Reportage réalisé par Yazid Yahiaoui Seraient-ce les sécheresses successives des trois dernières années qui ont rendu les Algériens si friands de la neige, ou les vacances prolongées qui ont poussé les parents à se plier aux caprices de leurs enfants, pour leur offrir quelques jours de détente dans ces lieux paradisiaques ? À voir les milliers de familles qui affluent quotidiennement et depuis plus d'une semaine à la station climatique de Tikjda, qui culmine à plus de 1 500 mètres d'altitude au niveau de ces majestueux chaînes du Djurdjura parées à l'occasion et pour la première fois, depuis longtemps comme nous le disions plus haut, du plus beau manteau blanc, on serait tenté de prendre en compte les deux hypothèse à la fois. Un lieu paradisiaque appelé Tikjda En effet, et depuis plus d'une semaine, soit depuis la sortie prématurée des classes pour des vacances prolongées, pas un jour ne passe sans que la RN33 qui mène depuis Bouira vers la station de Tikjda, et même le CW98 qui relie la RN33 à l'autoroute Est-Ouest, la RN5 et la RN15, soit toutes les wilayas de l'est du pays, soient pris d'assaut dès les premières heures de la matinée pour former, et pendant toute la journée, une interminable file de véhicules et sur des kilomètres sur ce chemin qui monte, monte et serpente à n'en pas finir, pour paraphraser Mouloud Feraoun. Des chemins qui montent et qui créent un embouteillage monstre et un blocage systématique de la circulation dès les coups de 9 heures ; obligeant les plus audacieux à abandonner leurs véhicules là, à quelque 10 km, voire 15 km loin de la station de Tikjda, pour parcourir le trajet à pied. Cependant, cette solution toute trouvée par des jeunes qui viennent par groupes pour passer d'agréables moments dans ces lieux féériques ne l'est pas pour ces familles qui viennent souvent avec des enfants en bas âge ou carrément des bébés, et pour qui cette solution paraît impossible. De fait, c'est à d'interminables files d'attente que sont soumises, la mort dans l'âme, ces familles. Certaines se contentant de jouir des paysages idylliques des lieux et des vues imprenables sur toute la vallée du Sahel avec son grand barrage de Tilesdit qui complète ce tableau naturel des plus envoûtants ; véritable panorama qui offre une vue de près de 180°. En effet, alors que la procession de voitures avance à pas de tortue sur cette pente serpentée, des dizaines de familles profitent de la journée ensoleillée en étalant des nappes juste là, à côté de leurs véhicules, laissant les enfants jouer, le regard jeté au loin sur cette vallée enivrante. D'autres, les plus audacieux, ceux qui avaient réussi à monter parmi les premières vagues de bonne heure, en réussissant tant bien que mal à vaincre le verglas, sont évidemment les plus chanceux. Ceux-là, surtout ceux qui ont opté pour l'autre versant de l'Akouker du côté de Tighzert ; là où existe le fameux chalet du CAF, aujourd'hui réécrit en Kaf pour dire falaises, alors qu'initialement CAF voulait dire tout simplement le Club alpin français ; créé du temps de la colonisation. Aussi, toutes ces familles qui ont réussi à atteindre la localité Tighzert se voient gratifiées par de splendides paysages avec une épaisse couche de neige bien compactée avec les températures inférieures à zéro depuis plus d'une semaine. La neige qui, une fois gelée, résiste aux rayons solaires de la journée et permet aux amoureux du ski de renouer avec leur sport favori, devenu ces dernières années un lointain souvenir. Des pères de famille, des mères et bien sûr des bambins, des jeunes sont tous là sur cette piste naturelle bien gelée et propice aux patinage et au ski avec des luges ou des patinoires. Pendant plusieurs jours encore, ces joies renouvelées persisteront et pourront le demeurer longtemps si Dame Nature voudrait bien encore nous gratifier avec de nouvelles couches de neige durant les jours et les semaines à venir. Beaucoup de facteurs plaident pour un hiver très rigoureux avec beaucoup d'épisodes neigeux. C'est tout le mal qu'on souhaite. Gare aux imprudences ! Par ailleurs, comme chaque médaille a son revers, les éléments de la Protection civile sont souvent appelés à secourir des gens qui s'aventurent dans des endroits périlleux comme le lac Agoulmime qui culmine à plus de 1 500 m d'altitude, et dont les sentiers sont souvent pleins de pièges et d'obstacles que des jeunes venus des lointaines wilayas ignorent souvent et se retrouvent donc piégés dans des tempêtes ou carrément victimes d'accidents, comme c'était le cas pour ce jeune de Mascara qui avait fait une chute sur une pente de plus de 80 m et s'est retrouvé avec de multiples fractures provoquées par les différents chocs avec les rochers lors de sa chute. Ou encore ces six autres jeunes d'Aïn Defla qui s'étaient retrouvés en pleine tempête sur l'ancienne RN33 du côté de Alouane, les trois jeunes âgés entre 19 et 21 ans, totalement perdus entre Tighzert et le lac Agoulmime. Et enfin, cette famille de quatre personnes, trois hommes et une femme, pris également dans une tempête alors qu'ils regagnaient leur demeure au village Ath-Reggane dans la wilaya de Tizi-Ouzou en passant par une route boueuse du côté de Tighzert. Toutes ces personnes ont été sauvées par des équipes professionnelles, dont Grimp 10 spécialisée dans le sauvetage en pleine montagne et dans des gouffres, une équipe spécialisée en spéléologie. Mais aussi d'autres éléments spécialement formés pour le sauvetage dans des endroits périlleux participent au quotidien à sauver des vies humaines le plus souvent au prix de leurs propres vies. Chapeau bas pour toutes ces équipes de la Protection civile de la wilaya de Bouira. Des équipes qui ne cessent, aux côtés des éléments de la Gendarmerie nationale, de prodiguer des conseils à l'endroit des touristes, surtout ceux qui viennent pour la première fois vers ces endroits féériques mais ô combien dangereux ; afin de ne pas s'éloigner de la route et du Centre national des sports et loisirs, le CNSLT. Mais, souvent, ces conseils restent lettre morte : des jeunes les ignorent magistralement et mettant en péril leur vie d'une manière inconsciente. Aussi, nous ne le répéterons jamais assez : la montagne surtout avec ses neiges enchanteresses est d'évidence, un moment de joie et d'évasion mais, par une simple négligence, celle-ci peut devenir un véritable cauchemar. Alors, vigilance, vigilance, vigilance ! Y. Y.