Le président de la République reçoit la nouvelle Directrice exécutive du Secrétariat continental du MAEP    Autoroute est-ouest: le péage non inclus dans le programme du Gouvernement    Port d'Oran: plus de 8 millions de tonnes de marchandises traitées durant les neuf premiers mois de 2024    Pêche: faire émerger de nouvelles filières de valorisation des déchets portuaires    ANP : reddition de 2 terroristes à Bordj Badji Mokhtar et arrestation de 6 éléments de soutien aux groupes terroristes    Constantine: coup d'envoi d'une compétition ornithologique    Tébessa : coup d'envoi dimanche des 3èmes Journées du court métrage    Oran: mise en exergue des facilités douanières dans le domaine de l'agro-alimentaire    Foot/ Qualif's-CAN 2025: Amine Gouiri, troisième meilleur buteur avec 4 buts    Le président de la République préside la cérémonie de prestation de serment de la nouvelle Directrice exécutive du Secrétariat continental du MAEP    Dopage/Colloque international: l'Algérie a mis sa législation en conformité avec la réglementation internationale    Sondage "Brahim Dahmani-2024": l'APS publie la liste des athlètes proposés pour les différents prix    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'alourdit à 43.985 martyrs et 104.092 blessés    Attaf reçoit un appel téléphonique de son homologue iranien    Liban: 3 544 martyrs et 15 036 blessés depuis le début de l'agression sioniste    Plus de 300 milliards de cts de factures impayées détenues par ses abonnés    Les ministres nommés ont pris leurs fonctions    L'Algérie met l'accent sur l'innovation et le soutien aux jeunes entrepreneurs    USM Alger-ORAPA United : Le Gambien Lamin N Jammeh au sifflet    Les 21 qualifiés pour la phase finale pratiquement connus    CAN-2025 U20 (Zone Unaf) : L'Algérie et l'Egypte se neutralisent    Le potentiel, considérable, de la croissance des exportations hors hydrocarbures mis en avant    Bendjama convoque le Conseil de sécurité aux actes au Moyen-Orient    La méthode Michel Barnier    Ouverture du 8e Salon international de la récupération et de la valorisation des déchets    Mise en service d'une unité de dépistage médical scolaire et de suivi des élèves    Saisie de 3,5 g de cocaïne, deux arrestations à Djdiouia    Un pied dans la tombe et il veut emmener le reste d'entre nous avec lui    Un travail de lexicologues, une oeuvre de référence    Appel à porter plus d'intérêt au contenu des journaux publiés durant la période coloniale    Quand le hijab rencontre le kimono vintage    Mohamed Boukhari prend ses fonctions de ministre du Commerce extérieur et de la Promotion des exportations    Guelma et Souk Ahras commémorent le 70ème anniversaire de la mort du chahid Badji Mokhtar    Touggourt commémore le 67è anniversaire de la mort en martyrs de Mohamed Amrane Boulifa et Lazhari Tounsi    «Dynamiser les investissements pour un développement global»    Le point de départ d'une nouvelle étape    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



R�FLEXION
Les peuples que le bendir rassemble et que le gourdin disperse
Publié dans Le Soir d'Algérie le 26 - 02 - 2012


Par Nour-Eddine Boukrouh
[email protected]
�Dans la nature rien ne se perd, rien ne se cr�e, tout se transforme�, a dit Lavoisier. Il en est � peu pr�s de m�me pour les id�es, elles ne disparaissent pas. Il en est qui se transforment pour s�adapter aux n�cessit�s de la vie, devenant des motivations exaltantes et des institutions au service du bonheur des hommes et de l�harmonie entre eux, et d�autres qui, tels les virus, mutent � la recherche de nouvelles conditions propices � leur survie pour continuer de s�vir contre le bonheur des hommes et l�harmonie entre eux au nom de quelque cause �transcendantale�.
Elles se nichent dans le double-fond des mentalit�s, attendant le moment o� la rationalit� recule et o� les mesures prophylactiques s��tiolent pour reprendre leur �uvre corrosive. Contrairement � ce que l�on croyait, le maraboutisme qui a prosp�r� dans notre soci�t� entre le XVe si�cle et la c�l�bration en 1930 du centenaire de la colonisation de l�Alg�rie n�a pas disparu dans la nature sous l�action �radicatrice des Oul�mas alg�riens qui s�est �tal�e sur un demi-si�cle. Voyez avec quelle rapidit� il est revenu ces derni�res d�cennies, et avec quelle facilit� il s�est r�incarn� dans le charlatanisme qui se cache derri�re l�islamisme.
Notre pays a livr� une grande guerre de lib�ration, reconquis sa souverainet� au prix de lourds sacrifices, d�pens� un millier de milliards de dollars depuis l�Ind�pendance pour se moderniser, dont une grande partie a �t� destin�e � l��ducation � en vue de former �l�Alg�rien moderne� � mais finalement il se retrouve ramen� aux p�riodes les plus obscures de la d�cadence du monde musulman et de la colonisation qui avait fait du maraboutisme un auxiliaire b�n�vole. Ce que nous pensions �tre des avanc�es irr�versibles s�est av�r� �tre de co�teux et vains coups d��p�e dans l�eau. Le maraboutisme a fait un extraordinaire saut en hauteur, puisqu�il a atteint les sph�res dirigeantes du pays, et son avatar, l�islamisme politique � chauss� des bottes de sept lieues � a fait un gigantesque saut en longueur puisqu�il couvre d�sormais une grande surface de la soci�t�. En fait, l�islamisme n�est pas l�h�ritier du maraboutisme, il en est une duplication, un clone. Ils sont d�sormais deux, deux entit�s virales, deux fl�aux � prendre en tenailles la soci�t� alg�rienne jusqu�� sa st�rilisation d�finitive, jusqu�� sa talibanisation. Tout doit �tre refait un jour, � moins que l�Alg�rie ne leur aura pas surv�cu parce qu�elle serait devenue quelque chose comme la Somalie ou l�Afghanistan, ce qui n�est pas impossible. Surtout si le p�trole venait � nous l�cher pr�matur�ment, ce qui n�est pas non plus impossible. La seule diff�rence entre l�islamisme charlatan contemporain et le maraboutisme musulman d�autrefois est que ce dernier n��tait pas sanguinaire. Il n��gorgeait pas les gens, il se contentait de les d�cervelait, de tuer en eux la rationalit�, tandis que le premier aime � cumuler les deux quand il le peut. De concert, ils ont r�ussi � reconstituer de haut en bas, parmi les gouvernants et le peuple, le public assoiff� de sacr� dont ils ont besoin pour exercer leur apostolat douteux. Ils ont restaur� l�ambiance envo�tante propice � leurs boniments, en m�me temps qu�� toutes les escroqueries, et r�tabli les pratiques de sorcellerie comme la �roqia�. A l��poque de Ben Badis, de larges couches de la population, b�ant de cr�dulit� devant ce qu�on leur racontait, guettant la survenance de quelque miracle, et suivant comme des moutons les processions maraboutiques, r�v�raient les �sid�, les �moulay� et les �chouyoukh� dispensateurs de baraka. Elles buvaient leurs paroles comme de l�eau b�nite et recueillaient les poils de leur barbe, quand ils en avaient, comme des reliques. C�est ce public que Ben Badis a qualifi� un jour de �peuple que rassemble le bendir et que disperse le gourdin�. Public m�lant p�le-m�le amateurs de bkhouret de djawi, �tolba� gu�risseurs de l��me et du corps, �mules entrant en transe au rythme endiabl� du bendir, et charmeurs de serpents comme ceux qu�enfant j�allais voir sur la place de la R�gence (actuelle place des Martyrs). Il y en avait partout, passant dans les villes, les quartiers et les villages, Blancs ou Noirs, enj�leurs ou louches, en burnous ou en gandoura, exhibant devant les foules �moustill�es ou �merveill�es tambours, bendirs, karkabous et moult objets f�tiches h�rit�s de l��re ottomane ou provenant de la mythique Tombouctou. Parfois, la pens�e est oblig�e de cr�er des mots nouveaux pour cerner des ph�nom�nes nouveaux. C�est ainsi qu�il nous faut un nouveau terme pour caract�riser la situation cr��e par les r�volutions arabes, je veux dire la victoire en cha�ne de l�islamisme et l�engouement communicatif qu�elle a suscit�, notamment en Alg�rie. �L�islamismania� est celui qui semble convenir pour rendre compte de cet engouement end�mique. On pensait que le gourdin de Moubarak avait assomm� les islamistes, et que celui de Ben Ali les avait dispers�s aux quatre vents. Or, voil� que l�islamismania les a rameut�s. Ironie du sort, ce sont les �g�n�rations internet � qui ont sonn� le rassemblement et leur ont fray� la voie, qui ont ouvert la bo�te de Pandore et ramen� Aladin (en la personne de tel ou tel leader), la lampe merveilleuse � la main et promettant de faire retrouver la vue � leur peuple plong� dans la c�cit� de la �djahiliya du XXe� selon l�expression de Sayyed Qotb. Le monde arabe s�est mis au vert, au sens propre et figur� du terme. �a sent partout le swak, le henn� et l�ambre. En se clonant en islamisme, le maraboutisme s�est modernis�. Il a gagn� en religiosit� ostensible et perdu en folklore ridicule. Le bendir a �t� remplac� par l�islamismania, et � la place du spectacle des charmeurs de serpents, confin�s � la place Djam�a-l-fna (Marrakech) pour amuser les touristes europ�ens, les cha�nes de t�l�vision des monarchies arabes offrent aux pieux t�l�spectateurs de nouveaux produits de marketing religieux comme l�activit� lacrymale interactive promue par l�inimitable Amr Khaled. Dans son �uvre, Bennabi consid�re que la civilisation islamique a �t� d�vi�e de sa trajectoire en l�an 57 de l�H�gire, l�ann�e de l�affrontement entre Moawiya et Ali. Pour lui, la �phase de l��me� venait de s�achever, laissant place � la �phase de la raison� qui s�est prolong�e jusqu�� l��poque d�Ibn Khaldoun, puis � celle de la d�cadence qu�il est mort sans la voir se clore. Il voulait dire par l� que la civilisation islamique n��tait plus, depuis lors, qu�un vaisseau qui avait perdu son plan de vol au d�collage, avant d�achever sa course, un mill�naire plus tard, dans le maraboutisme. Il propose � notre r�flexion un exemple tr�s concret : �L�effort intellectuel, c�est-�-dire l�effort cr�ateur d�id�es, a �t� plac� par l�islam au premier rang de ses recommandations par ce hadith du Proph�te : �Quiconque fait un effort intellectuel et parvient � une v�rit� a un double m�rite, et quiconque fait un effort et est parvenu � une erreur a quand m�me un m�rite.� Voil� un arch�type qui a guid� les efforts des premi�res g�n�rations de l�islam dans ces conqu�tes de l�esprit qui ont enrichi le patrimoine humain dans le domaine de la pens�e pure, comme dans le domaine des sciences appliqu�es. Mais, quelques si�cles au-del�, nous trouvons la soci�t� musulmane en possession d�une nouvelle philosophie de l�effort intellectuel. Nous trouvons, � vrai dire, son comportement totalement chang� � l��gard des id�es comme l�indique ce pr�cepte que les derni�res g�n�rations nous ont transmis : �Tafsirouhou khata�, wa khata�ouhou kofr� (L�interpr�ter, en parlant du Coran, est une erreur, et toute erreur est blasph�me). Et Bennabi de poursuivre : �Voil� une id�e qui constitue une d�fense qui a effectivement paralys� tout effort intellectuel dans le monde musulman o� toute sp�culation a eu en effet � la base une id�e coranique, comme les sp�culations de l��cole mu�tazilite qui a tant enrichi la pens�e musulmane. L��cole r�formiste, depuis Abdou, a eu vaguement conscience que l�esprit musulman s��tait enlis� dans cette orni�re. Mais pour l�en tirer, il fallait soit lui donner une nouvelle impulsion spirituelle, comme Luther et Calvin en Europe, soit lui faire subir une r�volution intellectuelle comme Descartes, c�est-�-dire lui donner, d�une mani�re ou d�une autre, un nouvel �lan cr�ateur d�id�es. L�Ecole r�formiste n�a su faire ni cette r�forme ni cette r�volution. Elle est tomb�e elle-m�me dans l�orni�re, tout en criant que nous sommes dans l�orni�re.� L�esprit musulman continue de tourner en rond, prisonnier d�une gravit� qui le fait tourner autour d�un astre mort, celui de la d�cadence. Le maraboutisme, comme le mode de pens�e et le mod�le de soci�t� pr�n�s par l�islamisme, descendent en droite ligne de l�attitude �intellectuelle� sugg�r�e par ce pr�cepte. Combien de fois ne l�a-t-on entendu dans la bouche de oulamas moyen-orientaux et moyen�geux, ou de leaders islamistes alg�riens ? En dehors du volet touchant aux m�urs, que sait-on de la �solution islamique� ? Rien, sinon qu�elle se pr�vaut des succ�s de la Malaisie ou de l�AKP alors que celuici, comme on l�a montr� dans de pr�c�dentes contributions, r�sulte des garde-fous pos�s par la la�cit�, de l�application des r�gles de l��conomie de march� et des crit�res de convergence impos�s par la perspective d�adh�sion � l�Union europ�enne. Si l�islamisme turc n�avait pas �t� soumis � ces pressions, il aurait probablement vers� dans le charlatanisme et l�extr�misme quand on sait que Teyyip Erdogan a failli �tre happ� par cette spirale � un moment de sa vie. Ayant �t� dans sa jeunesse � une �cole de formation des imams � avant de bifurquer plus tard vers des �tudes �conomiques � il n��tait pas loin de devenir un taliban. Alors qu�il �tait maire d�Istanbul (de 1994 � 1998), il a �t� mis fin � son mandat, et lui jet� en prison, parce qu�il avait lu en public un po�me d�un auteur turc qui disait : �Les minarets seront nos ba�onnettes, les d�mes des mosqu�es nos casques, les lieux de pri�re nos casernes, et les croyants nos soldats.� L�islamisme consid�re que l�islam est une seule et m�me chose depuis son apparition. Mais si l�islam est un, pourquoi l�islamisme est-il pluriel ? Pourquoi autant de partis en Alg�rie et en �gypte si la v�rit� que chacun pr�tend d�tenir est une seule ? La diff�rence est-elle dans le �programme� ou dans les hommes qui le v�hiculent ? Or, on sait qu�il n�y a pas de programme islamiste. La cause du peuple palestinien a perdu sa pr��minence dans l�esprit des peuples qui la soutenaient depuis que le peuple palestinien a �t� divis� en musulmans islamistes et en musulmans tout court (sans oublier les chr�tiens). Elle s�est scind�e en deux Etats avant m�me que l�Etat palestinien ne naisse. Sous pr�texte de r�sistance l�islamisme l�a divis�e en deux sous-causes antagoniques, l�une domicili�e � Ghaza, l�autre � Ramallah, sous l��il vigilant de Tsahal. Qui pouvait, en Isra�l, r�ver d�un tel scenario, d�un tel cadeau ? Le monde s�en est d�tourn�, et le gouvernement isra�lien en a profit� pour grignoter davantage de territoires, jusqu�au jour o� il n�y aura plus de Palestine du tout. Restera l�islamisme qui, faute de terre, planera majestueusement sur les eaux du Jourdain ou de la
M�diterran�e comme l�Esprit saint au d�but de la Cr�ation. J�ai parl� dans un �crit ant�rieur de �chari�land �, un autre n�ologisme qui m�a �t� inspir� par l�actualit� arabe. Ghaza n�en est-il pas un mod�le ? N�y sont admis que les musulmans palestiniens islamistes. Les autres, musulmans tout court ou chr�tiens, n�ont qu�� aller se faire pendre ailleurs. Dans l�Alg�rie coloniale, il y avait un pluralisme politique et une vie �lectorale. Eut-il pu y exister des partis islamistes pour concurrencer le PPA-MTLD et l�UDMA ? Non, car l�islamisme n�existait pas encore, il n�est apparu qu�� l��re des ind�pendances pour s�occuper de la femme, de la mixit�, du maillot de bain, des salles de pri�re sur les lieux de travail, de l�int�r�t bancaire et autres questions majeures rest�es insolubles depuis l�apparition de l�Homosapiens, c�est cela son programme. Mais maintenant qu�il est bien install�, que l�islamismania va rassembler encore plus de gens autour de lui, qu�il ne sera pas possible de disperser avec le gourdin, devra-t-il s�inspirer du Hamas pour s�parer musulmans islamistes et musulmans ordinaires (sans parler du sort � faire � la minorit� chr�tienne en voie d�expansion) quand il ne sera plus possible de vivre ensemble ? Ou aura-t-il besoin de l�expertise isra�lienne ? Et dans la pauvre �gypte, bien plus mal lotie que nous, o� iraient les 15% de musulmans qui n�ont pas vot� islamiste, et les 10% de Coptes ? Faudrait-il la diviser par trois ? Le Soudan, lui, n�a pour l�heure �t� divis� que par deux pour cause d�islamisme. Comme le morceau de gruy�re arrach� par Yasser Arafat au temps de Clinton et de Rabin. Tout le monde conna�t l�argument utilis� par des g�n�rations de �savants� et intellectuels musulmans : on peut se d�velopper sans rien changer � sa culture et � sa personnalit�, et la meilleure illustration est le Japon. Or, un sp�cialiste japonais du monde arabe vient d�apporter la r�ponse des Japonais � l�imparable et lumineux argument. Il s�agit de Nobouaki Notohara, un nippon arabisant, qui a pass� quarante ans de sa vie dans la p�ninsule arabique et traduit plusieurs livres de l�arabe au japonais. Il a publi�, il y a quelques ann�es, un livre intitul� Les Arabes : point de vue japonais o� il �crit : �A chaque fois que des Arabes se rencontrent � un colloque scientifique et que le Japon est mentionn�, les participants comparent le renouveau japonais au renouveau arabe tant esp�r�. Ils affirment que le Japon a r�ussi � int�grer le nouvel �ge tout en pr�servant sa culture. Il semblerait qu�ils cherchent ainsi � se trouver des excuses, � se justifier en disant : �On peut int�grer l��ge de la modernisation, de la mondialisation, et de la production, sans pour autant renoncer � son h�ritage social, au mod�le politique traditionnel, aux normes comportementales qui ne sont plus de mise aujourd�hui.� Et si on leur r�pond que les Japonais ont int�gr� l��poque moderne parce qu�ils ont renonc� au mod�le politique et au comportement social auxquels ils �taient habitu�s, et qu�ils ont adopt� de nouvelles id�es, certains Arabes r�agissent avec stup�faction, refusant d�admettre les faits� Au Japon, chaque jour apporte son lot de faits nouveaux, alors que l�Arabe se contente de reconstruire les �v�nements du lointain pass酻 L�Islam est la religion qui �tait la mieux dispos�e pour promouvoir une philosophie politique d�mocratique. Pourtant, les peuples que rassemble la culture th�ocratique et que disperse le gourdin lui ont pr�f�r� le despotisme, c�est-�-dire le r�gne des personnes plut�t que celui des institutions. La monarchie h�r�ditaire �tait �trang�re aussi bien � la doctrine islamique, qu�� l�histoire des Arabes. Il n�existait pas de monarques dans l�Arabie pr�islamique qui �tait plut�t une �R�publique de marchands� o� cohabitaient des tribus et des familles, mais sans structure unitaire ou autorit� au-dessus d�elles. Pour sa part, le Proph�te n�a ni institu� la monarchie ni d�sign� un successeur, il a laiss� aux musulmans le soin de le faire selon ce qui leur conviendrait. Il n�a ni us� de la culture th�ocratique ni du gourdin. Pourtant, quand on regarde le bilan, le despotisme est le seul mod�le politique que les arabo-musulmans ont connu tout au long de leur histoire. Ce qui �tait au d�part une h�r�sie est devenu une orthodoxie. Le despotisme a si bien �t� moul� dans l�argile des croyances qu�il n�a pas �t�, � ce jour, inqui�t� dans les monarchies qui se veulent de droit divin. Autre ironie du sort, ce ne sont pas les r�publiques qui ont �t� les plus fervents soutiens des r�volutions arabes, mais les monarchies, pour les raisons g�ostrat�giques que l�on devine et non par conviction d�mocratique, bien s�r. Et que feraient les islamistes s�ils savaient qu�on les laisserait faire ? Le califat. En cherchant un jour � v�rifier un d�tail dans la Constitution am�ricaine pour les besoins d�un travail, j�ai �t� saisi par la similitude entre le principe pos� dans la D�claration d�ind�pendance am�ricaine, en vertu duquel les citoyens ont le droit de se soulever contre le despotisme et le principe pos� par Abou Bakr le jour o� il a pr�t� serment comme successeur du Proph�te, fondant le m�me droit. Il n�y a de diff�rence que dans la formulation, autrement le fond est absolument identique. Et les deux moments, la D�claration d�ind�pendance, comme le discours d�investiture, �taient des moments fondateurs. On lit, en effet, dans le troisi�me paragraphe de la D�claration d�ind�pendance : �Les gouvernements sont �tablis parmi les hommes pour garantir (ces) droits, et leur juste pouvoir �mane du consentement des gouvern�s. Toutes les fois qu�une forme de gouvernement devient destructive de ce but, le peuple a le droit de la changer ou de l�abolir et d��tablir un nouveau gouvernement� Il est de son droit, il est de son devoir de rejeter un tel gouvernement�� Et comme pour donner aux citoyens am�ricains les moyens de mettre en �uvre ce principe, le Deuxi�me amendement a institu� le droit pour eux de d�tenir et de porter des armes. Les Am�ricains, n�ayant pas connu depuis leur guerre de lib�ration le despotisme, n�ont pas eu � recourir au soul�vement contre lui. De ce vieux principe est rest�e la libert� du port d�arme malgr� les probl�mes qu�elle pose � la soci�t� am�ricaine. Apr�s sa d�signation comme premier calife, Abou Bakr a d�clar� devant ceux qui venaient de l��lire : �Me voici charg� de vous gouverner. Si j�agis bien, soutenez-moi, si j�agis mal, corrigez-moi. Dire la v�rit� au d�positaire du pouvoir est un acte de d�vouement, la lui cacher est une trahison� �. Quelqu�un, parmi la foule, prit la parole et s��cria en levant haut son sabre : �Si tu agis mal, c�est avec ceci que nous te redresserons !� N�est-ce pas la m�me philosophie politique qui est � la base du texte am�ricain et du discours du premier calife ? La r�ponse apport�e par le b�douin pour compl�ter le principe pos� par Abou Bakr n�est-elle pas l��gale du Deuxi�me amendement l�gitimant le recours aux armes pour combattre un pouvoir devenu ill�gitime ? Pourquoi les choses ont-elles bien march� dans le cas des Am�ricains et pas dans celui des musulmans ? Parce qu�un quart de si�cle apr�s l��nonc� de ce principe, le gouverneur de Damas, Moawiya (fondateur de la dynastie omeyyade), a renvers� le calife l�gitime, Ali, et instaur� le califat h�r�ditaire sans que le peuple ne se soul�ve, ni que les oulamas ne le clouent au pilori. Au contraire, ils se sont ing�ni�s � l�gitimer le gourdin et sa transmission h�r�ditaire. Depuis, les peuples que rassemble le bendir et que disperse l��p�e d�Al- Hadjadj ont fait leur entr�e dans l��re ininterrompue du despotisme sous toutes ses d�clinaisons : califat dynastique, monarchies, pr�sidence � vie, r�publiques h�r�ditaires� Autre question : Pourquoi les musulmans, si sensibles � l�id�e de �salaf�, qui a donn� salafisme (imitation des anciens), ont-ils suivi l�exemple de Moawiya plut�t que celui d�Abou Bakr ? Parce que les oulamas et fouqahas ont escamot� le principe d�mocratique par crainte du gourdin ou pour lui complaire en �change de leur pr�rogative de rassembler le peuple et remplac� par un autre, tir� du d�tournement de sens de paroles comme : �Ob�ir au d�tenteur du pouvoir, c�est ob�ir � Dieu.� Ils ont fait avec le Coran et le hadith ce que les despotes ont fait avec leurs Constitutions. Pas plus qu�il n�a voulu d�signer un successeur, le Proph�te n�a laiss� derri�re lui le Coran tel que nous le connaissons. Le premier, Omar s��tait inqui�t� de ce que les r�v�lations coraniques n��taient pas r�unies en un seul corpus. Elles �taient apprises par c�ur par les Compagnons ou transcrites sur des supports de fortune (parchemin, bois, poterie, omoplates�) Or, ces derniers commen�aient � dispara�tre avec les guerres d�expansion, ou de vieillesse. Omar en parla au calife Abou Bakr qui prit peur devant la perspective de faire quelque chose que le Proph�te n�avait pas fait : r�unir en un seul livre les versets �pars. Les deux hommes consult�rent le scribe-secr�taire le plus qualifi� du Proph�te, Ze�d Ibn Thabit, lequel r�agit comme Abou Bakr avant que Omar ne finisse par les convaincre tous les deux en leur opposant ce simple argument : �Quel mal y a-t-il � le faire ?� Le travail fut engag� sous la direction de Ze�d et aboutit � une recension � laquelle on donna le nom de �mashaf�, rest� pendant une douzaine d�ann�es par devers Abou Bakr puis Omar. C�est Othman qui d�cida de r�gler d�finitivement le probl�me en nommant une commission de quatre experts, dont Ze�d qui, sur la base de l�exemplaire laiss� par Omar � sa fille (et veuve du Proph�te) Hafsa, a donn� au Coran son ordre actuel. Mais, peut-on s�interroger, pourquoi les 114 Sourates regroupant les versets ont-elles �t� class�es par ordre de longueur plut�t que par ordre chronologique, c�est-�-dire dans l�ordre o� les versets ont �t� r�v�l�s ? L�ordre d�croissant n�aide pas � leur compr�hension puisqu�on a d�tach� chaque ensemble de versets du contexte dans lequel il est venu. Ce
n�est pas Dieu ou le Proph�te qui a voulu cet ordonnancement, mais les hommes d�sign�s par Abou Bakr puis, une douzaine d�ann�es plus tard, par Othman. R�sultat, il faut transiter par les oulamas et les �sciences religieuses� pour acc�der au sens d�un verset.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.