Triple champion d'Algérie et un des premiers pugilistes à représenter le pays aux JO de Moscou en 1980, où il avait échoué en quart de finale face au futur médaillé d'or, Boualem Belaouane a dirigé les boxeurs de la Garde républicaine pendant 27 ans avant de prendre sa retraite récemment. Son constat est plutôt amer sur le noble art et il prône le professionnalisme. Le Soir d'Algérie : Vous avez été trois fois champion d'Algérie et l'un des premiers boxeurs à représenter le pays aux JO de Moscou en 1980. Pourquoi n'avez-vous pas opté pour le professionnalisme ? Boualem Belaouane : Pour la simple raison que le professionnalisme n'existait pas en Algérie et que je devais aller en France pour devenir pro. Et vous ne vouliez pas vivre en France ? Non, c'est que je devais d'abord me soumettre au service national. Après mes combats aux JO au mois de juillet 1980, j'ai reçu mon ordre d'appel pour le mois de janvier et je suis resté au pays pour accomplir mon devoir national pendant deux ans. Et vous y êtes resté puisque vous avez entraîné la Garde républicaine... J'étais devenu l'adjoint de l'entraîneur de l'EN militaire de l'époque, M. Lahiani, qui était le coach de Moussa quand ce dernier a décroché l'or aux JO, puis lorsque le Centre des équipes nationales militaires a été dissous, il est parti à Oran et, à ce moment-là, je suis devenu le coach de la Garde républicaine pour une longue durée de 27 ans. Vous avez déclaré que vos deux meilleurs boxeurs algériens, ce sont Ould Makhloufi et Hamani ? Oui, ils ont marqué le noble art national. À propos de Loucif Hamani, est-il vrai que vous avez combattu contre lui en sparring-partner ? Oui, c'était dans la salle de l'Onaco. On dit qu'il frappait fort et sec... Mais avec moi, il était plutôt tendre et son but, c'était surtout de suer et non pas de nous démolir. En tout cas, par rapport à son poids de catégorie des moyens, il était d'une rapidité fulgurante. Il enchaînait les coups à une vitesse supersonique. Et en dehors du ring, comment était-il ? Un ami. D'ailleurs, il m'avait invité chez lui en France et je me suis entraîné avec lui dans sa salle. C'est là-bas que j'ai eu l'occasion de connaître Lasbeur, un boxeur pro qui est devenu un grand avocat et qui était le voisin de Hamani à Choisy-le-Roi. Hamani reprochait à la fédération de ne pas organiser régulièrement de combats, estimant qu'un boxeur qui s'entraîne finit par se lasser et abandonner... Il avait raison. D'ailleurs, en Algérie, il y a beaucoup de boxeurs qui ont arrêté la pratique de cette discipline. Et je vais vous donner un exemple tout simple. Benchebla, Flici et d'autres boxeurs internationaux sont en équipe nationale depuis près de 15 ans. Ils participent à toutes les compétitions internationales. Mais les autres boxeurs attendent longtemps sans pour autant être sollicités et ils renoncent du fait que nous n'avons pas une équipe espoirs. Et quelle serait votre solution ? Il faut professionnaliser la boxe comme on l'a fait avec le football. Le boxeur amateur qui n'a pas la chance d'aller en sélection, pourquoi ne deviendrait-il pas pro ? Quand on professionnalise, faut-il des moyens financiers assez conséquents ? Il faudrait créer une fédération professionnelle et ouvrir la porte à des amateurs pour qu'ils puissent devenir des pros. Il faut aussi donner la chance aux jeunes entraîneurs issus de l'ISTS. En football, l'Algérie a donné la chance à deux entraîneurs jeunes, en l'occurrence Belmadi et Bougherra, et on a vu les résultats. Par conséquent, on pourrait former des techniciens destinés à la boxe pro uniquement pour encadrer les pugilistes dont ce sera le métier. Pour Ould Makhloufi, la boxe est en train de mourir. Qu'en dites-vous ? Elle est en train de mourir à petit feu à cause de ces boxeurs internationaux qui ne participent plus aux challenges nationaux. Ils ne combattent qu'à l'international. Ce qui fait que le boxeur qui a remporté le titre de champion d'Algérie n'est pas convoqué en équipe nationale et, à force d'attendre, il abandonne. Par exemple, le champion d'Algérie de 2021 n'est pas présent en EN parce qu'il y a déjà un ancien et il se retrouve seul dans son village. En fait, la boxe algérienne, ce sont des souvenirs mais pas d'avenir. Bientôt les Jeux méditerranéens qui se dérouleront à Oran. Faut-il donner la chance à de jeunes boxeurs récemment sacrés? Non, sur ce point, et comme on n'a pas de sélection B, ils ne sont pas préparés pour un tel événement. Il vaut mieux faire confiance aux anciens et comme le niveau des jeux est inférieur aux JO, je pense que l'Algérie peut terminer à la première place. Propos recueillis par Hassan Boukacem