Par Kader Bakou L'homo sapiens, qui signifie «homme savant» en latin, est, paraît-il, l'unique espèce survivante de la famille des hominidés appartenant à l'ordre des primates. Une quinzaine d'autres espèces, dont l'homo habilis et l'homo erectus, ont disparu. Mais l'homo algerianus mentem périmus est encore l'espèce dominante dans cette partie de l'Afrique du Nord. Elle se divise en deux sous-espèces morphologiquement et mentalement pareilles, mais différentes par leur mode de vie : ceux qui vivent sur les hauteurs et ceux qui vivent en bas, dans les cavernes. Ils se détestent mutuellement, bien qu'ils aient toutes les deux les mêmes archaïques modes de pensée. Par le passé, beaucoup de ceux d'en haut, tombés de leur arbre, sont devenus des hommes de cavernes et s'opposent aujourd'hui à leurs anciens alliés, d'un côté. D'un autre, la plupart des hommes des cavernes qui, ayant appris les ficelles du métier, sont montés très haut, ont très vite renié leurs origines/ Depuis environ deux ans, les hommes des cavernes essayent par tous les moyens de faire tomber ceux qui, comme Tarzan ou Akim, ont choisi de bâtir leurs maisons sur un arbre perché. Pour arriver à leur but, ils sont en train d'allumer un peu partout des feux en espérant qu'un énorme brasier finira par consumer tous les arbres de la forêt. C'est ça la politique de la terre brûlée qui, dans ce cas précis, devient un suicide collectif. Dans cette partie de l'Afrique du Nord vit aussi le très discret homo algerianus universalis. C'est le vrai homme savant, cultivé et discipliné. Il est instruit et ouvert sur les cultures des autres, notamment celle du monde occidentalis. Il aime les arts et la culture et les œuvres de l'esprit. Pour lui, tous les hommes et les femmes sont égaux en droits et en devoirs. Aussi, il rejette toutes formes de discriminations, sur une base ethnique, confessionnelle ou autre. De loin, il observe la furieuse mêlée opposant les deux tendances de l'homo algerianus mentem perimus. Pour lui, ce n'est ni plus ni moins qu'une guerre de butin et, en fin de compte, un sinistre baroud d'honneur de vieux turbans. L'homo algerianus universalis a fait sienne cette limpide formule d'Albert Einstein : «On ne résout pas les problèmes avec les modes de pensée qui les ont engendrés.» K. B.