Par Daoudi Rachid A la lecture de la contribution de M. Benchicou dans l��dition du Soir d�Alg�rie du 8 septembre 2012, je me sens dans l�obligation d�apporter mon point de vue sur le contenu de cet �crit. Avant tout, M. Ouali A�t-Ahmed n�a nullement besoin d�un secours de qui que ce soit pour se d�fendre. Son pass� (et son pr�sent) parle pour lui. Si Ouali que j�ai l�honneur de conna�tre depuis l��ge de 13 ans peut �tre consid�r� comme un symbole de la probit�, du d�vouement, du d�sint�ressement et... de la modestie. Ayant pris le maquis � l��ge de 17 ans dans la Wilaya 3, il a surv�cu � plusieurs �preuves de feu, pour se retrouver au poste de sous-pr�fet en 1962. Il est rest� chef de da�ra jusqu�� sa retraite. A ma connaissance, il n�a jamais �t� promu wali, bien que pour ceux qui le connaissent, sa comp�tence ne pouvait �tre mise en cause. Certes, on peut �tre honn�te, d�vou�, d�sint�ress� et modeste � un moment de sa vie et finir souvent, � un moment ou � un autre, par se d�barrasser d�au moins un de ces lourds fardeaux. Si Ouali A�t-Ahmed n�a jamais chang�. Il est rest� fid�le � son id�al ! (il en a toujours eu), � son pays, l�Alg�rie. J�avoue que je lui en ai un peu voulu depuis sa retraite : rester silencieux pendant que des bavards se mettent � parler de sujets qu�ils ne connaissent pas. Silencieux pendant que des falsificateurs en mission command�e s�attaquent � l�un des domaines les plus sacr�s qui constituent le socle de notre pays : son histoire. Mais voil�, Si Ouali a fini par r�agir � des outrages inflig�s, par-ci, par-l�, � la R�volution de Novembre 1954. Oui, elle a bel et bien exist� cette immense r�volution. J�avais personnellement 14 ans en 1954 et je me rappelle de l�enthousiasme que les premi�res actions des maquisards suscitaient chez tous ceux qui y croyaient. A ce propos, il faut rappeler que pour y croire (en novembre 1954), il fallait soit �tre un vrai r�volutionnaire (lucide et d�termin�), soit �tre jeune (innocent et inconscient). �Cette glorieuse r�volution a bien eu lieu.� Cette affirmation peut s��crire, en sept mots, mais ceux qui les lisent et qui n��taient pas encore n�s � l��poque peuvent-ils s�imaginer ce qui s�est pass� r�ellement de novembre 54 � mars 1962 ? Il est impossible de restituer des �v�nements par des mots. Disons seulement que la violence r�gnait : des morts, des tortures, des emprisonn�s, des d�plac�s, des exil�s, des mutil�s, des d�pouill�s. Les auteurs et les sujets �taient des hommes, des femmes, des vieux, des jeunes. Ils sont des centaines de milliers � avoir perdu la vie pour la cause de l�ind�pendance de l�Alg�rie ; ce nombre est certainement plus �lev� pour ceux qui ont subi pour la m�me cause un pr�judice grave, dans leurs biens, leur int�grit� physique ou leur sant� mentale. Ceux qui ont agi et subi, qui ont fait que cette r�volution existe, �taient des fils des entrailles de ce grand pays, ils �taient alg�riens, musulmans, comme disaient sans cesse nos ennemis. J�essaie, maintenant que la question est soulev�e, de me rappeler mes r�f�rences tout au long de ces ann�es que les Alg�riens de ma g�n�ration ont eu le privil�ge de vivre. Je t�moigne que je n�ai jamais, durant toute cette glorieuse p�riode, entendu parler, ni entendu quelqu�un qui aurait entendu parler d�un za�m barbu ni d�une �Oum El Djaza�rine�. Certes, je me rappelle que dans les ann�es 1940, on chantait en kabyle �Messali El Hadj Izem� (le lion). Je me rappelle avoir lu la proclamation du 1er Novembre 1954. Je me rappelle aussi de Belounis, de son arm�e et de ses nombreux assassinats. Je me rappelle aussi de ce parti (que notre journaliste commet le sacril�ge de qualifier de rival du FLN) qui s'appelait le MNA et qui faisait la guerre au FLN en France avec la complicit� des autorit�s fran�aises, faute de ne pouvoir la lui faire en Alg�rie. Oui, il y avait le FLN (pas le parti actuel qui se fait ind�ment appeler ainsi, qu�� Dieu ne plaise), le vrai, et il y avait l�ALN, la vraie, la seule, l�unique, compos�e de dignes fils de ce pays. Comment ose-t-on parler d�une �certaine ALN� ? Un blasph�me. Oui, il est vrai qu�apr�s l�ind�pendance du pays, beaucoup de choses impr�vues se sont produites. Elles �taient impr�vues car dans l�esprit de la R�volution de Novembre (oui, cet esprit a exist� et existe toujours), dans lequel baignaient tous les Alg�riens qui ont v�cu la guerre, les choses �taient inimaginables. Mais ceci est un autre chapitre de notre histoire, qui finira bien par �tre trait� publiquement un jour, n�en d�plaise � ceux qui ont profit� et qui continuent � profiter de la confusion entretenue � dessein. Il est certain que 50 ans apr�s la fin de la guerre, un grand nombre de ses acteurs ont quitt� ce monde. C�est peut�tre sur cette rar�faction des t�moins que certains tablent pour investir notre histoire et y introduire les �correctifs� qu�ils tiennent sous le coude en attendant toute opportunit�. Mais voil�, la m�moire nationale vit de sa propre vie. Celle-ci est heureusement profond�ment populaire et � chaque tentative de lui mettre la t�te dans l�eau, elle ressurgit plus forte et plus lisible. Les Alg�riens ne peuvent ignorer que le mouvement nationaliste alg�rien a pu s�organiser d�abord en France, gr�ce au Parti communiste fran�ais. Personne ne peut oublier les prises de position courageuses et risqu�es d� Alger r�publicaindurant la guerre, ni Henri Alleg, ni Fernand Yveton, ni Maurice Audin, ni Henri Maillot et d�autres encore. Les Alg�riens ne peuvent oublier l�aide pr�cieuse apport�e � la R�volution par des Fran�ais de France, soucieux de d�fendre l�honneur de leur pays, la France. L�Alg�rie n�oubliera certainement pas tous les pays et tous les �trangers qui l�ont fortement aid�e dans sa lutte de lib�ration. La m�moire de notre pays ne sera jamais d�faillante. C�est cette m�me m�moire qui nous dit que notre pays s�est lib�r� de par lui-m�me, de par son peuple, de par son histoire, de par son combat qui n�a jamais cess� depuis 1830. Je me permets d�ajouter mes mots de t�moignage - 2 juillet 1962, devant la mairie de Tizi-Ouzou, beaucoup de monde rassembl� de bon matin, attendant on ne sait quoi. Vers 9-10h, trois personnes paraissent au balcon de l�H�tel de ville. Elles lisent un papier donnant les r�sultats d�un r�f�rendum, puis s'�clipsent. Sur la place, les gens cherchaient peut�tre quelqu�un � applaudir, un h�ros � acclamer : personne ! Alors, soudain, des personnes se saisissent d�un simple d�esprit errant parmi la foule et avant qu�il ait le temps de comprendre ce qui lui arrivait, quelqu�un le mit sur ses �paules, lui mit un drapeau dans la main et autour d�eux, la foule qui grossissait se mit � marcher en scandant des slogans. C��tait le d�part des manifestations de joie qui allaient durer plusieurs jours. Une heure apr�s, je pris la route pour Alger : de Tizi-Ouzou � Bab- El-Oued, c��tait la m�me foule, les m�mes danses et (surtout) les m�mes slogans : �Tahya El Djaza�r Allah yarham echouhada Had thnine, djabouha el moudjahidine.� Qui aura l'effronterie de dire ou d��crire un jour que papa Messali ou mama Busquant y �taient pour quelque chose ?