Par Nadji Safir, sociologue Dans un ouvrage remarquable, tout particuli�rement stimulant au plan intellectuel et dont je conseille tr�s vivement la lecture ( Effondrement � Comment les soci�t�s d�cident de leur disparition ou de leur survie � Gallimard � Essais � 2006), l�environnementaliste-g�ographe am�ricain Jared Diamond pr�sente ce qu�il appelle une �feuille de route des facteurs contribuant � l��chec de la prise de d�cision de groupe� dans laquelle il distingue quatre �tapes successives pour rendre compte de situations graves face auxquelles certaines soci�t�s n�ont pas pris les bonnes d�cisions. En l�occurrence, celles qui leur auraient probablement permis de survivre : - i) ne pas avoir �t� en mesure d�anticiper les probl�mes ; - ii) une fois les probl�mes survenus, ne pas avoir �t� en mesure de les percevoir ; - iii) une fois les probl�mes survenus et per�us, ne pas avoir essay� de les r�soudre ; - iv) une fois les probl�mes survenus et per�us, malgr� l�action effectivement conduite pour les r�soudre, ne pas avoir �t� en mesure de les r�soudre. En essayant d�appliquer aux �volutions du pays cette grille de lecture qui me semble pertinente, je consid�re que deux questions essentielles, imm�diatement, se posent : d�abord, �videmment, celle visant � caract�riser la nature des probl�mes ; ensuite, celle tentant d��valuer la situation du pays par rapport aux quatre �tapes successives d�finies. En ce qui concerne la caract�risation fondamentale des probl�mes que vit le pays, je pense que, sans �quivoque aucune, il convient de mettre au centre de toutes les pr�occupations la nature renti�re syst�mique de son �conomie. Allant dans ce sens, tous les indicateurs sont clairs et toutes les analyses ont depuis longtemps �t� faites aux plans national et international par les observateurs et analystes les plus divers qui �tablissent un constat sans appel ; moi-m�me j�ai d�j�, dans ces colonnes, pr�sent� les chiffres les plus significatifs. Qui sont ceux d�une �conomie nationale tr�s gravement affect�e � comme gangren�e � par un syndrome particuli�rement aigu de �mal�diction des ressources� qui a compl�tement ravag� ses activit�s de production de biens et de services et l�a laiss�e enti�rement d�pendante des seules ressources renti�res li�es � la valorisation des hydrocarbures sur le march� mondial. A cet �gard, il est clair que la �fuite en avant� enregistr�e sous la forme de �surinvestissement � relatif dans les infrastructures � officiellement pr�sent�e comme un important acquis � ne r�gle absolument aucun des probl�mes de fond de l��conomie qui demeurent entiers. Plus grave m�me, tout se passe comme si la soci�t�, dans ses diverses composantes et logiques, aussi �tait, progressivement de plus en plus impr�gn�e par des logiques renti�res qui y deviennent dominantes et dont la principale cons�quence r�side dans une grave d�valorisation sociale de l�effort physique et intellectuel, remplac� par des stratag�mes individuels et collectifs visant en priorit� l�acc�s aux ressources renti�res. Or, de toute �vidence, par leur nature fossile m�me, ces hydrocarbures ont une dur�e de vie limit�e qui, dans le cas particulier de l�Alg�rie, en raison de r�serves relativement limit�es, ne rel�ve pas d�un horizon de tr�s long terme. Sur la base d�un tel constat, les solutions sont �videntes et consistent bien �videmment en une r�duction de la d�pendance de l��conomie par rapport � ces ressources renti�res en initiant, promouvant et d�veloppant des activit�s de production de biens et de services. Auxquelles doivent s�ajouter � tr�s �troitement et structurellement li�es � elles � les activit�s de production de connaissances, de plus en plus d�cisives dans le contexte mondial d�une �conomie de la connaissance, d�sormais dominante. Et c�est ainsi, qu�allant tout formellement dans ce sens, port�s sur la place publique depuis de tr�s nombreuses ann�es, notamment sous la forme de diverses appellations plus ou moins officiellement assum�es � �apr�s-p�trole�, �exportations hors-hydrocarbures �, etc. � des programmes officiels d�action �conomique reviennent dans le d�bat public, de mani�re lancinante. Malheureusement, force est de constater que, jusqu�� pr�sent, ces programmes sont tous demeur�s au stade du v�ux pieux ou de la simple incantation et les r�alit�s structurelles de l��conomie alg�rienne n�ont que tr�s peu chang�, continuant de buter sur un obstacle qui semble insurmontable, fonctionnant comme une barri�re aussi invisible que bien r�elle, une sorte de �plafond de verre�, celui de la production effective de biens, services et connaissances. D�autant que cette production, si elle devait voir le jour, ne peut plus �tre envisag�e dans le seul cadre d�une hypoth�tique et d�sormais impossible autarcie nationale, mais bien en tenant compte, d�abord, de toutes les �volutions du nouveau contexte �conomique mondial dans lequel cette production postul�e � tant publique que priv�e � doit s�ins�rer pleinement et activement, d�abord par la qualit� et la comp�titivit� internationalement significatives de ses biens, services et connaissances. Au final, il est donc clair que le principal probl�me auquel est actuellement confront�e la soci�t� alg�rienne est celui de d�montrer ses capacit�s � effectivement cr�er des richesses par le travail physique et intellectuel de ses membres en les organisant � cet effet, sortant ainsi d�un cercle vicieux rentier particuli�rement aigu et de plus en plus inqui�tant. En raison d�un �puisement in�luctable des ressources renti�res actuellement exploit�es, de la solution qui sera concr�tement et urgemment apport�e � ce probl�me de cr�ation de richesses par le travail va directement d�pendre, dans un premier temps, la coh�sion de la soci�t� alg�rienne ; puis, dans une seconde �tape, sa survie m�me, probablement au sens fort du mot, plus le temps � trouver les solutions requises sera long. Et ce, d�autant plus que le pays est situ� dans une zone g�ographique � tr�s haut risque � en raison de la double crise climatique et �cologique en cours et encore � ses d�buts � particuli�rement expos�e � des perspectives certaines de d�gradation des conditions objectives, � la fois, de production des biens et services et de vie des populations, directement li�es � une r�duction de la pluviom�trie � d�j� limit�e � et � une progression de la d�sertification. Or, � ce premier ensemble de facteurs de risques � plut�t �naturels� � s�en ajoute un second proc�dant des �volutions pr�visibles �conomiques, sociales et politiques de tous les pays composant l�espace saharo-sah�lien, imm�diat et plus lointain. Lui-m�me soumis, entre autres, aux pressions, directement et indirectement, exerc�es par l�extraordinaire explosion d�mographique de l�ensemble de l�Afrique subsaharienne, il devrait se transformer en une vaste zone d�instabilit� � marqu�e par de tr�s importants mouvements de populations de toutes natures � dont les cons�quences p�seront directement sur la stabilit� du pays. A la lumi�re de toutes ces consid�rations, si nous revenons � la �feuille de route� de Jared Diamond, eu �gard au probl�me nettement identifi� comme absolument incontournable de n�cessaire production de biens, services et connaissances et si nous voulons situer o� se trouve actuellement le pays par rapport aux quatre �tapes indiqu�es, je dirais qu�aujourd�hui il est � l��tape III (une fois les probl�mes survenus et per�us, ne pas avoir essay� de les r�soudre). En effet, nous avons clairement d�pass� l��tape II (une fois les probl�mes survenus, ne pas avoir �t� en mesure de les percevoir), puisque la perspective d�une �conomie productive non renti�re, comme incontournable solution aux probl�mes du pays, a �t� clairement per�ue et fait l�objet d�un tr�s large consensus national � m�me formel � depuis longtemps d�j�. Nous sommes donc, au moins, dans l��tape III (une fois les probl�mes survenus et per�us, ne pas avoir essay� de les r�soudre), puisque nous continuons depuis plusieurs ann�es d�essayer de r�soudre les divers probl�mes emp�chant l�av�nement de cette �conomie productive non renti�re, du moment que sur la base d�une �valuation objective de la situation actuelle, ils demeurent toujours pos�s. En fait, la question qui se pose est celle de savoir si nous avons r�ellement cherch� � les r�soudre, en nous dotant des moyens n�cessaires en termes de visions, politiques et moyens dans tous les domaines concern�s : institutions, gouvernance, ressources humaines et financi�res, capacit�s d�accueil des investissements directs �trangers, etc. Je consid�re que non, car, jusqu�� pr�sent, les politiques mises en �uvre n�ont pas r�ellement pris en charge les v�ritables probl�mes pos�s qu�elles ne cessent de contourner, en faisant semblant de les traiter. Alors que, dans les faits, elles demeurent � un stade virtuel, tr�s �loign� des v�ritables r�alit�s �conomiques et sociales � transformer dont elles semblent redouter le contact direct. Or, de cette r�ponse, absolument d�terminante, va d�pendre l�enjeu crucial de savoir si l�inqui�tante, voire fatale d�rive �voqu�e vers l��tape IV (une fois les probl�mes survenus et per�us, malgr� l�action effectivement conduite pour les r�soudre, ne pas avoir �t� en mesure de les r�soudre) est d�j� engag�e ou non. Ou bien encore, quand bien m�me elle serait engag�e, ses cons�quences sont-elles d�j� irr�versibles ? De ce point de vue, ma propre �valuation est qu�aujourd�hui, il n� y a rien de d�finitivement jou�, mais que le temps presse, surtout parce que nous vivons, � l��chelle mondiale, une p�riode de profondes transformations dans laquelle le facteur temps, pr�cis�ment, est de plus en plus d�cisif. De fait, il joue clairement contre nous, car dans la reconfiguration du monde en cours, caract�ris�e par une exacerbation croissante des enjeux de comp�titivit�, quiconque n�avance pas, n�cessairement recule en termes de positionnement relatif. Et c�est donc dire si le pays, plus que jamais dans son histoire moderne, est � l�heure de choix cruciaux � certainement vitaux, au sens fort � car il a atteint un seuil critique de basculement potentiel tout � fait sensible, puisque porteur de risques graves, mais aux cons�quences non encore irr�versibles � jusqu�� quand ? � et � partir duquel tout est encore possible. Soit une v�ritable prise en charge des graves probl�mes syst�miques bloquant l��mergence et la consolidation d�une �conomie productive non-renti�re. Soit, au contraire, une d�rive vers une spirale descendante, conduisant progressivement � un �sc�nario-catastrophe� domin� par une incapacit�, de plus en plus marqu�e, � r�soudre les probl�mes rencontr�s, comme indiqu� dans l��tape IV. Ce positionnement � la crois�e des chemins qui intervient dans un contexte interne caract�ris� par la proximit� d�une double c�l�bration sur une courte p�riode, 2012-2014, de deux anniversaires importants pour l�histoire nationale � 50e anniversaire de l�Ind�pendance et 60e du d�clenchement de la guerre de Lib�ration nationale � indique que le pays entre aussi dans une phase nouvelle. Par del� les diff�rents aspects symboliques, strictement li�s � la c�l�bration formelle des deux importants anniversaires concern�s, il faut �tre conscient que, de toute �vidence, dans les quelques ann�es qui viennent � cinq tout au plus � le pays aura parachev� un important cycle de son histoire contemporaine, caract�risable comme celui du recouvrement de la souverainet� nationale. En effet, quelles que soient les cons�quences � tangibles et non tangibles � encore sensibles de la colonisation dans tous les domaines de la vie de la soci�t� alg�rienne, nous pouvons certainement consid�rer qu�elles ont depuis longtemps d�j� un effet moins important que toutes celles r�sultant de l�ensemble des actions men�es dans le pays depuis 1962. En r�alit�, une nouvelle soci�t� alg�rienne, n�ayant plus que des rapports de moins en moins sensibles avec la phase coloniale, est n�e et fonctionne selon des logiques qui lui sont d�sormais propres ; lesquelles sont �galement activement fa�onn�es, bien s�r, par l�incontournable environnement international, tel qu�anim� par les divers processus de mondialisation en cours et auxquels, en tout �tat de cause, nous participons. Ainsi, en 2015 � demain donc � r�f�rence toute symbolique de la nouvelle phase �voqu�e, en conservant la structure actuelle par �ge de la population � qui sera de l�ordre de 38 millions d�habitants � sensiblement 95% des Alg�riens seront n�s en 1950 et apr�s, c�est-�-dire qu�ils avaient en 1962, au plus 12 ans et qu�en cons�quence la guerre de Lib�ration nationale est pour eux, au mieux, un souvenir d�enfance, plus ou moins vivant, selon le cas. Quant � la p�riode coloniale elle-m�me, elle rel�ve de la perception personnelle plus ou moins �labor�e, construite et int�rioris�e d�un r�cit historique national, tel que transmis par l��cole � le plus souvent �, la famille et la soci�t�. Toujours en 2015, si l�on consid�re l��ge m�dian de la population, en le fixant raisonnablement � 28 ans � l�actuel est de 27,6 ans � la moiti� de la population du pays sera n�e apr�s 1987 ; c�est-�-dire, de fait, apr�s la rupture, somme toute r�cente, repr�sent�e par les ��v�nements� d�octobre 1988. C�est donc dire combien la soci�t� alg�rienne contemporaine est, objectivement, de plus en plus �loign�e des r�alit�s coloniales et des luttes men�es par ses g�n�rations les plus �g�es pour en lib�rer le pays. De plus, cette donn�e importante qui rel�ve d�un constat banal est n�cessairement appel�e � autre �vidence � � gagner en pertinence au fur et � mesure que le temps passera. Ce qui vient d��tre dit pour 2015 sera encore beaucoup plus vrai pour 2030 � avec une population de l�ordre de 45 millions � lorsque deux si�cles nous s�pareront du choc colonial initial ; et, a fortiori, encore bien plus en 2050, quand le pays aura atteint le seuil symbolique de 50 millions d�habitants, avec toutes les cons�quences ais�ment pr�visibles pour ce qui concerne la cr�ation d�emplois qui actuellement d�j� est le d�fi majeur auquel le pays est confront� et qui le sera de plus en plus. Or, la quarantaine d�ann�es qui nous s�pare aujourd�hui de 2050, � l��chelle de la vie d�une nation, repr�sente tr�s peu de temps ; � titre indicatif, dans notre cas, en sens inverse, cela nous ram�nerait � 1971, ann�e marqu�e par la nationalisation des hydrocarbures. Dans un tel contexte, ce n�est qu�� la seule aune des v�ritables probl�mes que vit le pays, en int�grant surtout les perspectives et contraintes de long terme qui sont les siennes que doivent �tre formul�es les solutions dont il a besoin et qui toutes, d�une mani�re ou d�une autre, directement ou indirectement, doivent s�articuler autour des conditions � r�unir dans les meilleurs d�lais pour l��mergence et la consolidation d�une �conomie productive non renti�re, seule v�ritable garante de la p�rennit� de la soci�t� alg�rienne. Et c�est bien pourquoi, le d�bat politique actuel me semble � la fois n�cessaire et important, mais il comporte �galement un risque de d�calage par rapport aux probl�mes graves auxquels fait face le pays, s�il est r�duit � la seule dimension, certes incontournable, de r�vision de divers textes r�gissant la vie institutionnelle nationale. Avant d�aller plus loin et afin de dissiper tout malentendu, il est clair, de mon point de vue, que les pr�occupations port�es par les mouvements sociaux qui traversent le pays et centr�es sur des revendications visant des avanc�es concernant l�Etat de droit, les droits humains et les libert�s d�mocratiques sont pleinement l�gitimes et doivent aboutir. Ainsi le d�bat sur la r�vision de la Constitution, � propos duquel depuis quelque temps d�j� beaucoup d�id�es circulent, sous la forme de grands clivages relatifs � la n�cessit� ou non d�une nouvelle Assembl�e constituante ou bien encore d��changes de points de vue sur la modification et/ou l�introduction de telle ou telle disposition, est n�cessaire pour consacrer les avanc�es r�clam�es dans les domaines �voqu�s. A cet �gard, la plus importante d�entre elles serait certainement celle du retour � l�ancienne disposition limitant le nombre de mandats du pr�sident de la R�publique � deux qui marquerait la nette volont� de mettre fin � une grave r�gression, conduisant � une inacceptable d�rive patrimonialiste de l�institution pr�sidentielle. Toujours � propos de r�formes politiques, dans la mesure o� il est envisag� de modifier la loi sur les partis politiques, il est d�sormais grand temps, pr�s de 60 ans apr�s sa cr�ation, de rendre le Front de lib�ration nationale � la m�moire collective nationale, en le d�livrant des actuelles manipulations politiciennes, �troitement partisanes, et ce, en interdisant strictement l�utilisation du recours � l�appellation de FLN � tout parti politique ; d�cision qui n�a d�j� que trop tard� et aurait d� �tre prise d�s l�instauration du multipartisme en 1989. D�ailleurs, il convient d��tre conscient de l�existence dans la soci�t� d�un autre type de rente � historique � li� � l�instrumentalisation de plus en plus abusive du patrimoine commun qu�a constitu� la guerre de Lib�ration nationale et dont bien des acteurs politiques continuent d�user et d�abuser pour justifier leurs pratiques quotidiennes, dans un contexte de plus en plus objectivement �loign� de celui des origines fondatrices. Ceci dit, il est permis de se demander comment l�actuelle Constitution a pu en quoi que ce soit emp�cher la mise en �uvre d�une politique nationale de d�veloppement qui aurait r�ellement �uvr� pour r�duire la d�pendance du pays � l��gard de la rente ; il est bien �vident qu�en aucune fa�on elle ne constituait un obstacle. Et c�est pourquoi il est permis de douter de la contribution r�elle d�une modification de la Constitution et de divers autres textes l�gislatifs et r�glementaires � la prise en charge des v�ritables probl�mes du pays. Conditions n�cessaires, ces enjeux institutionnels sont bien loin de suffire et ce, d�autant que, depuis longtemps d�j�, l�exp�rience nationale prouve que les principaux probl�mes du pays ont, en r�gle g�n�rale, trouv� leur origine plus dans la fa�on dont les textes ont �t� appliqu�s � ou, le plus souvent, non appliqu�s � que dans celle dont ils ont �t� r�dig�s. La gravit� des probl�mes r�els que vit le pays et qui, s�ils ne sont pas s�rieusement pris en charge, en menacent � court terme la coh�sion et, � plus long terme, la survie, implique de rapidement quitter le seul domaine formel des textes, des apparences pour affronter des r�alit�s sociales complexes qui doivent �tre transform�es en profondeur. Aujourd�hui, c�est de cette capacit� � agir effectivement sur la soci�t� tout en s�adaptant tout aussi effectivement � et intelligemment � aux �volutions du monde que d�pend l�avenir du pays. Les v�ritables questions que nous devons nous poser doivent porter � bien plus que sur les textes eux-m�mes, certainement toujours perfectibles � sur les raison de l�inefficience de notre syst�me de �prise de d�cision de groupe� pour reprendre les termes de Jared Diamond. Certes, le pays a besoin d�une nouvelle Constitution symbolisant, comme d�j� dit, toutes les avanc�es possibles en faveur de l��tat de droit, des droits humains et des libert�s d�mocratiques. Mais il a certainement tout autant besoin d�un �nouveau contrat social� consacrant de mani�re d�finitive, dans une d�marche concomitante et coordonn�e, d�une part, la r�duction progressive de sa d�pendance par rapport � la rente li�e � la valorisation sur le march� mondial des hydrocarbures et, de l�autre, une centralit� croissante du travail � physique et intellectuel � comme source dominante de cr�ation de la richesse nationale. Le plus rapidement possible, la soci�t� alg�rienne, dans un v�ritable sursaut de d�sintoxication, doit sortir d�un mod�le rentier sans perspective, d�j� � bout de souffle et amor�ant une spirale r�gressive extr�mement dangereuse. Sortir notamment de tout ce qu�il implique en termes de normes et de valeurs, en repla�ant au c�ur de sa probl�matique les dynamiques d�une intelligence collective ouverte sur le monde et � la hauteur de ses exigences, valorisant prioritairement des logiques fond�es sur le m�rite, en fonction de la contribution effective de chacun. En tout �tat de cause, l�exploitation des hydrocarbures qui, bien ma�tris�e, se poursuivra ne doit plus �tre consid�r�e comme une fin en soi, une activit� banale de production de biens contribuant positivement � la croissance �conomique ; cette illusion d�vastatrice n�a caus� que trop de dommages graves � la soci�t� alg�rienne. En fait, dans une d�marche concert�e de ma�trise collective des processus de r�formes � entreprendre, le pays a urgemment besoin d�un �pacte national de progr�s d�mocratique, �conomique et social�. Il sera fondamentalement bas� sur des perspectives clairement d�finies de sortie combin�e, � la fois, de l�autoritarisme et de l��conomie renti�re � les deux processus, pleinement compl�mentaires, se soutenant et s�enrichissant mutuellement � qui en constitueraient l�ossature centrale. Ainsi con�u, il unirait dans une action n�cessairement de long terme, de mani�re tout autant symbolique que, surtout, op�rationnelle, les partenaires politiques et sociaux et toutes les forces vives du pays, leur permettant d�exprimer et de mettre en �uvre leurs potentiels de cr�ativit�. Alors, faisons de telle sorte que le d�bat national actuel ne se perde pas dans de nouvelles et interminables �discussions byzantines� sans aborder effectivement les v�ritables probl�mes du pays, ceux qui, aujourd�hui d�j�, commencent � en hypoth�quer l�avenir. Prenons garde que l�arbre des divers textes � Constitution comprise � ne nous cache la for�t des v�ritables probl�mes � effectivement prendre en charge, � commencer par celui de la rente, insidieux �cancer� qui, chaque jour un peu plus, ronge toute la soci�t�. N. S.