Nécessité de renforcer la coopération entre les Etats membres et d'intensifier le soutien pour atteindre les objectifs    La réunion consacrée aux exportations présidée par le président de la République "importante et fructueuse"    Ligue 1 Mobilis: le CS Constantine bat l'USM Alger (1-0) et prend la tête du classement    Timimoun : commémoration du 67è anniversaire de la bataille de Hassi-Ghambou dans le Grand erg occidental    Accidents de la circulation en zones urbaines: 11 morts et 418 blessés en une semaine    Entrée prochaine de la première startup à la Bourse d'Alger    Le ministre de la Santé met en avant les progrès accomplis par l'Algérie dans la lutte contre la résistance aux antimicrobiens    Le Conseil de la nation prend part à Montréal à la 70e session de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN    Touggourt : une quinzaine de participants à l'exposition de dattes à Témacine    La CPI émet des mandats d'arrêt contre Netanyahu et son ancien "ministre" de la Défense    Khenchela: 175 foyers de la commune d'El Mahmal raccordés au réseau du gaz naturel    Le Général d'Armée Chanegriha préside la cérémonie d'installation officielle du Commandant de la 3ème Région militaire    Meilleur arbitre du monde 2024: l'Algérien Mustapha Ghorbal nominé    Une action en justice intentée contre l'écrivain Kamel Daoud    Le recteur de Djamaâ El-Djazaïr reçoit le recteur de l'Université russe du Caucase du Nord    Attaf reçoit l'envoyé spécial du président de la République fédérale de Somalie    Foot féminin: maintenir la dynamique du travail effectué pour bien préparer la CAN-2025    Palestine: des dizaines de colons sionistes prennent d'assaut l'esplanade de la mosquée Al-Aqsa    La liste des présents se complète    Combat de la spécialité muay thai : victoire de l'Algérien Mohamed Younes Rabah    Ouassa Younes et Aribi Karim suspendus deux matchs    Poutine a approuvé la doctrine nucléaire actualisée de la Russie    L'entité sioniste «commet un génocide» à Ghaza    Liban : L'Italie dénonce une nouvelle attaque «intolérable» de l'entité sioniste contre la Finul    Un nourrisson fait une chute mortelle à Oued Rhiou    Sonatrach s'engage à planter 45 millions d'arbres fruitiers rustiques    Campagne de sensibilisation au profit des élèves de la direction de l'environnement de Sidi Ali    Sonatrach examine les opportunités de coopération algéro-allemande    Semaine internationale de l'entrepreneuriat    La 3e édition du salon «Algeria WoodTech», prévue du 23 au 26 novembre    Il y a 70 ans, Badji Mokhtar tombait au champ d'honneur    L'irrésistible tentation de la «carotte-hameçon» fixée au bout de la langue perche de la Francophonie (III)    La femme algérienne est libre et épanouie    Les ministres nommés ont pris leurs fonctions    «Dynamiser les investissements pour un développement global»    Le point de départ d'une nouvelle étape    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



T�moignage
Pourquoi et comment le colonel Chaabani a �t� ex�cut� ?
Publié dans Le Soir d'Algérie le 21 - 02 - 2012

Mohamed Chaabani a �t� supplici�s � l�heure des clart�s incertaines du petit jour. Il a regard� sans trembler les visages impavides des ex�cuteurs commis � ses fins derni�res. Pour lui et pour les autres qui ont �t� supplici�s seuls, dans le noir des cachots, je d�die ces lignes.�
M. C.
Mahdi Cherif, dans cette contribution � l��criture de l�histoire, va, une fois de plus, au fond des choses. L�ex�cution du jeune colonel Mohamed Chaabani apr�s une parodie de proc�s, sur ordre de Ben Bella, a d�j� fait couler beaucoup d�encre. Mahdi Ch�rif, t�moin et acteur privil�gi� des �v�nements qui se sont d�roul�s juste apr�s l�ind�pendance de l�Alg�rie, �voque cet �pisode tragique qui a marqu� la m�moire de toute une g�n�ration. En d�m�lant l��cheveau compliqu� des actes, et des raisons cach�es, des principaux protagonistes qui ont jou� un r�le d�terminant dans la dynamique qui a conduit le chef de la Wilaya VI devant le peloton d�ex�cution, il casse des tabous solides. Lorsqu�il �voque Ahmed Bencherif, ancien chef de la Gendarmerie nationale, son analyse est d�une grande s�v�rit�. Il pr�cise cependant, � nous le citons � : �A aucun moment, je ne fais la confusion entre l�homme et l�institution. La Gendarmerie nationale, corps d��lite, corps de s�curit� prestigieux de la R�publique, a fait son devoir dans les moments les plus tragiques de l�histoire r�cente de l�Alg�rie. Des hommes de courage et de conviction, officiers de la Gendarmerie nationale, ont su dire �halte !� aux d�rives et �non !� aux ukases quand Ahmed Bencherif consid�rait la gendarmerie comme un legs parental et que ses ordres contrevenaient au droit ou lorsqu�ils heurtaient leur conscience. Ils furent nombreux : Youssef Bensid, Mokrane A�t Mahdi, Lakhdar Belhadj ou encore Mohamed Touati pour ne citer que les plus connus. Le grand bourreau a d� faire appel � d�autres, proches de sa personne ceux-l�, pour sa carri�re macabre de croque-cadavres. En exhumant de l�oubli la personnalit� attachante de Mohamed Chaabani et en essayant de rendre leur juste d� � ceux qui ont jou� un r�le dans sa condamnation � mort, j�ai voulu absoudre mon �me du p�ch� de silence pour rentrer, quand l�heure sera venue, l��me en paix dans la paix du seigneur.�
R. N.
Le colonel Mohamed Chaabane dit �Chaabani� est, en 1962, le plus jeune colonel de l�ALN. Il est n� le 4 septembre I934, � Oum�che (Biskra). Successeur du colonel Ahmed Benabderrazak, dit Si El Haou�s, tomb� face � l�ennemi le 29 mars 1959 � Djebel Thameur, pr�s de Boussada, il est le chef de la Wilaya VI (Sahara) pendant les trois derni�res ann�es de la guerre de Lib�ration. Il n�a jamais voulu, sans doute par modestie naturelle, arborer l�insigne du grade de colonel que lui conf�re le GPRA en I961. Le jeune chef de la Wilaya VI paye le prix de son implication dans les concurrences qui font rage au sein du gotha politique qui s�accapare du pouvoir au lendemain de l�ind�pendance. La p�riode du 19 mars 1962 � septembre 1964, date de son ex�cution, est riche en man�uvres de toutes sortes o� le chef de la Wilaya VI est entra�n�, quelquefois malgr� lui. Alli� sinc�re et d�termin� de Ben Bella, lors de la course vers Alger, au lendemain de l�ind�pendance, il se heurte � ce dernier qui a sa propre vision sur le pouvoir, sur la fa�on de le conqu�rir, comment l�exercer et avec quels hommes l�exercer. Tr�s vite, les heurts des ambitions et les calculs des uns et des autres cr�ent une situation telle que chacun des responsables au sommet de l�Etat recherche des alliances parmi les chefs de Wilaya encore dans l�ANP, pour conforter sa position. Le jeune colonel ne sut pas rester � l��cart de l�imbroglio alg�rois qui se complique constamment. Houari Boumedi�ne ne peut envisager son action � la t�te du minist�re de la D�fense nationale sans le d�part obtenu, d�une fa�on ou d�une autre, de tous ceux qui ne rentrent pas dans le moule de l�ob�issance telle que codifi�e par lui. Il s�attaque d�abord � ceux qui se sont ligu�s contre l�EMG, apr�s la r�union inachev�e du CNRA et qui ont tent� de lui barrer la route, par les armes, en juillet-ao�t 1962 : Moh Ou El Hadj, Salah Boubnider et Hassen Khatib, puis aux autres qui lui rappellent, trop souvent � son gr�, qu�il leur doit sa deuxi�me carri�re. Le colonel Zbiri, chef de la Wilaya de l�Aur�s est fourvoy� rapidement dans une mission qui ressemble � une antichambre de mise � la retraite, la direction de l�Acad�mie de Cherchell. Chaabani, qui est l�objet de sollicitations nombreuses et int�ress�es de la part de Ben Bella et de Khider, pose un vrai probl�me � Boumedi�ne. Le chef de la Wilaya VI ne veut � aucun prix quitter son commandement � Biskra. Il ne veut pas entendre parler de l�affectation en Wilaya VI des officiers d�sign�s par Abdelkader Chabou, officier issu de l�arm�e fran�aise, qui devient apr�s l�ind�pendance le plus proche collaborateur du ministre de la D�fense. Fort du pr�jug� favorable dont il b�n�ficie aupr�s du pr�sident de la R�publique et de Mohamed Khider, Chaabani entre en conflit ouvert avec Houari Boumedi�ne. Ses griefs sont d�abord r�duits � un seul objet, puis la confrontation devenant ouverte, ils s��largissent et prennent de l�ampleur. Le premier objet de la col�re de Chaabani est la place de plus en plus pr�pond�rante, au sein du commandement de l�arm�e, des plus en vue parmi ceux qui sont venus s�int�grer � l�ALN pendant la guerre de Lib�ration. Ils sont accus�s par lui de viser, par un entrisme envahissant, tous les postes de d�cision au sein de l�ANP. Le deuxi�me congr�s du FLN, qui se d�roule dans la salle du cin�ma Afrique en avril 1964, � Alger, est pour lui l�occasion de dire tout �le bien� qu�il pense de ce parti-pris de Houari Boumedi�ne pour les quatre ou cinq officiers alg�riens qui ont fait leurs classes en Indochine, en Allemagne ou tout simplement dans les �coles de guerre fran�aises. Il voue � Chabou, � Zerguini, � Hoffman, � Boutella et surtout � Ahmed Bencherif, une m�fiance tenace. Il change cependant son jugement quand il �voque les jeunes gens qui, fuyant les casernes fran�aises, ont rejoint l�ALN pendant la guerre de Lib�ration nationale. Il n�ignore pas que ce n�est pas Houari Boumedi�ne qui les a accueillis � bras ouverts, mais bel et bien un des g�niteurs de la r�volution � et quel g�niteur ! � puisqu�il s�agit de Krim Belkacem. A Boumedi�ne qui interroge : �qu�est-ce qui est pr�f�rable, r�organiser l�arm�e avec des Alg�riens ou faire appel � des �trangers ?� Il r�torque qu�il ne vise pas ceux qui ont command�, dans les moments les plus forts de la guerre, des unit�s engag�es chaque jour contre les forces fran�aises et tout en rendant hommage aux dizaines de �DAF� morts les armes � la main aux c�t�s de leur fr�res moudjahidine. Il pr�cise : �Je vise la demi-douzaine de mercenaires qui se �cachent� derri�re Boumedi�ne, qui ont les mains libres pour tout se permettre au sein de l�ANP.� Il dit craindre que, profitant de sa position, Chabou ne soit tent�, un jour ou l�autre, par une op�ration �d�aimantage� pour attirer ceux qui ont eu le m�me parcours que le sien pour constituer une force avec laquelle il faudra compter. Sa pr�vention � l��gard de Chabou et de son entourage (�ils travaillent pour la France�) b�tie sur des jugements de valeur subjectifs, beaucoup plus que sur des �l�ments de preuves irr�futables, d�montre que le jeune chef de la Wilaya VI est � la recherche de pi�ces �rapport�es� � introduire dans son dossier et qu�il se saisit du grief �popularis� par les comp�titeurs de ces soldats de carri�re qui affirment n�avoir d�autre ambition que celle de servir l�arm�e de leur pays. Cette obsession de �la main de l��tranger� aura la vie longue. Chadli Bendjedid, le 27 novembre 2008, � Tarf, lors du colloque consacr� au cr�ateur de la Base de l�Est, Amara Bouglez, reprendra � son compte la fable de l�infiltration de la r�volution par �la promotion Lacoste�. Dans son d�sir de r�gler ses comptes avec Khaled Nezzar, qu�il cite nomm�ment, l�homme qui l�a emp�ch� de brader l�Alg�rie pour un demi-mandat, il prononce des mots d�une extr�me gravit� : �Sentant la fin de leur pr�sence sur notre sol, les Fran�ais ont pr�par� leur suppl�tifs� � L�avenir � trois d�cennies plus tard � d�montrera que cette crainte de certains maquisards, sinc�re chez Chaabani, ob�issant aux circonstances chez d�autres, de voir l�Alg�rie retomber dans l�escarcelle des Fran�ais � l�issue du �complot� ourdi par de Gaulle et muri sur le long terme, se r�v�lera infond�e. Ce sera, pour l�essentiel, les anciens �l�ves des �coles de guerre d�outre-M�diterran�e et les d�serteurs des casernes fran�aises, trop longtemps victimes de jugements injustes et outranciers, qui, devenus chefs de l�ANP, barreront la route � l�int�grisme et sauveront la R�publique. Chaabani, outre son opinion bien arr�t�e sur la poign�e de collaborateurs imm�diats de Houari Boumedi�ne, est anim� par une forte pr�vention contre les rejetons des grands notables. Il refuse de voir leurs enfants jouer des r�les pr�pond�rants dans l�Alg�rie post-ind�pendance. On constate, � l�analyse de cette conclusion chaabanienne, la survivance d�une frustration ancienne quand les r�alit�s sahariennes du temps des bureaux arabes, lorsque les grandes familles de Biskra ou de Touggourt, distingu�es et choy�es par les g�n�raux de l�arm�e d�Afrique, �taient l�interface stipendi�e de l�administration militaire fran�aise en charge du Sud alg�rien. Dans l�esprit du jeune colonel, aucun doute ne peut subsister quand � la qualit� �d�agents de la France� de Bencherif ou de Chabou. Ce dernier est fils d�un officier sup�rieur spahis, longtemps casern� � Batna. On ne peut comprendre le sentiment de col�re du successeur de Ahmed Ben Abderrazak devant les faits accomplis de Houari Boumedi�ne si on ne tient pas compte de l�habitus du groupe social o� sa prime adolescence s�est accomplie, domin�e par l�hagiographie chant�e sur tous les tons par les valets des grands guennours et des porteurs de burnous d�apparat. On ne peut comprendre l�indignation du successeur de si El Haou�s de voir Ahmed Bencherif � la t�te de la Gendarmerie nationale, si on oublie qu�il nourrit de graves soup�ons sur l�implication du beau-p�re de Bencherif � le bachagha Ahmed Lahr�che en personne � dans le renseignement obtenu par l�arm�e fran�aise sur la pr�sence dans la r�gion du Djebel Thameur, en mars 1959, des colonels Amirouche et si El Haou�s. On ne peut comprendre le sentiment qui pousse Chaabani � la r�volte si on oublie que, pour toute une g�n�ration de maquisards, la r�volution o� ils se sont jet�s corps et �me est �galement une revanche sociale. Elle a chamboul�, de fond en comble, l��chelle des valeurs admises, cass� des certitudes et attir� au-devant de la sc�ne le petit, le laiss�pour- compte, pour en faire l�auteur d�une nouvelle Histoire. Le fils du pauvre, promu par ses sacrifices, au moment o� il pense que l��re des �sidis� est d�finitivement r�volue, voil� qu�il se retrouve face au fils du ma�tre d�hier. Houari Boumedi�ne plaide sans �tat d��me l�efficacit�. Chaabani d�fend avec toute son �me la morale. L�association Boumedi�ne-Bencherif le r�volte. Bencherif, fils de grande tente, ancien sergent de l�arm�e fran�aise, naturalis� fran�ais en 1948, engag� volontaire pour l�Indochine o� il combat de 1949 � 1952, d�serte l�arm�e fran�aise au d�but de la guerre d�Alg�rie, apr�s avoir mis � sac le camp militaire o� il est affect�. Promu officier-instructeur en Wilaya IV, il est envoy� en Tunisie � cause de ses brutalit�s envers les civils et apr�s que, de son propre chef, il tue, � larme blanche, � l�insu du colonel si Mhamed, des dizaines de prisonniers kobussistes confi�s � sa garde. D�sormais commandant et collaborateur de Krim, il est charg� d�ex�cuter les colonels Lamouri, Nouaoura et Aouchria, ainsi que le commandant Mostepha Lakhal, condamn�s � mort par Houari Boumedi�ne, pr�sident du tribunal devant lequel ils comparent en 1959. Ces moudjahidine sont �trangl�s de sa propre main. Il utilise pour les mettre � mort un fil de fer qu�il passe autour de leur cou et qu�il serre jusqu�� la mort, alors qu�il dispose d�une arme � feu munie d�un silencieux. Le colonel Mohamed Aouchria r�ussit � �chapper � ses gardiens. Il court vers le mur
d�enceinte. Bencherif le rattrape. Il lui administre une terrible correction. Il le tra�ne vers l�endroit o� gisent les cadavres de Lamouri et de Ahmed Nouaoura et il lui fait subir le m�me sort. Les corps des moudjahidine supplici�s d�aussi atroce mani�re, par pure sadisme, sont jet�s par lui dans une fosse � peine ouverte. �Les chiens s�en chargeront !� est l�oraison fun�bre de leur bourreau. Si t�t Bencherif ayant quitt� les lieux, le commandant du camp entreprend de donner une s�pulture d�cente aux officiers martyrs. Bencherif, connaissant d�sormais le chemin qui m�ne � la prison de Denden, s�y rend sans �tre mandat� par personne et sans en r�f�rer � Abdelmadjid Rafa, le juge d�instruction qui a la haute main sur les p�nitenciers du GPRA. Au cours d�une de ses incursions inopin�es, il prend � partie et torture des prisonniers. Saouli Mohamed, ancien normalien, d�tenu � Denden, en conservera des s�quelles � vie. Le sulfureux Bencherif, renvoy� en Alg�rie par Krim en 1960, est bless� au cours d�un combat dans la r�gion de Sour El Ghozlane, tandis que le capitaine Fellah, son compagnon, r�siste jusqu�� la mort, lui, il l�ve les bras, se fait reconna�tre et se rend aux forces fran�aises. Il est transf�r� � Paris sur d�cision d�Edmond Michelet, ministre de la Justice du g�n�ral de Gaulle. Son transfert est obtenu par son beau-p�re et oncle, qui avait mobilis� ses amis, entre autres les Chicheportiche, Isra�lites connus � Djelfa et � Boussa�da, qui ont beaucoup d�entregent, et Jacques Chevalier, homme politique alg�rois, bien introduit au Gouvernement g�n�ral. Ces personnalit�s font valoir l�int�r�t d�utiliser Bencherif dans la strat�gie anti-FLN. Alors que le GPRA lance une grande campagne m�diatique et diplomatique pour lui sauver la vie, Bencherif joue le jeu des Fran�ais. (N�est pas Larbi Ben M�hidi qui veut !) Chaabani est r�volt� de voir l�homme qui somme Ferhat Abb�s, le 10 octobre 1960, de reprendre les n�gociations avec la France, au risque de voir la Wilaya 4 accepter une paix s�par�e avec l�arm�e fran�aise, �tre en charge d�un corps de s�curit� prestigieux de l�Alg�rie ind�pendante. Chaabani affirme que c�est le m�me Bencherif qui a jou� � l�entremetteur entre les responsables de la Wilaya IV et Charles de Gaulle. Ces contacts sont, bien s�r, destin�s � remettre en cause la coh�sion de l�ALN autour du GPRA. Gilles Meynier, dans son livre intitul� : Histoire int�rieure du FLN, 1954-1962,page 566, �voque les p�rip�ties du s�jour parisien de Ahmed Bencherif, grand �trangleur de moudjahidine devant l�Eternel et futur receleur de cadavres de colonels de l�ALN, morts au combat. La sc�ne politique alg�roise est de plus en plus en �bullition du fait de la gouvernance de Ben Bella. Fin 1963, Mohamed Khider commence � prendre ses distances avec Ben Bella qui devient dangereusement boulimique. Mohamed Khider est originaire de Biskra. Dans son souci de se concilier les bonnes gr�ces du chef de la Wilaya VI, il joue avec succ�s la carte de l�affinit� r�gionale. L�officier indign� et le politique d��u se rejoignent. Khider est d�j� � la p�riph�rie du pouvoir, mais il est encore influent. Il sugg�re la nomination de Chaabani au poste de chef d��tat- major. Chaabani r�torque qu�il serait souhaitable de r�unir les chefs des wilayas historiques afin de les faire participer � la d�signation du chef d��tat-major. Il ajoute que, dans le cas o� cette d�marche ne conviendrait pas, on pouvait toujours d�signer le plus �g� d�entre les colonels, en l�occurrence Moh Oul Hadj. Houari Boumedi�ne, craignant que, par l�entremise de Moh Oul Hadj, certains anciens du GPRA, tel Belkacem Krim, ne reviennent au pouvoir, s�oppose avec toute sa force de persuasion � la proposition de Chaabani, arguant que le poste doit revenir au chef de la Wilaya de l�Aur�s, le plus l�gitime � l�occuper. C�est ainsi que le colonel Tahar Zbiri est nomm� chef d��tat-major. Mohamed Chaabani, le colonel Abb�s et le commandant Abderrahmane Bensalem sont ses adjoints. Le d�cret n�64/88 du 4 mars 1964, paru dans le Journal officiel du 6 mars 1964, pr�cise la composition de l��tat-major g�n�ral de l�ANP ainsi que ses pr�rogatives, cr�� sur proposition du ministre de la D�fense nationale et non pas comme, on a pu l��crire ici et l�, sur d�cision unilat�rale de Ben Bella pendant un voyage � Moscou de Houari Boumedi�ne. Quelque temps plus tard, au gr� des fluctuations de ses rapports avec Ben Bella, Khider propose de nommer Chaabani ministre de la D�fense nationale. Pendant quelques semaines, l�id�e de devenir ministre de la D�fense nationale emballe Mohamed Chaabani. Il s�agite, prend des contacts, d�montre par son attitude que ce qui n�est encore qu�une vague configuration est d�j� acquis. A la villa Jolly, o� il croise Houari Boumedi�ne, le ton monte. Les deux hommes �changent des regards assassins. La tension entre les deux colonels est � son comble. Beaucoup de responsables militaires dont les colonels Tahar Zbiri, Abb�s et le commandant Sa�d Abid, essayent de faire revenir Chaabani � de meilleurs sentiments. Le colonel Tahar Zbiri fait � trois reprises le voyage de Biskra � je l�accompagne � chaque fois � pour tenter de convaincre le chef de la Wilaya VI de patienter et de parier sur une in�luctable d�cantation politique, plut�t que de tenter de la forcer dans les plus mauvaises conditions. Peine perdue ! Chaabani qui n�a que paroles de m�pris � l��gard �du planqu� de Ghardiamou� ne s�embarrasse pas de pr�cautions oratoires pour dire le fond de sa pens�e. Il d�nie � ce dernier la l�gitimit� de faire de l�arm�e son marchepied et de la restructurer � sa guise. Selon lui, la l�gitimit� � �tre le chef de l�ANP, Boumedi�ne l�a perdue le jour m�me o� il a fait ouvrir le feu sur les moudjahidine des Wilayas III et IV. Il ne s�arr�te pas � l�objection que lui aussi a �t� pr�sent sur le champ de bataille, du c�t� de M�d�a, en juillet 1962. Il argue : �Etre ministre de la D�fense, dans un gouvernement de Ben Bella, ne fait pas de lui (Boumedi�ne) une ic�ne � adorer derri�re une vitrine, mais un homme politique dont on peut critiquer l�action. Le jeune colonel, comme beaucoup d�autres avant lui, et bien d�autres apr�s lui, n�a jamais mesur� jusqu�� quel point Houari Boumedi�ne tient au pouvoir et jusqu�� quel point il est convaincu que pour le conqu�rir enti�rement et le garder jusqu�au dernier souffle de sa vie, il lui faut �tre le ma�tre absolu de l�arm�e. Cette m�connaissance du ressort profond qui fait agir Boumedi�ne causera la perte de son comp�titeur. L�exp�dition militaire contre la Wilaya VI est d�sormais sur la table de dessin de Abdelkader Chabou. Il est int�ressant de voir comment l�acc�l�ration de la dynamique de l�in�luctable �preuve de force est r�alis�e par Chabou. Lorsque toutes les parades sont en place, Chabou va pr�cipiter le moment de v�rit�, d�abord par des tentatives � peine discr�tes, sign�es Bencherif, pour circonvenir certains des cadres de la Wilaya VI et les inciter � la r�bellion. Ces man�uvres du chef de la Gendarmerie nationale mettent � vif les nerfs de Chaabani. L�incident de l�h�licopt�re fait partie du traitement � base d�aiguillons psychologiques destin� � faire monter son ire. Chaabani, d�sireux de se rendre � Biskra par la voie des airs, demande qu�il soit mis � sa disposition un h�licopt�re. Il essuie un refus, au pr�texte d�une indisponibilit� de �ventilos�. Chaabani prend la route au volant de sa Fiat 2300. Arriv� � destination, il voit un MI 04 �voluer au-dessus de l�a�rodrome de Chetma (Biskra). L�h�licopt�re atterrit. Mohamed Boutella en descend, tout sourire� Ben Bella, devant le forcing du ministre de la D�fense qui veut r�aliser la restructuration de l�arm�e et par l� m�me �liminer les derni�res figures de proue du �wilayisme�, nomme Chaabani membre du bureau politique pour conforter sa position face � celui qui veut l��liminer. La lune de miel entre le pr�sident de la R�publique et Mohamed Chaabani ne dure pas longtemps. Le changement intervint insidieusement, au gr� des humeurs fantasques de l�un et des humeurs chagrines de l�autre. Les �v�nements de Kabylie, quand A�t Ahmed s�engage dans l�opposition arm�e, viennent d�montrer � Ben Bella que Mohamed Chaabani ne sera jamais un instrument docile entre ses mains. Le chef de la Wilaya VI refuse de s�impliquer militairement contre le FFS. �On m�a eu une fois. On ne m�aura pas une deuxi�me fois� est sa r�ponse invariable � Ben Bella qui le presse d�envoyer des unit�s en Kabylie pour en d�coudre avec les partisans d�A�t Ahmed. Puis les choses s�acc�l�r�rent avec, tour � tour, la dissolution de �Djemiat al oulama du Cheikh Abdelhamid Ben Badis� puis avec le placement en r�sidence surveill�e du Cheikh Bachir El Ibrahimi. Mohamed Chaabani, qui a �t� le disciple du cheikh Ben Badis, et avec lequel il partage les m�mes valeurs spirituelles, est choqu� par une mesure que rien ne justifie. Peut-�tre Hamad�che, le B�ria du r�gime, a-t-il attribu� au v�n�rable cheikh un tract qui circule sous le manteau et qui d�nonce les professions de foi pro-sovi�tiques de Ben Bella. Le pr�sident, gris� par les hurlements des foules, imprime un autre rythme � sa d�marche pachydermique. Le fracas de la porcelaine bris�e devient un bruit de fond quotidien. La politique du �45 fillette � n��pargne ni les historiques, ni ceux qui le sont moins, ni ceux qui ne le sont pas du tout. Mohamed Chaabani exprime avec force son indignation devant le m�pris affich� par Ben Bella � l��gard de Boudiaf, de Khider, d�A�t Ahmed, de Krim, de Boussouf, de Bentobbal, de Ferhat Abb�s et des autres personnalit�s historiques. Il proteste devant l�activisme des hommes du commissaire Hammad�che qui remplissent les prisons et les camps. A la veille du 19 juin, date du renversement de Ben Bella, il y a 3 000 prisonniers d�opinion dans les prisons benbellienes. Tous ceux qui osent exprimer leur rejet d�une politique chaotique sont passibles d�une lettre de cachet. Un exemple de la parano�a qui s�est empar�e de Ben Bella est
l�enl�vement de Hadi Khediri en pleine rue et son emprisonnement � Lamb�se pendant un an sans qu�aucune accusation lui soit signifi�e. Le futur DGSN est arr�t� sur un simple soup�on. De la m�me fa�on est trait� Ahmed Taleb El Ibrahimi qui se retrouve � Sidi El Haouari sans jamais savoir pourquoi. Chaabani s�indigne des ex�cutions capitales d�opposants politiques qui se suivent � un rythme terrifiant et qui sont tenues secr�tes. Du 11 juillet au 3 septembre 1964, Ben Bella fait ex�cuter 8 opposants, tandis que ses services pr�parent les proc�s de plusieurs dizaines d�autres prisonniers d�opinion. Le pr�sident Chadli Bendjedid charge, au d�but des ann�es 1980, Abdelkrim Guehairia, officier de l�ALN et de l�ANP, cadre au minist�re des Moudjahidine, de faire exhumer les corps des supplici�s qui sont enterr�s au Carr� des martyrs. (Bendjedid leur d�cernera, � titre posthume, les plus hautes distinctions honorifiques de l�Etat). Les critiques de plus en plus s�v�res de Chaabani finissent par le rendre persona non grata au troisi�me �tage de la villa Jolly. L�heure attendue patiemment par Houari Boumedi�ne vient enfin de sonner... Pour s�parer Chaabani de ses hommes, Ben Bella somme le chef d��tat-major adjoint de rejoindre son poste. Ce dernier refuse et se retrancher au milieu de ses unit�s. Le ton monte entre les deux hommes. Les insultes fusent des deux c�t�s. �Tu n�es qu�un politicien cynique� est la r�ponse que vaut � Ben Bella sa d�cision (d�cret du 4 mars 1964) qui met fin � la qualit� de membre de l��tat-major de Chaabani. Un autre d�cret, sign� le 2 juillet I964, le casse de son grade de colonel. Au plus fort de la crise, avant les d�cisions extr�mes prises par Ben Bella contre le chef de la Wilaya VI, beaucoup de personnalit�s, et � leur t�te les colonels Zbiri et Hassen Khatib, tentent, en vain, une m�diation. Chaabani est trop engag� pour reculer, d�autant que Houari Boumedi�ne, craignant la r�ussite de ces bonnes volont�s, et jouant � l�incendiaire, envoie Mohamed Zerguini, un des DAF les plus honnis par le chef de la Wilaya VI, pour prendre le commandement des unit�s fid�les � ce dernier. Le pr�sident Gamal Abdenasser, craignant le pire pour son alli� de toujours, Ahmed Ben Bella, d�cide de s�en m�ler. Il d�l�gue aupr�s de Chaabani son ambassadeur, Ali Khachaba. La r�ponse de Chaabani est tr�s claire : �Dites � celui qui vous a mandat� mon respect et ma consid�ration. Je suis convaincu que sa d�marche est inspir�e par son souci de la stabilit� de l�Alg�rie, mais il m�est impossible de travailler avec un homme qui change dix fois par jour d�opinion.� Chaabani ne veut pas se rendre compte qu�il n�a plus d�alli� dans la place, puisque Khider a d� �galement se retirer, forc� � l�exil par le comportement de Ben Bella. Il ne veut pas se rendre compte que ceux qui ont tent� une m�diation ont fini par d�clarer forfait du fait de l�intransigeance des deux parties. Fethi Dib, chef des Moukhabarate �gyptiennes, qui esp�re pouvoir r�gler �le probl�me Chaabani� par le ricochet de Gen�ve, se rend en Suisse, pour demander, au nom du pr�sident Gamel Abdennasser, � Khider de restituer l�argent, dont il �tait un simple d�positaire, et dont il s�est empar� pour le mettre � �la disposition de l�opposition�. Fethi Dib s�entend r�pondre : �Je suis un patriote. Je viens de refuser l�aide de Sa Majest� le roi du Maroc pour l��limination de Ben Bella du pouvoir. Mon probl�me est la mani�re avec laquelle Ben Bella gouverne l�Alg�rie. Tous les hommes qui osent �mettre la moindre critique, y compris les anciens responsables historiques, sont foul�s aux pieds et emprisonn�s. Puisqu�il semble que le pr�sident Abdenasser jouirait d�une certaine consid�ration aupr�s de Ben Bella, demandez-lui d�intervenir pour faire lib�rer les personnalit�s emprisonn�es et pour que le pr�sident s�engage � mettre fin au pouvoir personnel. De la r�ponse que ce dernier lui donnera d�pendra mon retour en Alg�rie.� La r�action de Ben Bella � l��coute du compte rendu de Fethi Dib montre que les ponts sont d�finitivement coup�s avec ses opposants. Il dit � Fethi Dib : �Tous ceux qui sont emprisonn�s seront jug�s par un tribunal. Ils sont accus�s de tentative de coup d�Etat. s�ils sont condamn�s � mort, ils seront ex�cut�s. Khider lui-m�me est impliqu�. Le pr�sident exhibe un document o� il est question d�un projet de gouvernement avec Ferhat Abb�s, Khider, Boudiaf, A�t Ahmed, Ahmed Francis, Tewfik El Madani et Omar Ouzegu�ne et, bien s�r, Chaabani � la D�fense nationale. La mission de Fethi Dib s��tant conclue par un �chec, Ben Bella donne l�ordre de r�duire Chabaani par la force. La confrontation tourne � l�avantage des troupes gouvernementales, apr�s quelques escarmouches qui font deux morts � El Kantara. Les unit�s de la Wilaya VI ne sont pas tr�s motiv�es pour s�engager dans un combat fratricide. Chaabani a trop pr�sum� de ses possibilit�s. Au bout de huit jours, il est arr�t�.
L�HEURE DE AHMED BENCHERIF
Chaabani arr�t� par les hommes de Sa�d Abid est remis, sur ordre de Houari Bouedi�ne, � Ahmed Bencherif. Il est transf�r� imm�diatement � Djelfa, ligot�, les yeux band�s et couch� de force sur le plancher d�une Land Rover, les pieds de son gardien, un ancien adjudant de l�arm�e fran�aise appel� Gigi, alias Mohand Akli, pos�s sur son corps tout le long du voyage. Ahmed Bencherif suit, derri�re, dans une DS palace. Arriv� � Djelfa, Chaabani est d�abord interrog� sommairement par le m�me adjudant, sous le regard goguenard de Bencherif. Chaabani demande un caf�. Bencherif envoie un homme le ramener. Au moment o� le prisonnier tend la main pour saisir la tasse, Bencherif lui en balance le contenu � la figure. �Ceci de la part d�un ancien de l�arm�e fran�aise !� Chaabani, aveugl� par le liquide, le cingle d�un terrible : �Abna Bariss youhinouna abna Badis�, puis il se mure dans le silence. Bencherif donne ensuite la v�ritable raison de l��tape de Djelfa quand il ajoute : �Tu as fait tuer combien des miens par ici ?� Il faut savoir que les bellounistes, au moment o� ils avaient le vent en poupe dans la r�gion, �taient les bienvenus chez le bachagha Lahr�che, beau-p�re de Bencherif, lequel, peut-�tre n�en pouvait mais. Les �officiers � de Bellounis, ainsi que la majorit� des chefs harkis qui combattaient l�ALN et qui s�vissaient dans la r�gion de Djelfa avaient table ouverte chez le bachagha Lahr�che. Apr�s ce r�glement de comptes personnel de Bencherif (les hommes de la Wilaya VI n�avaient pas fait dans le d�tail en combattant les tra�tres de Bellounis), Chaabani est tranf�r� sur Oran et incarc�r� dans la prison militaire de Sidi El Houari, dans la cellule n�62. (Tout un symbole !) Dans les ge�les voisines se trouvent Ahmed Taleb El Ibrahimi, le capitaine Bouanani et peu de jours apr�s Sa�d Abadou. Les membres de l��tat-major de la Wilaya VI sont arr�t�s et transf�r�s � leur tour � Sidi El Houari, apr�s un passage par �Dar ennekhla �, la villa S�sini de B en Bella. Le choix de la prison appel�e �Sidi El Houari� n�est pas fortuit, sa sinistre r�putation, due au r�gime carc�ral moyen�geux qui y est appliqu�, est r�sum�e par le nom qu�elle porte. Le prisonnier doit ressentir � chaque heure du jour et de la nuit qu�il est livr� sans d�fense � un syst�me de murs, de portes massives, de gardiens aux visages froids, d�horaires immuablement fixes, mais qui, au-del� de ces apparences, poss�de une �me mal�fique, terrifiante de venin insidieusement distill�, celle de l�homme au regard vip�rin, dont elle porte le nom, fix� dans la p�nombre du cachot sur sa victime terrass�e.
MOHAMED HARBI, LE BIEN-PENSANT
Le 3 ao�t 1964, Houari Boumedi�ne signe, en qualit� de vice-pr�sident du Conseil des ministres et ministre de la D�fense nationale, le d�cret portant nomination des juges assesseurs devant faire partie de la cour martiale. Ce sont, dans l�ordre : le colonel Ahmed Bencherif, les commandants Abderrahmane Bensalem, Chadli Bendjedid et Sa�d Abid. Le pr�sident du tribunal, Mahmoud Zertal, conseiller � la cour d�appel, est d�sign� par le ministre de la Justice, Mohamed El Hadj Smain, par un autre d�cret sign� le m�me jour. Ahmed Dra�a est nomm� en qualit� de procureur de la R�publique. Le colonel Bencherif, d�sign� membre de la cour martiale pour veiller personnellement au verdict, et certain de ce qu�il sera, se rend dans la petite for�t de Canastel, qui a vu tant de moudjahidine tomber sous les balles de l�arm�e fran�aise, pour faire creuser la tombe de Mohamed Chaabani, avant m�me la tenue du proc�s. L�endroit choisi par Bencherif vient � bout de deux pioches, vigoureusement mani�es par les deux fossoyeurs Mohamed Ghozali et Tayeb Mrabet, tant il est dur. Lorsque les deux hommes commencent � avoir la paume des mains pleine d�ampoules, l�emplacement est abandonn� pour un autre, o� le sol est plus meuble, sous un grand pin maritime. Tandis que Bencherif est occup� � ces pr�paratifs macabres, les compagnons de Chaabani, Sa�d Abadou, Rouina Mohamed, Ch�rif Kheirredine, Amor Sakhri, Slimane Slimani, Hocine Sassi, Mohamed Tahar Laadjel, sont regroup�s dans la morgue de la prison sous bonne garde. Ils sont physiquement an�antis par les tortures qu�ils ont subies � �Dar Ennekhla�. L�-bas, ils ont eu le temps de mesurer combien Chaabani avait eu raison de s�opposer � Ben Bella. Les horreurs dont ils ont �t� les t�moins marquent encore leur m�moire. Au dernier jour de leur pr�sence dans la maison de la mort, ils ont assist� au martyre de A�ssa Messaoudi, la voix c�l�bre de la R�volution alg�rienne. �Houna El Djaza�r touhayikoum min kalb El Djeza�r� est devenu, dans la bouche des tortionnaires de A�ssa Messaoudi, et pendant que ce dernier hurlait de souffrance : �Houna El Djeza�r touhayikoum min Dar Ennekhla��. La parodie de proc�s aligne les chefs d�inculpation : haute trahison, atteinte � l�int�grit� du territoire, r�bellion arm�e, association de malfaiteurs, etc. Chaabani, abasourdi par le d�luge des fausses accusations qui s�abattent sur lui, est invit� � dire un dernier mot, il s�exprime pour assumer la responsabilit� de sa position. �j�ai d�fendu le bon droit de mon pays. Je m�en remets � Dieu.� Il r�ussira � �pargner � ses compagnons d�infortune le sort qui va �tre, dans quelques heures, le sien. Le colonel Chaabani est condamn� � mort. La d�cision est prise � la majorit� des voix, moins une voix, celle du futur pr�sident de la R�publique, Chadli Bendjedid ! Bendjedid n�a pas vot� la mort alors que Houari Boumedi�ne lui a personnellement t�l�phon� pour lui recommander, au nom de Ben Bella, de n�avoir aucune piti�. Les minutes du proc�s qui sont au minist�re de la Justice en font foi. Chadli Bendjedid prendra sur lui de faire une ultime faveur � Chaabani, lui permettre de s�entretenir avant son ex�cution avec Cherif Kheiredine. Le condamn� demande � son ami et compagnon de toujours de veiller � ce que sa m�re soit soutenue dans l��preuve et que son jeune fr�re, alors �g� de 15 ans, puisse poursuivre ses �tudes Le d�cret portant d�cision de l�ex�cution de la sentence est sign� le 3 ao�t I964, par Houari Boumedi�ne, AVANT LA TENUE DU PROC�S. Ce d�cret pr�cise les modalit�s pratiques de l�ex�cution. Houari Boumedi�ne emp�che le colonel Tahar Zbiri d�aller solliciter aupr�s de Ben Bella la gr�ce du condamn� � mort. Tahar Zbiri passe outre l�interdiction de Boumedi�ne. Dans l�illyouchine 18 qui nous emm�ne au Caire pour une r�union des chefs d�Etat arabes, le 3 septembre au matin, le colonel Zbiri revient, encore une fois, � la charge aupr�s de Ben Bella. Il ignore que la d�cision de faire ex�cuter Chaabani a �t� prise et qu�elle est irr�versible ! Chadli Bendjedid, quand il �voque, � Tarf le 27 novembre 2008, avec quels termes injurieux l�appel � la cl�mence de Sa�d Abid est re�u par Ben Bella, est encore au-dessous de la v�rit�. Ben Bella ne demande qu�� une seule personne son avis sur l�opportunit� politique de faire ex�cuter la sentence, � Mohamed Harbi. Le r�volutionnaire v�h�ment, devenu l�ic�ne de la bien-pensance alg�rienne outre M�diterran�e, conseillera, �dans l�int�r�t de la R�volution� le rejet de la gr�ce. Harbi, le lendemain de la mort de Chaabani, dira son sentiment dans un �ditorial incendiaire de R�volution Africaine. La d�cision de faire ex�cuter Mohamed Chaabani, alors que tout plaidait pour la gr�ce, est la r�sultante tragique de deux calculs. Ben Bella voulait adresser un avertissement � Boumedi�ne : �Voil� ce qui t�attend si jamais�� Boumedi�ne voulait que Ben Bella commette l�erreur de sa vie en mettant � mort un colonel de l�int�rieur, acte qui provoquera une r�probation horrifi�e, surtout chez les moudjahidine. Le colonel Mohamed Chaabani meurt courageusement � 5 heures 14 m du matin, le 3 septembre I964, apr�s avoir refus� d�avoir les yeux band�s et de demander son pardon � Ben Bella. Il regarde la mort en face. �A Dieu nous apparte�� La salve qui lui fracasse la poitrine le fait taire pour l��ternit� Le corps du supplici� subira le m�me sort que ceux des colonels Amirouche et El Haou�s. Ahmed Bencherif refusera d�indiquer l�endroit o� il l�a fait enterrer. La d�pouille sera frapp�e de s�questre pendant 20 ans. La famille du colonel Chaabani remuera ciel et terre pour la retrouver, en vain.
* Mahdi Ch�rif officier retrait�, ancien secr�taire g�n�ral de l�EMG ANP 1963 - 1967


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.