Une date, le 20 février, est le nom du mouvement de contestation qui a saisi le Maroc en 2011. La réalité a cédé place à l'enthousiasme. De nombreux défenseurs des droits humains dénoncent aujourd'hui une «régression des libertés» au Maroc, avec des méthodes d'intimidation d'une rare violence. Soutenu par des milliers de manifestants marocains pris dans l'effervescence des «printemps arabes», le Mouvement du 20 février réclamait à l'époque «plus de justice sociale, moins de corruption et moins d'absolutisme». Le roi Mohammed VI avait très vite promis des réformes. Une nouvelle Constitution avait été adoptée. Mais une fois passé le vent de la contestation populaire, la «stratégie» du pouvoir «a été de terroriser les élites intellectuelles capables d'offrir des perspectives et de négocier un changement», assure-t-on. Une «campagne de diffamation destinée à faire taire» les contestataires avec des menaces touchant à la sécurité et à la réputation. Plusieurs pétitions de la société civile avaient dénoncé le «lynchage public» des «médias réactionnaires de diffamation» et les «accusations, sexuelles» visant les contestataires. Le parti islamiste PJD, porté à la tête du gouvernement par les élections de 2011, a lui-même condamné fin janvier, dans un communiqué, «les campagnes de diffamation ciblant des personnalités publiques et des militants». Mohamed Ziane, 77 ans, ancien ministre des Droits de l'homme (1995-1996), devenu critique du régime, fait partie des cibles : une chaîne locale sur internet a diffusé en novembre 2020 des images compromettantes filmées par une caméra dissimulée dans une chambre d'hôtel, en présentant la scène comme un «rendez-vous» de celui qui était alors avocat avec une cliente mariée. «Ce sont des méthodes dignes des pires régimes policiers !» s'indigne l'ancien député. Ulcéré par ses accusations, le ministère de l'Intérieur a déposé plainte contre lui pour «offense aux institutions de l'Etat». Des organisations comme l'Association marocaine des droits humains (AMDH) ou Amnesty International dénoncent régulièrement la «répression des voix critiques» au Maroc, en citant le cas des journalistes Souleimane Raissouni et Omar Radi, en attente de jugement depuis plusieurs mois après des accusations de «viol». En réponse, les autorités invoquent toujours «l'indépendance de la justice». R. I.