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L�officier de Barataria et le fant�me d�Emilie Busquant
Publié dans Le Soir d'Algérie le 08 - 09 - 2012

La premi�re attaque frontale contre le roman, La parfumeuse(1) , est donc sign�e d�un �ancien officier de l�ALN�, d�une certaine ALN allais-je dire, et cela n�a rien d�anodin.
L�histoire d��milie Busquant, sa vie lumineuse mais aussi sa fin d�chirante, symbolise la rupture de notre mouvement national, son passage d�un mouvement internationaliste b�ti sur une soif de libert�, de d�mocratie et de modernit� � un nationalisme �troit au service de mandarins pass�s de �lib�rateurs� d'un peuple � profiteurs d'un r�gime. A l'inverse de nos astucieux d�magogues qui nous pr�sentent l'ind�pendance comme un bien pur dont ils auraient gratifi� le peuple en mettant leur t�te sous le billot, un don mythique, un absolu de revanche, La parfumeuse soutient que l'ind�pendance fut, en m�me temps, qu'une conqu�te populaire, le fruit d'un �lan de lib�ration du monde, le cadeau d'une cha�ne solidaire internationaliste tress�e par les grandes conqu�tes r�volutionnaires du si�cle dernier. Il portait un id�al de d�mocratie et de justice qu�on nous a d�rob� (lib�ration de l'homme, Assembl�e constituante �lue au suffrage universel, �tat d�mocratique et ouvert � toutes les races et � toutes les confessions, �galit� de l�homme et de la femme�). Les papes de l�autocratie, ces clans qui ont d�tourn� le mouvement national � leur profit, qui ont su confier aux martyrs la besogne de conqu�rir la libert� pour aussit�t s�y engouffrer, la contr�ler, puis gouverner par le glaive et le mensonge, n�aiment pas entendre ce genre d�histoires. Ils savent que les questions pos�es par le pr�sent trouvent leur r�ponse dans l�histoire. Leur l�gitimit� repose sur le non-savoir. A trop visiter le pass�, on se heurtera, t�t ou tard, � la question cataclysmique : comment est-on pass� des premi�res revendications de l�Etoile nord-africaine puis du PPA(2) (un �tat d�mocratique d�sign� par une Assembl�e constituante �lue au suffrage universel) � ce syst�me politique autocratique qui s�vit dans le pays depuis 1962 ? A voir les innocentes sornettes dont il truffe son texte, M. Ouali A�t-Ahmed, � qui il faut rendre cette justice qu�il ne craint pas le ridicule, ne me para�t cependant pas faire partie de ces camarillas ou alors seulement en brave soldat Shvek. Du reste, j'en suis encore � me demander si sa plus impardonnable d�sobligeance fut de m'avoir injuri� sans m�avoir lu ou de l'avoir fait sans talent. Quitte � �tre calomni�, autant l'�tre apr�s lecture et, si possible, avec brio. Je n'ai pas eu ce privil�ge. C�est sans loyaut� envers Emilie Busquant dont il s'acharnait, avec l'�l�gance qu'on devine, � travestir les positions et � nier le moindre r�le dans le mouvement national, que notre ancien officier entreprit de pourfendre un livre, dont je persiste � penser qu�il m�rite, � d�faut de la sympathie, un examen honn�te et, � d�faut d�un critique objectif, un adversaire de meilleure trempe.
Pas utile de lire le livre
Notre ancien officier de l�ALN commence par renvoyer �milie Busquant sous terre. C�est compr�hensible. Il ne veut plus entendre parler de la nature internationaliste et prol�tarienne du mouvement national alg�rien. Pour ce faire, il s'invente un pass� et une patrie virtuelle dont il serait le seul h�ros, � l'instar de Sancho Pan�a, fid�le compagnon du chevalier Don Quichotte, �cuyer errant qui a toujours r�v� d��tre roi et qui s�autoproclama gouverneur de l'�le de Barrataria, une patrie fictive mais un monde parfait, peupl� exclusivement de laudateurs, o� personne ne juge le gouverneur, o� l��chec est aboli , o� il s�entend, la nuit, rosir de fiert�. Il privatise alors la r�volution : �La r�volution c�est nous !�. Il menace : �Nous devons nous poser des questions pour savoir les raisons pour lesquelles un feu de tout bois est allum� pour falsifier notre histoire r�cente, apr�s avoir enseveli notre histoire antique.� Aussi, le r�quisitoire ainsi que le verdict de M. Ouali A�t-Ahmed furent-ils conformes � la technique et au style barratarien. La technique consiste, ici, � jeter le b�b� avec l�eau du bain. Pour ne plus s�encombrer d�Emilie, notre ancien officier la noie dans les ranc�urs anti-messalistes. �Mettre en relief la personne de Mme �milie Busquant, c�est s�ent�ter � redorer le blason de Messali Hadj qui ne s�occupait que du culte de sa personnalit�, � mod�rer l�ardeur des militants de la cause nationale pour retarder une insurrection arm�e in�luctable�, �crit-il. Quant au style barratarien, il �nonce qu�il n�est pas utile de lire le livre qu'on pr�voit de br�ler. La chose aurait relev�, en effet, du bon sens, mais, comme chacun le sait, dans l��le de Barrataria o� chacun peut se r�ver roi, on n�a que faire du bon sens. Qu�adviendrait- il, sinon, de la Barratarie, l�ami, patrie de la pantomime, o� le gouverneur se pla�t en repr�sentations, bluffant les opinions par l�art de la parodie, du pastiche et de la paraphrase, enivr� par les ors du pouvoir et les contes fantasques dont il est le seul h�ros, ivre jusqu�� en oublier la r�alit� et son �tat de simple palefrenier ? Sur toutes les cha�nes de t�l�vision on peut d'ailleurs �couter la derni�re imploration du ma�tre du moment : Dieu grave mon nom sur les murailles de l��ternit� Fais-moi rena�tre Nabuchodonosor ! Dieu, je n�ai pas recr�� les jardins suspendus de Babylone, mais je fis, Seigneur, construire ma tour de Babel ! Un minaret pour t�approcher, Dieu !� Aussi, c�est sans avoir ouvert le roman que notre homme le catalogue de man�uvre inscrite �dans un sc�nario�, mont� par l�ancienne puissance coloniale visant � r�habiliter Messali et le MNA.(3) �Si cette �milie Busquant avait cette passion pour la libert� de l�Alg�rie qu�on lui pr�te, elle aurait souffl� � son mari de faire sienne la cause nationale du 1er Novembre 1954 !� L�inconv�nient c�est qu��milie est morte en octobre 1953 et que le roman ne traite ni du MNA ni de Novembre 1954 ni des combats fratricides entre le camp de Messali et le FLN. Mais notre ancien officier, n�ayant pas lu le livre, ne pouvait pas le savoir. Alors, entendez-le amalgamer pour les besoins du travestissement : �Oui, pourquoi ne l�a-t-elle pas conseill� de rejoindre le camp du FLN au lieu de cr�er son propre MNA (Mouvement national alg�rien), le 14 d�cembre de la m�me ann�e ?...� Et voil� le fant�me de la pauvre �milie, quatre ans apr�s la disparition de cette derni�re, inculp� pour collusion avec Jacques Soustelle ! �Oui, cette �milie, elle aurait pu le conseiller � donner des instructions � ses fid�les de diriger leurs armes sur l�ennemi commun, au lieu de lutter contre les combattants de l�ALN dans le Djurdjura, � A�t-Yala, � M�sila, � Dar-Chioukh, sous la direction de son lieutenant militaire �le g�n�ral Bellounis�� Mais elle �tait d�j� morte ! Vous n��coutez pas ? Non, il n��coute pas. Ou alors seulement ses ressentiments. En d'autres temps, j'aurais accueilli avec la d�rision qui s'impose, ce grotesque et arrogant r�quisitoire et au terme duquel M. Ouali A�t Ahmed, solennel, expulse �milie Busquant de l�histoire, me retire mon brevet de r�volution ainsi qu�� mon confr�re R�mi Yacine d� El Watan, nous refuse le certificat de patriotisme, concluant, le ton grave, que nous ne serions que des sous-satellites d�un appareil de d�sinformation fran�ais. Notre ancien officier ex�cute avec brio une t�che ordinairement d�volue au minist�re de la Culture ou � ce clerg� du mensonge, v�n�rable institution qu�on dit compos�e de nouveaux juges en soutane et d'anciens r�sistants en gandoura, et dont la noble mission consiste � avorter toute cr�ation litt�raire, cin�matographique ou th��trale qui toucherait � l�Histoire et qui pourrait susciter un d�bat sur l�ill�gitimit� des pouvoirs. C�est � la maestria de ces vigiles censeurs que l�on doit d'avoir terrass� moult initiatives d�plaisantes comme celles du dramaturge Ziani Ch�rif Ayad ou, derni�rement, de notre ami Mourad Bourboune que le r�gime donnait pour repli� dans une inoffensive existence de retrait�, ami des arts, des b�tes et de la philat�lie, et qu'il d�couvrit, le fourbe, en possession ill�gale d'un sc�nario sur Ben Mhidi ! C'est � cette noria de censeurs comp�tents que l'on doit d'avoir pr�serv� l'Ile des influences n�fastes de quelques bad boys de la plume, dont Mohamed Arkoun. Voil� un penseur qui �crit que �les �checs ont commenc� d�s le lendemain de l'ind�pendance quand se sont impos�s des r�gimes policiers et militaires, souvent coup�s des peuples, priv�s de toute assise nationale�� Parlerait-il de l��le ? A-t-on id�e de laisser tra�ner des livres o� l�on lit que �les moyens par lesquels les r�gimes se sont mis en place n'ont, nulle part, �t� d�mocratiques� ? Pas de place dans l��le pour les esprits bassement lucides ! Un rideau sanitaire prot�ge la population de ce genre d'attaque virale. Il s'y exerce une vigilance quotidienne contre toute lucidit� malvenue. Aussi, est-il inimaginable de pr�tendre y porter la contradiction. L��le a ses codes d'acc�s, connus des seuls initi�s et des gorilles vigilants emp�chent toute f�cheuse information venue de la r�alit� de contaminer l'atmosph�re hallucinatoire ou, pire, de se propager au sein de la population. Sans doute M. Ouali A�t-Ahmed n�appartient- il pas � ce clerg� du mensonge, mais il en emprunte les proc�d�s, l�autoritarisme, l�arrogance. Par �gard pour le combat de M. Ouali A�t-Ahmed, ou ce qui est suppos� l'�tre, par r�pugnance aussi � me ranger du c�t� de ceux qui, ordinairement, s'empressent d'attaquer l�ALN, je m�abstiendrais d�emprunter le ton qui fut celui de mon contradicteur. J�essayerai seulement d'�tre plus clair.
C�est celle l�, l�histoire r�cente de l�Alg�rie !
A lire notre ancien officier de l'ALN, exhumer �milie Busquant ce serait falsifier l'histoire r�cente du pays. Mais de quelle histoire r�cente parle-t-il donc ? Le mouvement nationaliste alg�rien n'a �t� ce qu'il a �t� que par le contact avec le monde ouvrier international. Il a �t� influenc� par les pulsions lib�ratrices du monde qui pr�dominait durant les ann�es 1920 (fin de la Premi�re Guerre mondiale, �closion de la r�volution bolchevique et de tous les mouvements novateurs qui portaient en eux une nouvelle fa�on de vivre libre�). Ce n'est pas diminuer du m�rite des Alg�riens que de rappeler qu�ils ne furent pas vraiment � l'origine du mouvement national �mancipateur qui d�bouchera, de p�rip�ties en p�rip�ties, sur l'insurrection du 1er Novembre. Ils n�en n�avaient ni la capacit� ni la vision ni peut-�tre m�me la motivation. Ils se limitaient � revendiquer, pour les plus audacieux, l'abolition du code de l'indig�nat, une relative extension de quelques droits aux Alg�riens� Jusqu'au d�but des ann�es 1940, l'�lite alg�rienne, c'est-�-dire les �lus de Bendjeloul, Ferhat Abbas, les oul�mas de Ben Badis, puis, plus tard, le Parti communiste alg�rien, tous revendiquaient l'int�gration de l'Alg�rie � la France. C�est cela, l�histoire r�cente du pays ! Le courant qui exigeait l�ind�pendance �tait minoritaire ! L'�toile nord-africaine, premi�re organisation politique � exiger l'ind�pendance et qui enfantera le PPA puis le contexte de novembre 1954, est n�e par la volont� de la Troisi�me internationale. D'o� le fait que nombreux parmi ses fondateurs �taient membres du Parti communiste fran�ais (Abdelkader Hadj Ali qui agissait ouvertement en tant que responsable au sein du PCF, A�t Toudert, Belghoul, Chebila, Ben Lakhal, Messali, Boutouil, Saidoun, Menouar, Marouf�) L'�toile fut, d�s son origine, un parti prol�tarien qui s'inscrivait dans une strat�gie d�cid�e � Moscou et qui consistait � �tendre la r�volution � toute l�humanit� et autour de laquelle se sont enchev�tr�s tant de mains g�n�reuses, dont celle d'�milie Busquant. Cette femme que notre ancien officier veut r�duire � une controverse sur le drapeau, cette femme fut une des toutes premi�res adh�rentes � l'�toile nord-africaine. Elle avait commenc� par mettre � la disposition de l�Etoile tout ce qui, en elle, pouvait servir : sa formation militante, ses relations parisiennes et notamment dans le monde syndical, sa meilleure connaissance du fran�ais, sa compr�hension du droit, toutes ces choses avec lesquelles elle �tait familiaris�e et qui seront de pr�cieux concours pour le d�marrage de la premi�re �toile. C'est cette femme, cher officier, � l'�ge d'� peine 24 ans qui s'occupait de r�diger les articles d�EL Ouma, le courrier ainsi que les documents sensibles, de retenir les salles de r�union g�n�ralement la Grange Aux Belles, c�est pr�s de chez eux, d�obtenir les autorisations d�organiser des d�bats, de r�diger et de distribuer les tracts� Cette femme, cher officier de l'ALN, n'a pas fait que concevoir et coudre le premier drapeau alg�rien ; elle a surtout contribu� � r�diger ce que l'on appela le texte fondateur du nationalisme alg�rien, en 1927 ce discours que son compagnon allait prononcer, trois jours plus tard, � Bruxelles, au Congr�s anti-imp�rialiste et qui est le premier document revendiquant l'ind�pendance de l'Alg�rie, cellel� pour laquelle M. Ouali A�t Ahmed, vous irez vous battre, 30 ans plus tard. Le discours de Bruxelles mais aussi le M�moire qu�elle a �crit pour la Soci�t� des nations de Gen�ve, pour protester contre les f�tes du Centenaire de la colonisation et la situation lamentable des Musulmans, apr�s un si�cle de colonisation. Elle avait cr��, avec Hadj Djilani, la Glorieuse Etoile nord africaine, apr�s que l�ENA fut dissoute et ses responsables incarc�r�s, en 1934. Elle ne cherchait pas � retenir ce que sa patrie, la France, avait de meilleur. Elle cherchait le meilleur dans l�ind�pendance d'un peuple asservi. Dans la libert�. A-t-il id�e de ce qu'il a fallu se sacrifier pour pr�server l'objectif de l'ind�pendance en ces ann�es terribles o� tout vous en dissuadait ? Tout : la France officielle, sa police, son arm�e, mais aussi le Parti communiste fran�ais qui retira son soutien apr�s le discours de Bruxelles et la bolch�visation des PC, sans oublier une grande partie de l'�lite alg�rienne, des Elus du docteur Benjelloun aux Oul�mas de Ben Badis, en passant par Ferhat Abbas et les communistes alg�riens, ce que l�on appelait alors le Congr�s musulman et qui r�clamait non pas l'ind�pendance mais le rattachement � la France. Voil� l'histoire r�cente de notre pays, M. Ouali A�t-Ahmed ! C'est contre cette France coloniale et ces �lites indig�nes qu��milie Busquant s��tait battue durant 30 ans afin que ne s��teigne pas la flamm�che de l'ind�pendance. Elle s'�tait battue contre sa propre patrie, elle qu�on vit tenir t�te aux policiers, � la presse coloniale, aux juges de l�occupant mais aussi aux indig�nes partisans de l�assimilation, � propos du projet Blum-Viollette d'extension des droits politiques aux �lites qu�elle d�non�a publiquement comme un plan illusoire qui �accorde le droit de vote � 25 000 bourgeois en laissant dans l'ignorance et la mis�re 6 millions de fellahs�. Elle l'a combattu en tant que plan du m�pris et de la honte qui conf�rait � quelques milliers d�indig�nes tri�s sur le volet, le droit � l�exemption, c�est-�-dire le droit de ne pas �tre soumis aux m�mes servitudes que le commun des indig�nes. �milie �tait une internationaliste. Elle prolongeait, dans son combat pour l�ind�pendance alg�rienne, les grandes r�volutions qui avaient commenc� par lib�rer l�homme, dont celle de 1789. En 1934, devant 2 000 personnes � la salle de la Mutalit�, elle avait d�clar� �Je suis all�e en Alg�rie, je suis rest�e trois mois, j'ai vu la mis�re, j'ai vu d�filer par centaines des mendiants, femmes, enfants, vieillards, malades squelettiques, comme des morts vivants. Il y a pr�s d'un million d'enfants qui ne trouvent pas de place � l'�cole et qui sont livr�s � la rue. Le code de l'indig�nat, les mesures d'exception font du peuple musulman alg�rien une proie livr�e pieds et mains li�s au colonialisme. Cela le peuple fran�ais ne l'acceptera pas, lui qui a fait la r�volution de 1789 pour briser les cha�nes monarchiques qui l'�touffaient et pour donner la libert� � tous les peuples.�
Le fils amn�sique
Alors, il y a presque de la compassion � le voir railler une femme qui lui a trac� le chemin vers le maquis. Il en est pourtant le fils, amn�sique certes, mais le fils quand m�me. Le drame n'est pas qu'il l�ignore. Le drame est qu'il refuse de le savoir. Cher officier de l�ALN, vous �tes le fils de 1962 et de 1789, de toutes les guerres des humili�s contre le ma�tre commun ; l�enfant des Alg�riens morts en Kabylie et des Communards fusill�s, la m�me ann�e, en 1871 ; le fils d�Aziz Haddad et d�Eug�ne Mourot le chef des Communards qui l�a h�berg� dans le XXe arrondissement. Vous �tes le descendant des Turcos, ces artilleurs alg�riens qui avaient d�sert� l�arm�e fran�aise pour rejoindre la population derri�re les barricades. M. Ouali A�t Ahmed parle au nom de cette caste arrogante qui refuse de se savoir enfant naturel d�une g�n�rosit� internationaliste et d�un peuple trahi. Il exprime, avec le naturel qui accompagne les esprits vaniteux, la m�connaissance de sa propre filiation. Il ne veut rien savoir de ce qui, dans l'histoire, chez tant de mains g�n�reuses ont donn� un corps � la libert�, la sienne et la n�tre, et qui l'ont fait marcher dans le monde jusqu'� ce qu'elle devienne notre obsession, notre indispensable oxyg�ne, que nous respirons sans y prendre garde, jusqu'au moment o�, priv�s de lui, nous nous sentons mourir. Et c'est alors, M. Ouali A�t-Ahmed, que vous �tes mont�s au maquis ! Vous deviez avoir 20 ans. Je parle d'une femme dont il allait de notre honneur qu'on en raconte au moins une fois l'histoire, une femme de l'ombre et dont personne ne dira qu�elle se mit aux commandes du PPA devenu parti orphelin apr�s l�incarc�ration de sa direction en 1937,devenu parti orphelin, attaqu� de toute part, forc� � une semi-clandestinit�. Elle �tait parmi les rares � prot�ger cette fragile lumi�re de r�bellion, en attendant que deux anciens responsables de l�Etoile, Abdellah Filali et Arezki Kehal, arrivent de Paris pour la relayer. Elle avait fait de la maison de la rue Fran�ois-Villon le centre du parti, son nouveau si�ge et le lieu de rencontres des militants. Elle avait transform� cet appartement en un supr�me r�duit de r�sistance. Il sera le quartier g�n�ral d'un refus obstin�. Elle avait d�cid� de poursuivre et d�organiser la r�sistance. Elle mobilisa la jeunesse de La Casbah. Elle savait qu'avec une poign�e de braves, on pouvait arr�ter l'�lan inhumain de cette machine coloniale qui terrorisait les corps et l'esprit. Ce fut � cette p�riode qu�elle d�joua l�affaire du Carna en 1938, l�organisation paramilitaire cr��e par certains responsables du PPA � l�insu de la direction et qui convint de parlementer avec l�Allemagne nazie pour en obtenir assistance. Sans Emilie, le PPA aurait �t� � jamais assombrie par la tache hideuse de la complicit� avec Hitler. Elle veilla, seule, sur le corps d�Arezki Kehal, quand ce dernier fut r�duit � la mort par les autorit�s coloniales� Oui c'est contre cette France coloniale et ces �lites indig�nes qu��milie Busquant s'est battue durant 30 ans afin que ne s��teigne pas la flamm�che de l'ind�pendance. Et �a ne fait de personne un h�ros ; �a ne fait de personne un tra�tre, parce que c'est cela le mouvement national, un choc des convictions, chacun estimant juste ce qu'il avait � faire.
�L�ALN, une �quipe de football ?�
C�est pour tout cela que le peuple d�Alger, qui s�est d�plac� par milliers, a rendu un inoubliable dernier hommage � celle qui fut surnomm�e �La m�re du peuple alg�rien�, se relayant autour de sa d�pouille couverte du drapeau alg�rien, sc�ne qui se suffit � elle-m�me mais que notre ancien officier de l�ALN, dans une r�pugnante accusation, qualifie de sc�ne concoct�e par l�administration coloniale. M. Ouali A�t Ahmed ne craint pas, � trop se gausser d��milie Busquant qu�il voit comme la cr�ation des �chercheurs en circoncision de puce�, � trop cracher sur un demi-si�cle de r�sistance qui constituent la fiert� historique du peuple alg�rien, de faire le lit d�un nihilisme dont il ferait les frais � son tour ? Ne craint-il pas le rire moqueur, demain, au pays zwawa, � propos de sa propre �pop�e ? �Un officier de l�ALN ? �a existe ? Comment dites-vous ? ALN ? C�est une �quipe de football � Mais ne l'accablons pas davantage. Lui qui a choisi de se priver des privil�ges du combat pour chercher dans le grenier des forbans l�uniforme de la mesquinerie, l�est suffisamment comme �a ! Il ne ressemble en rien � ces r�sistants qu�on croise encore dans nos villes et villages, et qui ont su emp�cher l'effondrement de leur espoir. Lui, n'a peut-�tre plus rien � raconter � ses petits-enfants ; rien d'autre que la haine de l'autre ; le reniement de sa propre m�re ; le jugement au lieu d'apprentissage ; la condamnation plut�t que l'�coute. Il est mont� au maquis � 20 ans pour un id�al de libert� que ses enfants de 20 ans cherchent toujours, eux qui vivent dans le d�sarroi, eux qui traversent la mer dans une fr�le barque pour tenter de trouver cet id�al loin de ce pays qu'il a lib�r� ce pays dont ils demandent � en s�parer la Kabylie. Qu'aura-t-il � dire � tous ces perplexit�s juv�niles quand, au milieu de tant d�injustices, des tr�fonds de la terre trahie, il lui parviendra cette imploration aux cieux : pourquoi ta guerre, grand-p�re, n'a pas apport� ma d�livrance ? Il faut bien se r�soudre, sinon � r�pondre, du moins � cesser de se voiler les yeux. On ne peut plus rien contre ces nouveaux esprits qui refusent les mystifications du si�cle et qui travaillent � �difier des v�rit�s contre les fables et les fabulateurs, les pr�bendiers de l�histoire et les nouveaux muftis de la v�rit� historique. Non plus rien sauf les tuer encore et toujours ; les emprisonner ; les b�illonner. Mais on ne les dupera plus. La confiscation de l'histoire qui s'appuyait sur le mensonge, ne s'appuie d�sormais sur rien. Pour finir sur la r�volte et sur la Kabylie, il serait important pour la m�moire d'�milie de pr�ciser qu'elle ne voulait pas d'une ind�pendance creuse. Durant 30 ann�es, elle ne s'est battue que pour un �tat d�mocratique d�sign� par une Assembl�e constituante �lue au suffrage universel, pour une participation de la population � la d�cision nationale. La p�riode la plus p�nible fut celle du chantage, entre 1939 et 1945 : la collaboration ou la prison. L'administration coloniale, misant sur l'usure morale et physique de Messali qu'elle trimbalait de prison en prison, lui proposera une transaction � quatre reprises : renoncer � l'Assembl�e constituante et au suffrage universel en �change de sa lib�ration et de quelques concessions politiques aux populations musulmanes. �milie avait syst�matiquement rejet� ces offres. Elle avait �crit � son ami une lettre rageuse qu'il avait lue aux militants emprisonn�s � Lamb�se et dans laquelle elle lui disait : �N'accepte pas de donner ta signature, le peuple alg�rien est avec toi et s'il le faut, je mettrais les enfants chez des amis et j'irai en Kabylie prendre le maquis !� Ce fut � cette occasion qu�un d�tenu s�exclama : Emilie, c�est la m�re du peuple alg�rien ! La formule est rest�e. Il est rest� et il restera toujours du parfum d�Emilie dans le combat des hommes de cette terre. Le sort en a voulu ainsi. Le sort, l�histoire, ou plut�t une certaine ironie de l�histoire, celle- l� qui a voulu ressusciter les communards, les Turcos, les mineurs alg�riens, cent ans d�humiliation partag�e, de rage commune, tout ce que leur couple, �milie et Hadji, a repr�sent�. L�islam et la Bastille. L�islam et le pain pour tous. Islam et les barricades. Personne n�y peut rien. Oui, notre parcours vers l�ind�pendance fut le fait des hommes et des de femmes qui ont refus�, tr�s t�t, le d�shonneur et la d�sertion. Ils �taient Alg�riens, Europ�ens, noirs, blancs ou jaunes, chr�tiens, juifs, musulmans ou sans confession. Ils ont pr�serv� la chance fragile d'une renaissance, d�une ind�pendance � laquelle personne ne croyait. C�est de �a que nous vivons aujourd�hui. S�ils ne l�avaient pas pr�serv�, comme dit l�autre, nous ne vivrions de rien.
M. B.
1) L e Soir d�Alg�riedu 27 ao�t 2012
2.) Le Parti du Peuple Alg�rien (ou PPA) a �t� fond� le 11 mars 1937 par Messali Hadj en France1,2 apr�s l'interdiction de l'�toile nord-africaine (ENA) par le Front populaire au pouvoir � l'�poque. Ce nouveau parti a maintenu la direction, les structures et les objectifs de l'ENA.
3. Le Mouvement national alg�rien (MNA) �tait une organisation politico-militaire visant � l'ind�pendance de l'Alg�rie et fond�e en 1954 par le v�t�ran nationaliste Messali Hadj comme un rival du Front de lib�ration nationale (FLN) durant la guerre d'ind�pendance alg�rienne.


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