégier les tests rapides ? Une technique, souligne-t-il, qui permettra au moins de faire le tri entre les personnes qui doivent être confinées tout de suite et celles qui ne le seront pas. En plus du dépistage massif, le professeur Bouzid appelle aussi à décentraliser les soins «et surtout à arrêter de faire de l'EHS El-Kettar l'épicentre algérien de la pandémie, car c'est une forme de bureaucratie». Le président de la Société algérienne d'oncologie recommande également de traiter les patients porteurs, y compris les sujets asymptomatiques selon le protocole défini par le ministère de la Santé. Or, pour le moment, le ministère de la Santé a décidé d'un traitement par la chloroquine uniquement au profit des patients présentant des complications graves. «La chloroquine diminue la charge virale au sixième jour, et si nous voulons limiter la propagation, nous devons traiter même les sujets asymptomatiques à titre préventif», a déclaré le professeur Bouzid qui juge «scandaleux» le fait que le ministre de la Santé «reçoit des charlatans qui proposent des médicaments contre le Covid-19, au détriment des spécialistes de la santé qui peuvent proposer de vraies solutions de prise en charge, qu'ils soient virologues, des spécialistes en épidémiologie ou autre». Pour le porte-parole des oncologues, il s'agit «d'une guerre et les combattants veulent être protégés et soutenus pour gagner cette guerre». S. A.