Pendant que le président Andrea Agnelli rêve de Super Ligue, la Juventus d'Andrea Pirlo et Cristiano Ronaldo glisse vers la Ligue Europa et n'a plus que trois matchs, à partir de Sassuolo mercredi, pour sauver une saison aux allures de chemin de croix. Déjà la fin pour Pirlo ? Après l'élimination précoce en huitièmes de finale de Ligue des champions contre le FC Porto en mars, Andrea Pirlo avait été épargné par les critiques. Protégé par son prestige de joueur et par son inexpérience, lui qui vit sa première saison comme entraîneur, à 41 ans. Mais avec la répétition des prestations indigentes, le «Maestro» est désormais au centre de la cible. Sa Juve, inconsistante contre les «petits», n'a pas su hausser le ton dans les «finales», contre l'Atalanta (0-1) ou dimanche contre Milan (0-3). «S'il a toutes les excuses du débutant, Pirlo ne s'est pas amélioré pendant la saison», a taclé la Gazzetto dello Sport lundi, en fustigeant une Juve «méconnaissable», en «manque d'identité, de jeu, d'intensité, d'organisation». «Tu peux être de marbre quand les résultats sont là, mais quand l'équipe est en difficulté, voir l'entraîneur impuissant et immobile, incapable de hurler, ça interpelle», a ajouté le journal. Pirlo a endossé la «responsabilité» de la défaite contre Milan mais assuré vouloir «continuer son travail». Selon la presse, les dirigeants ont décidé de finir la saison avec lui mais pourraient ensuite acter l'échec de ce pari audacieux. Parmi ceux cités pour lui succéder, le revenant Massimiliano Allegri, cinq fois champion avec la Juve (2015-2019) et, comme souvent, Zinédine Zidane en cas de départ du Real Madrid. Avant ce possible départ, Pirlo peut décrocher un deuxième trophée comme entraîneur avec la Coupe d'Italie (19 mai contre l'Atalanta), après la Supercoupe en janvier. Ronaldo en Ligue Europa ? La Juventus, éjectée du Top 4 synonyme de Ligue des champions, n'est pas encore hors-jeu. Mais gagner les trois derniers matches (Sassuolo, l'Inter Milan déjà sacrée championne, puis Bologne) ne suffira pas, elle dépend aussi des résultats de l'Atalanta (2e), Milan (3e) et Naples (4e). Manquer la C1 serait une première depuis 2012 pour la Juventus. Et pour Cristiano Ronaldo du jamais vu depuis... 2003 ! «CR7» est le meilleur buteur de l'épreuve européenne (134 buts) et à un match seulement d'égaler le record d'apparitions d'Iker Casillas (177). Pas certain que le Portugais ait envie, à 36 ans, d'y renoncer. Sans les revenus de la C1 (80 M EUR par an en moyenne), il n'est pas certain non plus que la Juve puisse supporter le salaire annuel de la star (54 millions d'euros brut, selon le site Calcio e Finanza), sous contrat jusqu'en 2022. L'hypothèse d'un départ prendrait à coup sûr une nouvelle consistance si la Juve manque la C1. La Juve y perdrait un attaquant toujours aussi efficace, en passe de finir meilleur buteur de Serie A (27 buts). Mais cela permettrait aussi à d'autres de trouver enfin leur place, tant «CR7» prend de la place, parfois au détriment du collectif. Quid d'Agnelli et la Super Ligue ? Au-delà du terrain, la tempête souffle à tous les étages, avec un directeur sportif (Fabio Paratici) en fin de contrat et un président Andrea Agnelli dans l'œil du cyclone Super Ligue. Proche du patron de l'UEFA et porte-parole des grands clubs jusqu'en avril, celui qui préside la Juve depuis 2010 (avec 9 titres de champion consécutifs) fait désormais plutôt figure d'ennemi public n°1. Le club, l'un des trois derniers mutins avec le Real Madrid et le FC Barcelone à ne pas avoir renoncé formellement à ce projet de compétition européenne dissidente, risque des sanctions européennes mais pourrait aussi ne pas pouvoir participer au prochain championnat, a rappelé lundi la Fédération italienne. Au-delà de l'affaire Super Ligue, Agnelli doit aussi répondre de ses choix sportifs — il a choisi Pirlo l'été dernier — et financiers, avec des comptes ayant viré au rouge depuis 2018 et l'investissement lourd fait sur Ronaldo. Une qualification ou non pour la C1 pèsera au moment des choix. Le dernier mot reviendra à son cousin John Elkann, le patron d'Exor, la holding de la famille Agnelli propriétaire du club, qui a assisté dimanche à la défaite contre Milan.