C'est dans un contexte des plus singuliers que les Algériens, à l'image d'autres pays musulmans, s'apprêtent à accueillir le mois sacré de Ramadhan. Une chose est sûre, en ces temps de crise sanitaire, la population verra ses rituels des ans passés complètement bouleversés. Massiva Zehraoui - Alger (Le Soir) - A la veille du mois de jeûne, moult appréhensions surgissent au sein de la société quant à l'impact de l'épidémie sur le cours du Ramadhan. Les inquiétudes des uns et des autres s'articulent autour de la situation que risque d'engendrer l'arrivée de ce mois, connu pour susciter une grande frénésie chez les citoyens qui se ruent systématiquement sur les grandes surfaces afin de s'approvisionner. Chose qui mettra certainement à mal les mesures de distanciation sociale déjà en vigueur. D'autres, en revanche, craignent qu'une catégorie de commerçants peu scrupuleux profitent de la situation et s'adonnent à des pratiques de spéculation sur certains produits de consommation. À ces préoccupations, le président de l'Association algérienne de protection et d'orientation du consommateur et son environnement (Apoce), Mustapha Zebdi, s'est montré un tantinet confiant. Joint hier par téléphone, il a estimé qu'aussi contradictoire que cela puisse paraître, la crise sanitaire qu'on vit depuis des semaines a « incité les journaliers ou encore certains travailleurs du secteur privé à s'approvisionner massivement en produits de base par crainte de pénurie ». Ce facteur contribuera sûrement, selon lui, « à contenir la frénésie qu'on constate chaque Ramadhan ». S'ajoute à cela, le fait que le consommateur ait été rassuré à maintes reprises sur la disponibilité des produits nécessaires pour encore un bon moment. Mustapha Zebdi renchérit, toutefois, «que bousculades, il y aura certainement, mais pas comme les années précédentes». Du moins, l'espère-t-il. Interrogé sur la stabilité des prix sur le marché, le président de l'Apoce exprime, là aussi, un certain soulagement, soulevant, cependant, quelques petits dépassements. «Dans l'ensemble, les prix sont plus ou moins stables», assure-t-il. Exception faite de quelques produits à l'instar de la levure dont, observe-t-il, « le prix a doublé », au même titre que l'amidon de maïs (maïzena), qui est passé « de 100 DA le kilogramme à 350 DA ». Il soulignera que même si ces produits ne sont pas de large consommation, il n'en demeure pas moins que de telles hausses restent «injustifiées et inadmissibles». En ce qui concerne les viandes, Mustapha Zebdi a précisé que chaque année , pendant cette période, des mesures d'importation sont prises. Cette année, rappelle-t-il, le ministère du Commerce a pris l'initiative de ramener un cheptel vivant dans le but d'inonder le marché et de stabiliser les prix de la viande. Mustapha Zebdi a déploré, dans ce sens, «la réaction des représentants des éleveurs qui était très violente». Ces derniers avaient accusé les autorités de vouloir «détruire la filière», garantissant être en mesure d'approvisionner le marché et de réguler les prix. «Rien n'a été fait dans ce sens, évidemment», souligne-t-il en accusant les représentants des éleveurs de « tromper le consommateur algérien», les appelant aujourd'hui à «respecter leurs engagements». Mustapha Zebdi a enfin appelé les citoyens à faire preuve de vigilance en ce mois et de ne surtout pas retomber dans le scénario de la semoule, car, conclut-il, « la santé prime sur toute autre chose » et ne vaut pas d'être sacrifiée pour un sac de semoule. Par ailleurs, si beaucoup de citoyens parlent d'un Ramadhan « amer et morose » en termes d'ambiance, ils sont au moins sûrs de pouvoir s'approvisionner le plus normalement du monde. A ce titre, hier mercredi, le ministre de l'Agriculture, Cherif Omar, qui s'est réuni avec le ministre du Commerce, a assuré que «tous les produits de base sont disponibles et le seront durant tout le mois de Ramadhan». Inutile, donc, de se précipiter et de se bousculer dans les marchés et autres points d'achat. Cherif Omar a, par conséquent, invité les consommateurs à respecter toutes les mesures d'hygiène, telles que recommandées par les autorités sanitaires. Le responsable du secteur a également affirmé que des aides alimentaires ont été acheminées pour les familles les plus démunies de toutes les régions. Le ministre du Commerce a, pour sa part, promis de contrôler et de réguler les prix de divers produits prisés par les citoyens pendant cette période. M. Z.