Ni la hausse vertigineuse des contaminations au Covid-19, ni les appels incessants à respecter les gestes barrières et à se faire vacciner ne trouvent écho auprès d'une très grande majorité d'Algériens. Le taux de vaccination contre le Covid-19 est toujours à la traîne, alors que les comportements contraires à toutes les recommandations sont toujours adoptés. Pourquoi toute cette réticence ? Qu'est-ce qui explique qu'en pleine pandémie, des Algériens circulent sans masque, acceptent des invitations à des mariages ou continuent de se rendre au travail en étant porteurs du virus ? Eclairages de Zoubir Arous, sociologue et enseignant à l'Université Alger II. Nawal Imès - Alger (Le Soir) - La réticence d'un grand pan de la société à se faire vacciner contre le Covid-19 n'a d'égale que le respect très approximatif des gestes barrières, pourtant connues de tous après plus de deux ans de pandémie. En adoptant des attitudes qui les exposent directement à une contamination contre le Covid-19, beaucoup de citoyens évoluent dans les espaces publics comme si le risque n'était qu'une vue de l'esprit ou le fruit d'un scénario qui ne peut se réaliser. En ne portant pas de masque, en se rendant à des fêtes familiales en plein pic épidémiologique ignorent-ils les risques ? Sont-ils suicidaires ? A toutes ces questions, Zoubir Arous, sociologue et enseignant à l'Université Alger II, apporte son éclairage. Pour lui, il s'agit, avant tout, d'un problème de confiance, expliquant que «la grande majorité du peuple a perdu confiance dans les médias, et dans les gouvernants mais aussi dans les partis politiques, qu'ils fassent partie de ceux ayant fait allégeance ou ceux de l'opposition». Il assure qu'«à chaque fois qu'un responsable prend la parole, la grande partie de la population doute dans la véracité de ses propos et ne lui fait pas confiance. Même le discours au niveau des médias n'a pas été à la hauteur de la gravité de la situation. Le message n'est malheureusement pas passé». Comment explique-t-il la réticence face à la vaccination ? Zoubir Arous répond qu'«il y a plusieurs catégories sociales qui s'opposent à la vaccination. D'abord, il y a les personnes qui s'y opposent pour des raisons de santé car ayant des contre-indications qui les empêchent de se faire vacciner. La deuxième catégorie est composée des adeptes de la théorie de la conspiration et qui considèrent la vaccination comme un complot contre les musulmans, les Algériens ou les gens bien comme eux. Puis viennent ceux qui ont une conscience «primaire» sur la santé et qui font un amalgame entre conscience politique, religieuse et sociale, en estimant que la vie et la mort sont une question de destin. Il ne faut pas oublier une autre catégorie, celle des personnes vivant dans les régions isolées auxquelles notre système de santé est encore incapable de garantir une bonne prise en charge, en dépit des discours qui prétendent le contraire». Pour le sociologue et enseignant, tous ces facteurs conjugués ont mené à un comportement de défiance, qu'il s'agisse de la vaccination ou du respect des mesures pouvant éviter une contamination. N. I.