Par Arezki Metref [email protected] Dimanche 13 f�vrier : � R�veil de M.-Le-Peuple !... Retour... � la normale ? Chacun interpr�te comme il veut la marche d'hier. Que beaucoup pensent qu'il s'agit l� d'un �chec, grand bien leur fasse ! Que ce ne soit pas une raison pour s'en laver les mains. D�j�, on entend �des...�, qui se prennent pour le peuple himself, nous expliquer comment on r�ussit une marche populaire. Il ne leur viendrait �videmment pas � l'id�e de se dire que, puisque moi-le-peuple� je sais, nous allons passer en t�te ! Non, ils sont l�, aigris, moisis sur eux-m�mes, se gargarisant d'�tre la puret�, attendant bien planqu�s que cela se passe pour sortir le commentaire idoine. A ces attentistes vermoulus, nous r�pondrons, non pas : Taisez-vous ! Mais : Cause toujours ! Il y a lieu de savoir que chacun a son histoire, ses luttes, ses combats, qui sont au moins aussi respectables que ceux des autres. Cela ne marchera pas entre nous tant que des corniauds embusqu�s dans l'h�ro�sme de leur anonymat se la ram�neront en Zorro du peuple, le seul � avoir tout compris. Si c'est le cas, le r�sultat est plut�t... Parce qu'elle a rassembl� des gens diff�rents, parce qu'elle a eu lieu en d�pit de tous les obstacles, la marche d'hier est une victoire de l'humilit� sur la haine qui anime certains secteurs de l��lite politique tellement gangren�e qu�elle voit passer les r�volutions sans y toucher tout en croyant qu�elle en est la locomotive. Lundi 14 f�vrier :� Et celui de Mme-La-Gauche� Entendu Louisa Hanoune expliquer que la marche �tait un �chec parce que le peuple ne suit pas le RCD, parti de �droite�. Le meilleur moyen d'�prouver si le peuple de Louisa Hanoune aurait suivi une marche initi�e par un parti de �gauche� aurait �t� qu'elle y appelle. Dommage pour le sondage rat� ! Mardi 15 f�vrier : Doctrine de la dictature sur la m�diocrit� Vu � la t�l� une assembl�e g�n�rale des journalistes �gyptiens. Dans une salle du Caire pleine comme un �uf, � la tribune, un dirlo de journal public, qui n�a commenc� � couvrir les �v�nements de la place Tahrir que plusieurs jours apr�s la chute de Moubarak, est en train de discourir euphoriquement sur la r�volution lorsqu�il est interrompu par de vrais manifestants � des jeunes dont le visage porte la trace de la veille et du combat � qui le renvoient � sa servitude. Mais visiblement, le gus n�a pas dit son dernier mot. Dans quelque temps, on le rencontrera dans les pelotons d�avant-garde de la r�volution. L��pisode tragicomique pr�c�dent est doublement int�ressant pour nous. Un : on l�a v�cu en 1988. Les plus serviles des journaleux et les plus flics, ceux qui d�non�aient les faits et gestes de leurs confr�res, se sont improvis�s des CV de d�mocrates minute avec lesquels certains continuent toujours de naviguer. Comme quoi, une r�volution prise en route peut faire faire du chemin ! Deux : c�est ce qui va arriver de nouveau un de ces jours, visiblement pas trop trop �loign�. On verra celles et ceux qui nous ont fait bouffer du Bouteflika � toutes les sauces, les thurif�raires aplatis, retourner vite la veste et jouer la nouvelle partition qui risque d��tre la m�me m�lodie avec un autre chef d�orchestre. Mais t�chons cette fois-ci de nous souvenir de qui nous a plong�s dans l��paisse m�diocrit� de l�information et de la culture officielles. On ne devrait pas avoir de mal si on consid�rait cette perspicacit� de l��crivain albanais Isma�l Kadar�, qui a bien connu le r�gne d�Enver Hodja, quand il dit : �Ceux qui �taient m�diocres sous la dictature le demeurent apr�s.� Mercredi 16 f�vrier : Le retour des �anciens�� Sid-Ahmed Ghozali empoigne sa lance. Dans El-Khabar: �Les responsables alg�riens s�enorgueillissent de cumuler des r�serves de change avoisinant les 140 milliards de dollars, une fortune que l�on ne doit pas � la politique �conomique du pouvoir en place, mais � un don du ciel, le p�trole dont on ne peut m�me pas se targuer du m�rite d�en avoir d�couvert les gisements. M�me les projets mis en avant au palmar�s des r�alisations de ce pouvoir, telle l�autoroute Est-Ouest, ont atteint, en termes de co�ts, des budgets jamais �gal�s de par le monde pour des �difices de la m�me taille. H�las, un pouvoir atteint de c�cit� ne peut que s�enorgueillir de ses propres tares�, Bingo ! Fallait le r�p�ter, oui ! Abdelhamid Mehri, pour sa part, toujours aussi fin, enfonce le clou dans une lettre � Bouteflika publi�e par la presse : �Vous �tes aujourd�hui au sommet d�un r�gime politique dont la mise en place n�est pas de votre seule responsabilit�. C�est un r�gime � l��dification duquel a particip� quiconque a assum� une part de responsabilit� publique depuis l�ind�pendance, que ce soit par son opinion, son travail ou son silence. Mais aujourd�hui, de par votre position, vous assumez, et avec vous tous ceux qui participent � la prise de d�cision, une grande responsabilit� dans la prolongation de la vie de ce r�gime qui, depuis des ann�es, est bien plus marqu� par ses aspects n�gatifs que positifs. Il en est devenu, en outre, inapte � r�soudre les �pineux probl�mes de notre pays qui sont multiples et complexes, et encore moins � le pr�parer efficacement aux d�fis de l�avenir qui sont encore plus ardus et plus graves. Le syst�me de gouvernement install� � l'ind�pendance s�est fond�, � mon avis, sur une analyse erron�e des exigences de la phase de la construction de l�Etat national.� Un peu tard mais bien vu ! La question est : qu�est-ce qu�on fait maintenant ? Il tourne sur le web des tas de textes, de p�titions, de philippiques, de messages, d�analyses dont les auteurs disent qui leur amour (parfois, exclusif, le mien �tant �videmment sup�rieur et meilleur que les autres) de l�Alg�rie, qui l�envie pressante de voir s�en aller le pouvoir et � sa t�te qui tu sais, qui carr�ment la demande � tous les anciens, pouvoir et opposition, de s�en aller� Cette derni�re cat�gorie est int�ressante dans la mesure o� elle catalyse la suffisance des n�ophytes et leur volont� de se planter seuls plut�t que d��tre accompagn�s par les porteurs d�exp�riences. Tout mouvement provient d�une cha�ne dialectique du m�me mouvement qui s�est d�roul�e dans des conditions sp�cifiques. Et puis, soyons s�rieux, qui a �toute� la l�gitimit� pour emp�cher d�autres de se lancer dans la protestation ? Il y a de l�encre et de la salive qui se perdent� Je pr�f�re, et de loin, la lecture des anciens aux vocif�rations qui pensent que les d�cibels des injures augmentent la l�gitimit� de la parole� Ce n�est pas la premi�re fois qu�on voit les choses en train de changer en Alg�rie. On conna�t ce que sont les �marsiens� de toutes les �poques. Jeudi 17 : Le guide Kadhafi sort de sa tani�re. Il fallait s�attendre � ce que la Libye bouge elle aussi. Pas de raison. Et comme il fallait s'y attendre aussi, le vieux tyran de Tripoli utilise le seul langage qu�il connaisse : la r�pression. Des morts, il y en a tous les jours. Les pandores tirent � balles r�elles comme s�ils �taient au tir aux pigeons. Ils ont un tel m�pris de la vie de leurs concitoyens qu�ils les tueraient tous pour que le Guide ne soit pas contest�. D�ailleurs, pour montrer que la population l�aimait, il a offert aux t�l�s la caricature famili�re aux r�gimes arabes : le bain de foule parmi ses partisans ! On conna�t �a dans tous les pays arabes. Des charlots qui viennent se tr�mousser au milieu de figurants pay�s rubis sur l�ongle. Si les despotes arabes qui ont suc� la moelle de leurs pays m�ritent de d�gager fissa, le pire d�entre eux est le sultan de Libye ! Indescriptible ce que racontent les gens de l�int�rieur ! Le peu d�air qu�il y a dans l�atmosph�re, il faut se plier pour l�emmener dans ses poumons ! Vivement qu�ils partent ! Vendredi 18 f�vrier : Le gentil petit Etat M�me le gentil petit Etat de Bahre�n conna�t des remous. M�me syndrome que dans les autres pays arabes. Bref, c�est la mouise baignant dans le despotisme. Mais aussi, cette r�volte du peuple de Bahre�n pose clairement la question sociale. Comme dans les autres pays. Comme en Alg�rie. On insiste sur les libert�s, le changement du syst�me pour le rendre plus repr�sentatif de toutes les couleurs politiques mais on passe � la trappe la question sociale qui demeurera, elle, cette sorte de volcan qui peut exploser � tout moment. La d�mocratie, oui, mais pas sans la justice sociale et la lutte contre les in�galit�s !