Qui est Jean El-Mouhoub Amrouche ? Qui est Marguerite Taous Amrouche ? Qui est Fadhma A�t Mansour Amrouche ? Si l�on posait ces questions � nos lyc�ens et � nos �tudiants combien d�entre eux sauraient y r�pondre ? Une infime minorit� tr�s certainement. Et pour cause, ces illustres personnages de notre histoire contemporaine, ces sauveteurs d�une large partie de notre patrimoine culturel sont officiellement entour�s d�un mur de silence. Est-ce parce qu�ils sont kabyles et chr�tiens de surcro�t ? s�est-on demand� dans les d�bats. Ce n�est pas �vident lorsqu�on pense � Mohammed Arkoun, c�l�bre penseur musulman disparu r�cemment. C�l�br�e � l��tranger, la contribution de la famille Amrouche, de Jean en particulier, � la pens�e universelle et � la litt�rature alg�rienne d�expression fran�aise est occult�e en Alg�rie, pays d�origine pour lequel Jean et sa s�ur Taous se sont vou�s corps et �me. Ce mur de silence vient de subir une br�che � l�occasion d�une journ�e d��tude sur la famille Amrouche, organis�e, samedi 25 d�cembre, par la maison de la culture Mouloud- Mammeri de Tizi-Ouzou. La co�ncidence de cette manifestation avec la f�te de No�l n�a pas �chapp� � un intervenant qui a salu� ce premier geste d�ouverture sur la communaut� chr�tienne du pays. Cette manifestation culturelle tranche en effet avec l�ambiance de chasse polici�re aux citoyens de confession chr�tienne et aux non-je�neurs ponctu�e par des proc�s et parfois des condamnations. Cet int�r�t tardif vis-�-vis de la famille Amrouche est-il le signe d�une r�vision d�finitive de la position officielle traditionnelle envers les citoyens alg�riens de confession chr�tienne ? �a reste � v�rifier. Ce premier hommage � la famille Amrouche n�est-il pas plut�t une diversion vis-�-vis de la chasse �voqu�e plus haut ? se demande-t-on encore. Est-il r�ellement une tentative de r�appropriation du patrimoine national dans toute sa diversit� ? C�est peut-�tre l�intention des organisateurs qui essaient tant bien que mal de sortir de l�oubli de nombreux penseurs et hommes de culture en vie ou disparus. La d�ception exprim�e avec v�h�mence par Sadek A�t Hamouda suite au montage po�tique improvis�, dans l�apr�s-midi, n�est qu�une illustration vivante des cons�quences n�gatives du bricolage qui pr�vaut lors de certains hommages et semaines culturelles. A la d�clamation musicale des Cendres et de l�Etoile secr�te, po�mes de Jean Amrouche, il manquait l��locution, la tonalit� et la gestuelle th��trale n�cessaires pour �mouvoir l�assistance. En revanche, les conf�renciers de la matin�e, plus particuli�rement Mme Amhis El-Djouher, auteure, et Slimane Benaziez, enseignant � l�Ecole sup�rieur de journalisme, ont retenu davantage l�attention des pr�sents. Le premier s�est attach� � rendre vivante, attractive et transparente l��uvre romanesque de Taous. La maison de l�exil, Jacinthe noire, Rue des tambourins et l�Amant imaginaire nous ont fait vivre, sous l��clairage de Mme Amhis, les tiraillements internes, les souffrances morales, les interrogations sans fin, la force de caract�re et l�ind�pendance d�esprit de Taous Amrouche la rebelle et battante qui, interdite de prendre part au Festival panafricain de 1968, a os� d�fier le pouvoir en donnant une conf�rence aux �tudiants � Ben Aknoun. Le second, natif d�Ighil Ali comme Jean El-Mouhoub, son voisin, a pass� en revue les aspects marquants de la famille Amrouche, celle de Belkacem Amrouche et de Fadhma Ath Mansour, tous deux recueillis � 5 et 3 ans, �lev�s et mari�s par les P�res blancs. Un foyer de 8 enfants marginalis�, rejet� dans son propre village et en Tunisie � cause de leur confession chr�tienne qui, paradoxalement, ne les a pas prot�g�s contre les affres de la colonisation. Rentr� de Tunisie apr�s sa retraite des chemins de fer, Belkacem sera d�clar� fellaga comme tout habitant du village. Jean El-Mouhoub, brillant journaliste de Radio France, sera renvoy� par le Permier ministre fran�ais � cause de ses prises de position en faveur du peuple alg�rien, son peuple, en guerre. L��bauche d�un chant de guerre, po�me d�di� � la m�moire de Larbi Ben M�hidi et le combat alg�rien qui rappellent, entre autres �crits de m�me facture, l�engagement de Jean El-Mouhoub Amrouche vis-�-vis de la cause nationale, rend tout � fait inutile le questionnement de certains sur son alg�rianit� et sur son patriotisme. N�a-t-il pas servi d�interm�diaire entre le GPRA et le g�n�ral de Gaulle avant d��tre nomm� membre de l�ex�cutif provisoire pr�sid� par Abderrahmane Far�s ? a-t-on rappel� au cours de cette journ�e d��tude, soulignant, par ailleurs, le caract�re profond�ment humain de Jean Amrouche qui r�vait, � l�instar de Mouloud Feraoun, d�une Alg�rie plurielle, riche de sa diversit� et de son glorieux pass� plusieurs fois mill�naire.