Par Ali Akika, cin�aste Les guerres en Palestine, en Irak, en Afghanistan et ailleurs ont mis � rude �preuve le statut des m�dias. Au lendemain de la premi�re guerre du Golfe, il y eut un fr�missement chez les journalistes pour refuser dor�navant d��tre �embeded� (embarqu�) et de rapporter ce que veut bien leur montrer les arm�es d�occupation. Avec la prise d�otages de In Am�nas, les d�mons de la recherche du sensationnalisme conjugu� � l�ignorance et aux pr�jug�s semblent refaire surface. Je suppose que beaucoup de lecteurs ont comme moi regard� les t�l�s et lu les journaux de l�autre c�t� de la M�diterran�e. Inutile donc de faire un r�sum�. Essayons de cerner les ingr�dients qui font revenir � la surface ces d�mons qui embrouillent, manipulent plus qu�ils n�informent. Le premier p�ch� mignon de beaucoup de journalistes en Occident, c�est leur croyance en leur libert� d�expression que leur permettent leur conscience et la d�mocratie de leur pays. On peut les croire grosso modo quand il s�agit de couvrir la politique int�rieure. Sauf que lorsqu�il s�agit par exemple de Palestine et d�Irak, et aujourd'hui l'Alg�rie, l� ils foncent t�te baiss�e pour reprendre les arguments les plus �cul�s de la propagande isra�lienne ou bien croire na�vement ou plut�t cyniquement aux armes de destruction massive invent�es par leur Oncle Sam. Ils d�blat�rent sans vergogne sur l�Histoire, le pr�sent et m�me le futur des pays que l�Occident �crase de sa puissance de feu. Adoss�s � cette puissance, ils se croient d�tenir la m�me puissance intellectuelle qui leur donne le droit de faire des analyses qui l�vent le plus souvent le voile sur leurs pr�jug�s si ce n�est leur inculture. Ainsi In Am�nas a �t� l�occasion pour la plupart des journalistes et animateurs des m�dias de v�tir leurs uniformes de strat�ge ou d�anthropologue. Comme les vrais strat�ges et hommes de terrain ne vont pas dans leur sens, ils reviennent � la charge pour leur arracher un jugement qui conforte leurs pr�jug�s tout en masquant leur ignorance. M�me la parole de leur pr�sident est malmen�e quand il a d�clar� que la r�action de l�arm�e alg�rienne �tait la mieux adapt�e � la situation. Ils lui pr�f�rent leurs propres explications qui se r�sument, je cite : �La brutalit�, le manque de comp�tence de l�arm�e alg�rienne est le fruit des m�thodes de ces anciens maquisards et de ceux des forces sp�ciales du KGB.� Quand on entend ce genre de propos, on ne peut que d�duire que l�information est entr�e en Occident dans une �re de la pens�e unique. On en viendrait presque � regretter l��poque de l�id�ologie dominante car la domination laisse un peu de la place � la r�flexion, au courage et � l�espoir. Cette id�ologie dominante n�a pas emp�ch� les peuples colonis�s de se r�volter, pas plus qu�elle n�a abruti totalement les peuples en Europe puisqu�ils descendent par millions, en Gr�ce, en Espagne mais aussi en France pour affronter les d�g�ts de la finance internationale. Le deuxi�me p�ch� mignon de cette presse est d�une certaine fa�on son refus de saisir et d�analyser le pr�sent, ce qui est une sorte de d�ni du r�el en mouvement, un comble pour le journalisme, cette litt�rature du pr�sent. Cette presse, enfant de la pens�e unique, choisit la fuite en avant. Elle pr�f�re anticiper et d�finir les contours du paysage alors que la guerre bat son plein. Ainsi dans le cas de In Am�nas en pleine bataille, beaucoup de journalistes avaient conclu en nommant le gagnant et le perdant et certains ont m�me pouss� leur culot jusqu�� pr�dire le basculement de l�Alg�rie dans la guerre que fait la France au Mali. Ce d�ni du r�el et cette propension � d�finir le futur en le sculptant selon leurs d�sirs avec des outils de leurs ind�crottables pr�jug�s sont la preuve que ces journalistes coupent la branche sur laquelle repose ce beau m�tier. Ces journalistes n�ont pas cess� de parler de confusion lors de la prise d�otages. Jamais aucun d�eux n�a questionn� le sens de ce mot. Est-ce la confusion dans le r�el ou bien la confusion dans les infos qui tentaient de rapporter la dynamique de ce r�el. Le r�el �tait pourtant limpide, il opposait deux forces bien identifi�es et chacune d�elles avait un objectif pr�cis. Et la confusion �tait dans la t�te des journalistes pris entre le feu des infos distill�es par les preneurs d�otages et les propos forc�ment partiels d�otages lib�r�s ou bien les rumeurs qui fleurissent dans ce genre de situation. Ces journalistes confondent confusion et strat�gie de communication. On peut porter un jugement sur la strat�gie des deux adversaires mais le mot confusion ne cerne nullement le r�el. La strat�gie des preneurs d�otages �tait d�amplifier au maximum leur action. C��tait leur seule arme. Quant � la strat�gie d�un Etat, elle repose sur des facteurs aussi nombreux que complexes. Pourquoi ces journalistes qui parlent de confusion, de m�thodes du KGB ob�issent comme des enfants quand les gouvernements am�ricain, isra�lien et fran�ais leur ordonnent de taire ceci ou cela pour des raisons de s�curit� nationale. Ces m�mes journalistes ont tu les noms et le nombre de Fran�ais otages parce que leur gouvernement le leur a demand�. Ils floutent les visages et ne diffusent pas des vid�os pour ne pas faire le jeu des ravisseurs. Ce qu�ils se permettent pour eux-m�mes, pourquoi le refusent- ils pour les autres ? Ils se croient tout permis d�s lors qu�il s�agit de leurs ex-colonies. Eh bien � l�avenir ils prendront leurs pr�cautions avant de nous faire croire que leurs d�sirs sont des ordres. Depuis le 5 juillet 1962, ils auraient d� comprendre que le drapeau tricolore ne flotte plus en Alg�rie. Ceci dit pour que ces donneurs de le�ons ne reviennent pas � la charge, un d�bat dans le pays est n�cessaire et m�me vital pour saisir et ma�triser le vacarme des m�dias dans un monde o� l�inflation de la communication est la r�gle et l�information cr�dible une denr�e rare. Informer les citoyens est un devoir car il cimente leurs convictions et fortifie leurs armes dans un monde o� les chacals sans piti� pour les faibles et les ignorants sont nombreux, trop nombreux.