La sonnette d�alarme a �t� r�cemment tir�e sur un cas de d�tournement par la compagnie italienne Eni et l�australienne BHP Billiton de grandes quantit�s de p�trole dans le bassin de Berkine, � partir d�un p�rim�tre g�r� par Sonatrach en effort propre. Selon des experts, les volumes de p�trole d�tourn�s sont compt�s par millions de barils d�s lors que la compagnie alg�rienne a autoris� la r�ouverture, sur le bloc 401/402, d�un puits de p�trole (SFNE-13) qui a d�j� �t� ferm� par les autorit�s du temps de Chakib Khelil, en raison de sa communication avec un autre puits de la Sonatrach (SF-4). Le puits codifi� SFNE-13, situ� sur la limite de deux champs (Sif Fatma et Sif Fatma Nord-Est) appartenant respectivement � Sonatrach et l�association avec les compagnies italienne et australienne, est d�sormais inscrit dans un nouveau scandale, mettant en cause aussi bien Chakib Khelil que d�autres responsables actuels du secteur de l��nergie. La confusion sur les deux champs voisins Sif Fatima (SF, d�tenu � 100% par Sonatrach) et Sif Fatima Nord-Est (SFNE, association entre Sonatrach, Eni et l�australienne BHP Billiton) est sans doute le fruit de l�amalgame entretenu pendant des ann�es par Chakib Khelil sur les blocs 401, 402 et 403 du bassin de Berkine, au sud-est de Hassi Messaoud. L�association entre Sonatrach et la partie italienne pour l�exploitation du bloc 403 de Zemoul El-Kbar remonte au 20 d�cembre 1988, lorsque le gouvernement de Kasdi Merbah avait approuv� le contrat conclu entre Sonatrach et l�italienne AGIP. Une association similaire sur les blocs 401/402 situ�s sur les p�rim�tres de Rhourde Elouh et Sif Fatima Nord Est a �t� cr��e en juin 1989 � travers la signature d�un contrat de partage de production (PSC) avec la compagnie BHP Billiton. Par la suite, une cession de parts a permis l�introduction de la compagnie italienne AGIP sur ces trois champs. Et, en absorbant AGIP, Eni est devenue donc le vrai partenaire de Sonatrach et de BHP dans ces associations. Il faut dire que ce bassin suscitait de l�int�r�t � plus d�un titre. Ses r�serves prouv�es se situaient dans un excellent niveau alors que le transport par canalisation �tait accessible avec le minimum d�investissements. Au d�but de ce mill�naire, Chakib Khelil parvenait � obtenir l�approbation des autorit�s par rapport � toutes les d�cisions qu�il prenait par rapport aux associations de Sonatrach avec d�autres compagnies �trang�res, car le pays enregistrait un �norme retard en mati�re d�investissement dans le secteur des hydrocarbures et la hausse des prix du baril favorisait encore plus sa d�marche. Le cafouillage sur le bassin de Berkine a commenc� avec la d�livrance de nombreux permis, accord�s il y a quelques ann�es, dans le cadre de nouvelles associations entre Sonatrach et des partenaires �trangers, tels que Cepsa qui exploite actuellement Rhourd Errouni II sur les blocs 401a et 403 f et First Calgary Petrolium (FCP) qui a �t� mise sur pied avant d��tre revendue aux italiens de l�Eni en 2009. Et jusqu�� aujourd�hui, on n�arrive pas expliquer la densit� des permis accord�s dans cette zone pr�cis�ment et encore moins les imbrications entre les blocs et les exploitations. Cette situation, qui dure jusqu�� ce jour, favorise encore la confusion sciemment provoqu�e depuis plusieurs ann�es. Ainsi, les p�rim�tres Rhourde Elouh et Sif Fatima (Blocs 401a/402a) se retrouvent dans un magma dans lequel figurent quatre gisements non encore unitis�s. Il s�agit de Rhourde El Debdaba (RDB), Bir Sif Fatma (BSF), Rhourde Er Rouni Nord (RERN). En revanche, deux gisements seulement sont unitis�s. Le premier gisement, Sif Fatima Nord Est (SFNE, blocs 403d - 401a/402a) comprend une association Sonatrach/Eni avec 8,9% et une association parall�le Sonatrach/ENI/BHPBilliton avec 91,1%. En revanche, au niveau du second gisement de Rhourde Ouled Djema� (ROD, situ� sur les blocs 403a - 401a/402a), les proportions diff�rent. L�association Sonatrach/ENI d�tient 24,72% des parts alors que le groupe Sonatrach/ENI/BHP Billiton g�re 75,28% de participations. Les cadres de Sonatrach devront g�rer cette situation ambigu� jusqu�au 21 juillet 2027. Sur le p�rim�tre voisin, Zemoul El Kbar (bloc 403a), l�association entre la Sonatrach et Eni est bien plus compliqu�e. Cette association g�re quatre gisements non encore unitis�s : Rhourde Messaoud (ROM), Zemoul El Kbar (ZEK), Zemlet El Adreg (ZEA), Bir Reba� Ouest et Extension Sud-Ouest (BRW-EXT SW). A ce jour, l�association exploite deux gisements unitis�s : le premier, Hassi Berkine (HBN, 403a-404a) o� l�association Sonatrach/ENI compte une proportion de 39% et l�association Sonatrach/AAC se situe � hauteur de 61% de parts. Le second gisement est celui de Rhourde Ouled Djema� (ROD, 403a-401a/402a) dans lequel l�association Sonatrach/Eni dispose de 24,72% des parts alors que l�association Sonatrach/Eni/BHP en compte 75,28%.Pour le commun des lecteurs, ce jeu de chiffres et de lettres n�a pas une grande signification, mais les �rudits de la gestion des parts p�troli�res comprennent que la situation a �t� sciemment provoqu�e pour pouvoir compliquer les calculs et rendre tr�s difficile le contr�le des chiffres avanc�s par chaque entit�. La mauvaise foi se traduit alors par l�implication de Sonatrach, en effort propre, dans des op�rations de recherche afin qu�elle supporte seule tous les frais de l�exploration. Le g�nie r�side dans le fait de lui trouver ult�rieurement un partenaire �tranger qui aura tout le privil�ge de signer un contrat de partage de production (PSC) et b�n�ficier, sans grands investissements, d�avantages au d�triment de la partie alg�rienne. Dans ce cas pr�cis, figure un permis g�r� � 100% par Sonatrach sur le champ Sif Fatima, consid�r� comme l�orphelin de la zone en question, car presque totalement abandonn� depuis des ann�es. La r�volte des cadres de Sonatrach Cette histoire de d�tournement de quantit�s de p�trole a �t� mise en �vidence en 2007 par des cadres comp�tents de Sonatrach qui ont constat� une communication entre les puits SFNE-13 exploit� par l�association avec Eni et BHP et SF-4 relevant de la seule comp�tence de Sonatrach, mais non encore exploit�. Motiv�s par la fibre patriotique, ces cadres de Sonatrach ont exig� de l�op�rateur italien la fermeture du puits SFNE-13, car il communiquait avec le gisement mitoyen et aspirait d��normes quantit�s de p�trole appartenant exclusivement � Sonatrach. Mais avant d�arracher cette d�cision, il fallait vraiment bousculer les partenaires Eni et BHP. Apr�s une premi�re alerte lanc�e en f�vrier 2007, plusieurs r�unions ont lieu � Alger et Hassi Messaoud mais en vain. Il aura fallu se d�placer � Milan pour prouver, avec l�appui des experts des Bureaux Beicip Franlab et LandMark, la communication entre les puits des deux concessions. Devant les preuves irr�futables pr�sent�es par les experts de Sonatrach et appuy�s par les arbitres internationaux, Eni a tent� de marchander. La compagnie Italienne, avec la complicit� de son associ�e australienne, �taient dispos�es � admettre l�unitisation (l�exploitation cons�quente) du puits SFNE-13 � la seule condition que la Sonatrach accepte le principe d�abandonner l�effet r�troactif de l�accord. Autrement dit, Sonatrach et l�Etat alg�rien �taient contraints de renoncer � la demande de d�dommagement par rapport � l�exploitation ill�gale des quantit�s de p�trole puis�es pendant des ann�es du gisement Sif Fatima. A leur retour � Alger, les experts de Sonatrach sugg�rent � leur tutelle plusieurs mesures, dont la fermeture des puits incrimin�s et la r�duction de la production de l�association de SFNE de 20 mille � 10 mille barils/jour. Devant cette situation, les responsables de la compagnie italienne se mettent � se plaindre aupr�s de Chakib Khelil qui finira par convoquer certains membres de l��quipe de Sonatrach ayant malmen� les partenaires �trangers. Mais le jour de la r�union, l�ancien ministre de l�Energie �tait pr�occup� par les enqu�tes men�es par les officiers du DRS sur les connexions entre l�ancien P-dg de Sonatrach Mohamed Meziane et l�autre soci�t� italienne, Saipem. Les experts de Sonatrach se sont acharn�s, ce jour-l�, � prouver � tests de Workover � l�appui � que les Italiens pompaient du p�trole appartenant � Sonatrach et ont exig� que le puits SFNE-13 soit imm�diatement ferm�. Chakib Khelil, qui ne pouvait plus se permettre un autre scandale avec les op�rateurs italiens, abdique et autorise la fermeture du puits incrimin�. La th�orie du chaos Apr�s le d�part de Chakib Khelil, les Italiens ne d�sesp�raient pas. Ils ont �tabli des contacts tous azimuts avec beaucoup de garanties pour r�tablir et normaliser la situation conflictuelle qui durait depuis des ann�es. En 2010, une rencontre ayant regroup� des responsables du minist�re de l�Energie, d�Alnaft et de Sonatrach, avait abouti � une sage d�cision de la part des responsables alg�riens. Pour ne pas sanctionner la production nationale, il a �t� d�cid� de l�ouverture des puits incrimin�s sur le p�rim�tre SFNE et comptabiliser les quantit�s puis�es sur le p�rim�tre de Sonatrach. Autrement dit, on devait suivre tr�s attentivement la communication entre les deux p�rim�tres et quantifier les productions. N�anmoins, la d�cision des responsables alg�riens ne sera pas per�ue avec la m�me sinc�rit� du c�t� italien. D�s l�ouverture du puits qui faisait l�objet de litige, Eni d�cide de l�exploiter � fond. Sa production est pass�e jusqu�� 6 mille barils/jour avant de d�cro�tre et se stabiliser � 3 mille barils/jour apr�s l�apparition des premiers signes de d�pl�tion. �C�est criminel�, commente un cadre de Sonatrach qui consid�re que cette surexploitation du puits affecte le p�rim�tre voisin g�r� par la compagnie nationale en effort propre. Alors que cette situation empirait, Sonatrach ne parvenait pas encore � se placer sur le champ de Sif Fatima et �quilibrer la production. L��viction de Noureddine Cherouati par son ministre de tutelle retardera encore plus le lancement de l�exploitation du champ Sif Fatima, appartenant � 100 % � Sonatrach, car son successeur n��tait pas inform� de cette situation. Pour sa part, l�actuel ministre de l�Energie semblait consid�rer qu�une guerre contre les Italiens d�Eni pour r�cup�rer des privil�ges accord�s par Chakib Khelil n��tait pas appropri�e. De ce fait, Eni et BHP avaient repris la production du puits litigieux avec plus d�aisance et de facilit�s que celles accord�es par Chakib Khelil. Des millions de barils en jeu Ce sont les pressions exerc�es par des cadres de Sonatrach qui ont incit� les responsables � prendre la d�cision de l�exploitation du champ Sif Fatima. Celui-ci n�a �t� mis en service que depuis 4 mois � peine, avec une production tr�s faible, de l�ordre de 1 277 barils/jour. A la fin du mois de janvier dernier, le champ Sif Fatima a produit seulement 841 mille barils. En revanche, sur la zone d�en face, l�association SFNE, qui a commenc� � extraire les huiles depuis 2004, a d�j� atteint une production de 47,48 millions de barils, soit 60 fois plus que ce qu�a produit Sonatrach en effort propre sur SF. Avec la quantit� de 10 millions de m�tres cubes d�eau inject�e � ce jour, l�association SFNE a d�j� d�pass� le seuil des 62% des r�serves r�cup�rables. Les experts de Sonatrach estiment que sur les 47 millions de barils produits sur le champ SFNE, plusieurs millions de barils appartiennent � Sonatrach et ses 37 millions d�actionnaires. Et � ce rythme d�exploitation, le champ SFNE sera tr�s vite affaibli et l�association sera ensuite mise en veille, avec des cons�quences d�sastreuses sur le reste des gisements voisins. Au lieu d�engager une action d�arbitrage pour r�cup�rer ce qui revient de droit au peuple alg�rien, certains responsables de Sonatrach font la sourde oreille. Ni le d�partement Amont ni encore moins son PED ne se manifestent pour attirer l�attention du P-dg sur ces questions graves. Le ministre de l�Energie, cens� conna�tre tous les dessous de cette histoire, ne montre aucun signe d�hostilit� envers les Italiens, d�une part. D�autre part, il faut avouer que l�ARH (Agence de r�gulation des hydrocarbures) et Alnaft (Agence de valorisation des hydrocarbures) semblent aussi emboiter le pas � leur ministre de tutelle et se confinent dans le r�le de l�ignorant. Le plus grave dans cette histoire est sans doute la n�gligence constat�e dans les rapports avec les partenaires �trangers. En effet, depuis plusieurs mois, de nombreux cadres de Sonatrach se posaient la question de savoir pourquoi le vice-pr�sident Amont ne s�inqui�tait pas de la longue absence du chef de d�partement de Berkine, qui devait superviser les op�rations avec les partenaires. Sans r�ponse. Au final, on apprend que ce responsable est sur le point d��tre engag� par une compagnie p�troli�re en Malaisie ! Cette situation montre le laisser-aller qui pr�vaut dans le principal d�partement de Sonatrach et le manque de vigilance � l��gard des associations avec les partenaires �trangers. Hocine Benamar Eni : leader en Alg�rie Pr�sente en Alg�rie depuis 1981, l�Eni a concentr� l�essentiel de ses activit�s de production dans le sud-est du pays, notamment sur le bassin de Berkine o� les op�rations ont �t� mont�es par rapport � une logique �conomique coh�rente. La compagnie italienne g�re un permis � 100% sur le bloc 403a/d, une participation de l�ordre de 35 % sur ROM (Rhourde Messaoud Nord), une autre participation de l�ordre de 55 % sur les blocs 401a/402a et 50 % sur le bloc 403 et 404a. De m�me, Eni est d�tentrice de 12,25 % de participations sur le bloc 404a et le bloc 208, ainsi que 75 % sur le bloc 405b et 22,38% sur le 212. Par ailleurs, Eni est encore op�rateur avec 49 % de participation sur les 316b, 319a et 321a dans la zone de Kerzaz. Ces champs repr�sentaient 20 % de l�ensemble de la production d�Eni en 2011 et avec la mise en service, il y a quelques semaines, du champ de Menzel Ledjmet Est et son CAFC, la production de l�Eni devrait cro�tre � des seuils qui la placent � la t�te des entreprises �trang�res op�rant en Alg�rie. A moyen terme, Eni devrait atteindre un plateau de production de l�ordre de 120 mille barils �quivalents en p�trole par jour. C�est dire que l�Alg�rie pr�sente un point strat�gique pour la compagnie italienne. Les intentions de Petroceltic Dans la manipulation des chiffres et des productions dans les associations de Berkine appara�t, du c�t� de BHP Billiton, le nom de Geoff Probert, vice-pr�sident de la compagnie australienne, charg� des investissements en Alg�rie. Apr�s 15 ans d�exercice au sein de cette compagnie, Geoff Probert vient d��tre engag� par la soci�t� irlandaise Petroceltic pour veiller � ses int�r�ts en Alg�rie. A travers son nouveau poste, cet ing�nieur aura la responsabilit� de g�rer le projet du champ de A�n Tsila qui commencera bient�t la phase d�veloppement par l�ing�nierie d�avant-projet (FEED) afin de permettre un d�but de production au cours du troisi�me trimestre de 2017. Petroceltic est l'op�rateur dans la CFP d�Isarene et d�tient une participation de 56,625 %. L�italien Enel compte une participation de 18,375 % alors que Sonatrach d�tient une participation de 25%, port�e au cours de la p�riode d'exploration et d'�valuation. La d�claration de commercialit� de cette association, r�alis�e le 8 ao�t dernier, a re�u l�approbation d�Alnaft pour une phase d�exploitation de 30 ans. Le potentiel de ce champ n�est pas n�gligeable. On estime ses ressources � 2,2 TCF (milliards de pieds cubes) de gaz, 70 millions de barils de condensats et 113 millions de barils de GPL, soit un total de 305 millions de barils �quivalents en p�trole. L�ancien responsable de BHP Billition sera donc le premier d�cideur de cette association et ne manquera pas d�exploiter les failles de la gestion de Sonatrach pour tirer le meilleur avantage au profit de sa nouvelle compagnie, l�irlandaise Petroceltic.