Le Parti de la justice et du développement, principale formation islamiste au Maroc, a fini par se ranger du côté du palais suite à la décision de normalisation avec Israël parrainée par le Président Donald Trump. Le PJD, qui dirige la coalition gouvernementale au Maroc, renie aussi tous ses principes envers la cause palestinienne. Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - Encore une fois, le Makhzen a été plus fort que les islamistes du Parti de la justice et du développement, la filiale marocaine des Frères musulmans. Signe d'un grand malaise, le PJD a mis plus de 48 heures à réagir à l'annonce de la normalisation des relations entre le Maroc et Israël par Donald Trump. Samedi 12 décembre, ce parti a rendu publique une déclaration, sanctionnant une réunion extraordinaire de son secrétariat général, dans laquelle il se félicite de la reconnaissance du Président des Etats-Unis de «la souveraineté du Maroc sur ses provinces du sud». Mais le PJD a évité d'aborder frontalement la question du rétablissement des relations avec Israël et use de formules alambiquées pour tenter de sauver la face. «Notant les positions fermes et continues de Sa Majesté le Roi, Président du Comité de Jérusalem pour la défense des droits du peuple palestinien, qu'il a confirmé lors de son appel avec le Président palestinien que la position de Sa Majesté est inchangée et que «le Maroc place toujours la question palestinienne au rang de la question du Sahara marocain, et l'action du Maroc pour la consolidation de sa marocanité ne se fera jamais, ni aujourd'hui ni à l'avenir, aux dépens de la lutte du peuple palestinien pour ses droits légitimes». De même, Sa Majesté tient à préserver le caractère spécial de Jérusalem et le caractère islamique de la mosquée Al-Aqsa en sa qualité de chef du Comité de Jérusalem», lit-on dans cette déclaration officielle signée par Slimane El Amrani, le premier secrétaire général adjoint. La veille, Saâd-Eddine El Othmani, le Premier ministre marocain et secrétaire général du parti islamiste, avait totalement esquivé la question sur la normalisation avec Israël dans une déclaration à la presse marocaine. El Othmani, qui a longtemps claironné qu'il s'opposerait à toute tentative de normalisation avec Israël, fait maintenant profil bas. «Nous refusons toute normalisation avec l'entité sioniste parce que cela l'encourage à aller plus loin dans la violation des droits du peuple palestinien», avait-il déclaré le 23 août dernier lors d'un discours inaugural du 16e Forum national de la jeunesse du PJD. Toujours au mois d'août, le secrétariat général du parti a condamné la normalisation entre Abu Dhabi et Tel Aviv. «L'établissement de toute relation ou normalisation de quelque nature que ce soit ne peut servir qu'à soutenir cette entité coloniale et à l'encourager à persister dans ses pratiques agressives contre le droit international et les droits inaliénables du peuple palestinien. L'entité sioniste a usurpé la terre de Palestine et occupe les lieux saints des musulmans et des chrétiens (...) continue son intransigeance en plantant davantage de colonies et en s'emparant de plus de terres de Cisjordanie en contradiction avec les accords conclus et en poursuivant son agression contre Ghaza et en resserrant le blocus de son peuple», déclarait alors cette formation en prenant soin de ne pas citer nommément les Emirats arabes unis. Il faut dire que le PJD se retrouve dans une situation très complexe, notamment Saâd-Eddine El Othmani et ses cadres membres du gouvernement. À l'allure où vont les choses, les islamistes marocains devront bientôt rencontrer les membres de l'exécutif israélien afin de passer à la concrétisation de l'accord de normalisation des relations entre les deux pays. T. H.