�Les h�ros ne meurent jamais.� C�est l�une des formules trouv�es par les id�ologues pour ins�rer des rep�res identitaires dans la conscience collective et pour rapprocher les citoyens de la R�publique. Chez nous, nos h�ros continuent � interpeller les consciences contre l�oubli, les d�rives et l�ingratitude. C�est, pourrait-on dire, le cas du colonel Si M�hamed Bougara, chef de la Wilaya IV historique (1957/1959). Le 5 mai 1959 disparaissait, dans des conditions non �lucid�es � ce jour, le colonel Ahmed Bougara, dit Si M�hamed, � l��ge de 31 ans. Il est n�, selon l�acte de naissance num�ro 211, �tabli par la mairie d�Affreville, actuellement Khemis-Miliana, le 20 d�cembre 1928, � la rue du Maroc, dans la municipalit� indiqu�e plus haut. Le chef politico-militaire de la Wilaya IV du FLN/ALN est port� disparu puisque ni ses anciens compagnons ni sa famille ne savent � ce jour le sort r�serv� � sa d�pouille. Ils ne savent pas non plus s�il a �t� captur� vivant lors de la bataille du douar Ouled Bouachera, dans le sud de la wilaya de M�d�a. La R�publique n�est toujours pas en possession de la d�pouille de ce grand chef de la Wilaya IV, l�une des plus importantes de la guerre de Lib�ration, pour laquelle il a sacrifi� sa vie. Quelques brides de l�histoire de la guerre de Lib�ration ou plut�t les dires de ses quelques compagnons rest�s vivant apr�s 1962 ou ceux toujours en vie indiquent que le martyr a �t� soit captur� (bless� ou sain et sauf) par l�arm�e fran�aise lors d�une grande bataille qui a eu lieu le 5 mai 1959, soit tomb� au champ d�honneur les armes � la main et que l�arm�e coloniale a s�questr� sa d�pouille. Mis � part une tentative du colonel Si Hassan, dernier responsable � occuper le poste de chef de la Wilaya IV, qui a r�clam� la d�pouille de ce h�ros national au pr�sident Jacques Chirac lors de sa venue dans notre pays, personne n�a not� l�inqui�tude du gouvernement alg�rien pour savoir ce qu�est advenu ce g�ant de l�Ouarsenis. Quant � l�ONM (Organisation nationale des moudjahidines), on ne l�entend quasiment jamais �voquer la disparition de Bougara. Le parcours de ce militant du PPA/MTLD et de Organisation sp�ciale (l�OS), les prises de positions politico-id�ologiques du chef de maquis, la m�sentente, connue au demeurant, avec les responsables politico-militaires de la Wilaya V au sujet de leur absence sur le terrain du combat et les probl�mes de transit des armes venant de l�Ouest ont-ils �t� les raisons de cette marginalisation ? Il est �vident que certains ont peur de l�Histoire, celle faite de souffrance et de larmes. Pour aggraver son cas, ce fils d�un technicien des PTT, Bougara Larbi, venu dans les ann�es 20 de la r�gion des Ath Yala, dans les montagnes de la Petite- Kabylie, s��tablir sur les hauteurs du Zaccar, s�entendait, au grand dam de certains, tr�s bien avec un autre grand chef militaire, le colonel Amirouche, chef de la Wilaya III, limitrophe par l�est de la Wilaya IV. Personne n�ignorait, en outre, ce que pensaient ces deux colonels de certaines structures centrales de la R�volution et les personnages obscures qui gravitaient autour de ces instances attendant l�heure de la prise de pouvoir. Rappelons, par ailleurs, que Bougara faisait partie, en tant que premier chef de la Wilaya IV du groupe des colonels qui se sont r�unis en d�cembre 1958 pour d�noncer des m�faits constat�s au sein de la direction centrale de la R�volution. On sait comment sont morts certains d�entre eux. Myst�re et silence Les successeurs du colonel Bougara ont �t� intrigu�s par la disparition de leur chef. Cette disparition survient bizarrement � la suite d�un ratissage durant lequel le g�n�ral Challe avait engag� un immense arsenal militaire, y compris l�aviation, sp�cialement � Ouled Bouachera et ce jour-l�, c�est-�-dire au 38e jour de la mort des colonels Si Amirouche et Si El-Hou�s, respectivement chefs des Wilayas III et VI. Ceux qui avaient planifi� cet acte et �ventuellement leurs complices ont r�ussi � cr�er un climat de grand malaise dans les rangs des moudjahiddine de la Wilaya IV. Dans une lettre dat�e du 1er novembre 1959, le commandant Si Lakhdar assimile cette disparition � une temp�te. �La disparition du colonel Si M�hamed, au sens propre et figur�, car son corps ne fut pas retrouv�, fut un coup rude pour l��tat-major de la Wilaya, dont il repr�sentait l��l�ment d��quilibre, celui qui se conformait le plus aux principes d��quit�, de sagesse. Sa perte, en ces temps de troubles, ne fut pas connue par les djounoud. Un myst�re plane.� Le r�dacteur de cette lettre avouait que le myst�re restait entier. En effet, � l�issue de la bataille du 5 mai, des djounoud retourn�rent sur les lieux de la bataille. Ils enterrent leurs compagnons morts mais nulle trace du corps de leur chef. Dans sa lettre, Si Lakhdar affirma que �toutes les hypoth�ses s��chafaudaient. On pensait m�me que des hommes impliqu�s dans le complot et vis�s par l��puration �taient les auteurs de sa mort�. L�hypoth�se de l�emprisonnement par les troupes fran�aises a �t� �galement �voqu�e par ce responsable dans la hi�rarchie militaire de la Wilaya IV.