Par Boubakeur Hamidechi [email protected] Au coeur du fracas de l�exp�dition punitive qui se d�roule � notre fronti�re et des r�pressions dirig�es par les lointains r�gimes de Syrie et du Y�men, l�Alg�rie demeure suspendue � la r�ponse officielle. Seuls les politologues, auteurs du postulat de �l�exception � alg�rienne, devraient par cons�quent nous expliquer ce qu�il va advenir du pouvoir d�ici et comment celui-ci d�nouera-t-il la crise. La subtile ex�g�se sur l�improbable �contagion m�canique� des chutes de Ben Ali et Moubarak n�a pas �chapp� au r�gime d�Alger. Rassur� par le diagnostic, n�est-il pas en train de reprendre solidement la main apr�s les d�sarrois de janvier dernier ? A l�image du chef de l�Etat, agissant comme un joueur d��chec qui multiplie les leurres, son entourage diffuse de vagues messages relatifs � de� vagues r�formes afin de tenir la bride courte au pays entier. Cependant, la manoeuvre et son affichage dans les interventions m�diatiques (Belkhadem notamment) n�aura, � terme, qu�un effet sur le rythme d�un processus devenu in�luctable. Changer �de� politique ou bien changer �la� politique dans le pays constitue d�sormais une ligne de partage claire. Bouteflika, dont l�avenir se joue � partir de cette alternative, compte toujours sur le camp des l�galistes qui ne plaident que pour un pacte r�nov� autour d�un changement �de� politique. Or, comment d�samorcer le maximalisme de ceux qui, frontalement, exigent la d�capitation du syst�me si ce n�est qu�en l�usant par le silence. Ne se prononcer que le plus tard possible et notamment sur le contenu de ses projets lui sert de tactique d�usure. Un choix qu�il compte bonifier � terme par une d�bauche d�op�rations de s�duction sociale en direction des classes fragiles et au plan international par une posture de r�gime de droit. Cependant, il faudra bien qu�un jour ou l�autre qu�il soit contraint de mettre � table ses cartes et plaider le bienfond� des r�formes qu�il s�appr�te � introduire. Or, sur ce qu�il dira, il ne peut y avoir de consensus national s�il �vite d�aborder la n�cessit� d�une constituante et les pr�alables qu�elle impose. A�t Ahmed apr�s Mehri vient d�en rappeler l�objectif final. Des appels qui ont tout pour lui d�plaire dans la mesure o� la logique d�une refondation institutionnelle passe in�vitablement par la dissolution des charges �lectives dont celle de pr�sident de la R�publique ! Donner naissance � une seconde r�publique apr�s le vieillissement de la premi�re ne rel�ve pourtant pas d�une culture putschiste comme certains s�efforcent d�en instruire un proc�s d�intention. Les fun�railles d�une RADP, qui ne fut d�ailleurs que rarement vertueuse, s�imposent d�elles-m�mes. Historiquement, elle fut le viol originel de la lib�ration du pays. Et c�est � Ben Bella que l�on doit ce d�lit primordial qui confisqua aux Alg�riens une citoyennet� � peine conquise. En contradiction avec les recommandations des congr�s de la Soummam et de Tripoli et en d�licatesse d�lib�r�e avec la proclamation du 1er Novembre 1954, le fameux groupe de Tlemcen tailla des croupi�res � la constituante de 1962 pour imposer au pays celle qui, dans ses fondamentaux, le r�gente � ce jour. En effet, celle dont se dota Boumedi�ne en 1976 ne fit que renforcer l�arsenal despotique alors que Bendjedid ne se d�barrassa en 1989 que de la r�f�rence id�ologique du �parti-Etat�. Enfin, Zeroual en 1996 compl�tera l�habillage en introduisant le bicam�risme et en enrichissant la d�finition de l�identit�. Or, ces quatre r�visions, ayant pourtant accompagn� les moments forts de la vie du pays, n�ont eu que peu d�effet sur les modalit�s de fonctionnement de l�Etat. Chaque fois elles l�gitimaient � nouveau la m�me pratique et ne remettaient pas en cause le socle du syst�me. Autrement dit, les r�am�nagements ont permis la p�rennit� de celui-ci dont Bouteflika est l�actuel repr�sentant, quand bien m�me il s�efforce de le faire oublier. L�Alg�rie de 2011 n�est plus dans l�attente d�une cinqui�me r�vision de la Constitution dont se servent habituellement les pr�sidents pour requalifier leur pouvoir. Cette mise en �quation recuite que l�on veut actualiser dans le contexte actuel ne r�pond plus � la r�volution culturelle en gestation. C�est de rupture � la fois avec le cadre institutionnel et avec une g�n�ration de dirigeants qu�il sera dor�navant question. Il ne s�agit plus de �changer de politique� mais, �de changer le rapport � la politique� des citoyens pour sortir, enfin, le pays de ce d�sarmement moral dont parle A�t-Ahmed. C�est d�ailleurs � lui que l�on doit la fameuse mise en garde contre les bourgeons du totalitarisme qui commen�aient � percer dans les pratiques du pouvoir en 1963. �Un parti fort (�) n�a nul besoin de dissoudre un autre parti comme le Parti communiste �, d�clarait-il et d�ajouter presque proph�tique : �Je pense que la pr��minence du parti FLN n�entra�ne pas n�cessairement l�unicit�.� La le�on a-t-elle jamais �t� retenue presque un demi-si�cle plus tard ? Demandez-le � l�actuel secr�taire g�n�ral du FLN qui traque sans prudence et sans humilit� la moindre critique. Voil� pourquoi il ne reste d�autre choix v�ritable que celui d�une refondation sans les dirigeants actuels. A son tour, le pr�sident doit s�y r�soudre.