La prudence en matière de dépenses publiques, prônée par le ministre des Finances, Karim Djoudi, n'est pas reflétée dans une démarche coordonnée du gouvernement. Envers les populations du Sud notamment, la générosité gouvernementale est grande, voire imprudente par ces temps qui sentent les effets de la crise économique mondiale et une conjoncture qui voit les prix du pétrole baisser. Sofiane Aït Iflis - Alger Le Soir) - Le premier argentier du pays, qui s'est exprimé jeudi dernier, en marge de la plénière de l'Assemblée populaire nationale APN), consacrée aux questions orales des députés et aux réponses des membres de l'Exécutif, a recommandé de la prudence dans les deux budgets de fonctionnement et d'équipement. «La prudence nous oblige aujourd'hui à être beaucoup plus nuancé sur les augmentations de salaires. C'est comme dans une famille, si vous tirez trop sur la corde, vous risquez de tout perdre. Il faut être très prudent sur les salaires, parce que si on va au-delà, on met en difficulté l'avenir de nos équilibres budgétaires». C'est là une manière de préparer l'opinion à un plus que probable retour à l'austérité budgétaire. Les revalorisations salariales, concédées dans la précipitation par le gouvernement pour s'éviter les vents de la protestation dans le sillage des révoltes arabes, ont tiré vers le haut les dépenses, a expliqué Djoudi, avertissant qu'il va falloir maintenant se résoudre à des restructurations et des rattrapages. La précaution à laquelle invite le ministre des Finances est démentie continuellement par la démarche du gouvernement qui ne se résout toujours pas à être moins dépensier. Aux populations du Sud, aux jeunes chômeurs notamment qui ont manifesté à plusieurs reprises, le gouvernement ouvre la manne sans compter : des projets à taux bonifiés, pour ne pas dire sans intérêts, des recrutements tous azimuts et des projets de réalisations d'infrastructures et des équipements décidés à une vitesse déconcertante. A lui seul, le corps de la police a décidé de recruter près de 12 000 jeunes, entre policiers et agents assimilés, rien que dans les wilayas du Sud. Autrement dit, ce sont 12 000 postes budgétaires non prévus à créer. Une démarche qui ne semble donc pas cadrer avec la prudence à laquelle appelle Djoudi. Si le ministre des Finances anticipe une conjoncture financière difficile et prépare à l'austérité budgétaire, le Premier ministre, lui, réagit et dépense pour faire face à la contingence politique immédiate. Evidemment, l'attitude du gouvernement vide de sens la prudence budgétaire clamée par Djoudi.