L'armée a renforcé sa présence autour du pénitencier de Guayaquil, dans le sud-ouest de l'Equateur, où aucun nouvel incident n'est intervenu dimanche, au lendemain du massacre de 68 détenus dans de violents affrontements entre gangs rivaux, selon des correspondants de presse. En soutien à la police, elle aussi présente en grand nombre, les renforts militaires ont été déployés tout autour de la prison, la plus grande du pays. Des dizaines de personnes étaient rassemblées dès le lever du jour devant la prison et la morgue de la police à la recherche d'informations sur leurs proches incarcérés. «Nous voulons au moins savoir, pour calmer l'angoisse de chaque père, de chaque mère», a déclaré, devant les portes de la prison, une femme à la recherche de nouvelles de son fils. Les autorités ont indiqué avoir mis en place un point de contact au sein du département de la police criminelle pour «aider et accélérer le processus de remise des corps aux proches des PPL (personnes privées de liberté) décédées lors des événements violents survenus au pénitencier du Litoral (Guayas 1)». Dimanche, le directeur de la médecine légale de la police, le colonel Marco Ortiz, a indiqué que 34 corps avaient déjà été identifiés grâce aux empreintes digitales mais que, pour l'heure, 16 autres n'ont pu l'être en raison de «l'état» dans lesquels ils ont été retrouvés. Un défenseur de l'environnement fait partie des victimes. Selon des ONG locales, Victor Guayllas avait été arrêté en 2019 pour avoir participé à des manifestations contre la hausse des prix du carburant qui avaient fait 11 morts. Le vaste complexe carcéral de Guayaquil a été le théâtre vendredi et samedi d'affrontements d'une extrême violence entre gangs rivaux de détenus. À coups d'armes blanches, d'armes à feu et d'explosifs, des prisonniers ont attaqué, après avoir saboté l'électricité, les occupants du bloc 2, faisant 68 morts et 25 blessés, selon le dernier bilan. Les autorités ont dénoncé la «sauvagerie» et la «barbarie» des assaillants, que des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré s'acharnant, à coups de couteaux et de bâtons, sur des corps entassés et carbonisés dans une cour. Samedi soir, alors que de nouveaux incidents étaient signalés ailleurs dans le pénitencier, près de 900 policiers ont été déployés, dont 500 à l'intérieur même du complexe pénitentiaire pour reprendre le «contrôle» de la situation, selon le porte-parole de la présidence. La prison de Guayaquil abrite 8 500 détenus, avec une surpopulation de 60%. Elle est divisée en douze quartiers, où sont détenus séparément les membres d'au moins sept organisations criminelles, souvent rivales, ayant des liens avec notamment les cartels mexicains de Sinaloa et Jalisco Nueva Generación. Le 28 septembre, 119 personnes y avaient été tuées dans les mêmes circonstances, lors du plus grand massacre de l'histoire carcérale de l'Equateur et l'un des pires en Amérique latine. Certains détenus avaient été démembrés, décapités, ou brûlés. Le Président Guillermo Lasso avait alors proclamé «l'état d'exception» dans les 65 prisons équatoriennes, promettant le déploiement d'importants renforts militaires. La Cour constitutionnelle avait cependant limité sa durée et interdit que les militaires ne pénètrent à l'intérieur des prisons. Une «lutte pour le leadership», après la sortie de prison la semaine dernière d'un chef de gang, serait à l'origine des nouvelles violences dans le pénitencier de Guayaquil, selon la police. Les violences dans les prisons équatoriennes ont désormais fait plus de 320 morts depuis le début de l'année.