De notre envoyé spécial dans les territoires sahraouis libérés, Tarek Hafid Le Front Polisario a célébré, le 20 mai 2013, la quarantième année du déclenchement de la lutte armée contre l'occupant espagnol. Vingt-deux ans après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, l'armée populaire de libération sahraouie se dit prête à reprendre la guerre pour libérer la totalité des territoires du Sahara Occidental. El Khanga, dimanche 20 mai 1973. C'est dans cette petite localité du nord du Sahara Occidental qu'un groupe de jeunes combattants sahraouis a mené la première opération militaire du Front populaire de libération de la Saguia el Hamra et du Rio de Oro. Les dix-sept guérilleros ont pris, sans tirer une seule balle, un poste de l'armée espagnole. A travers cette opération, ils venaient de mettre en application une des principales résolutions du Front Polisario créé dix jours auparavant à Zouerate, en Mauritanie. En l'espace de quelques mois, le petit groupe sera rejoint par des centaines de combattants. Nombre d'entre eux désertent, avec armes et bagages, l'armée de Franco. Affaiblie par des défaites en série, l'Espagne est contrainte d'accepter le principe de l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara Occidental. Un engagement qui ne sera jamais respecté puisque l'Espagne partagera, en novembre 1975, le territoire sahraoui en deux afin de l'offrir au Maroc et à la Mauritanie. Pour libérer leur pays, les Sahraouis devront engager une nouvelle guerre contre deux ennemis, leurs propres voisins. Solution légitime Tifariti, lundi 20 mai 2013. Des centaines de soldats sahraouis suivent, sous un vent glacial, le discours du président de la République arabe sahraouie démocratique. «C'est à partir des territoires libérés que l'armée sahraouie déclare à ses ennemis et à ses amis qu'elle croit encore en la paix. Mais la lutte armée est et restera une solution légitime, acceptée par les Nations-Unies, dont dispose le peuple sahraoui. Et cette voie légitime restera posée tant que la communauté internationale ne prendra pas ses responsabilités afin de permettre à notre peuple de pratiquer son droit inaliénable à l'autodétermination et à l'indépendance à travers un référendum libre, juste et intègre», déclare Mohamed Abdelaziz. Le secrétaire général du Front Polisario rappelle la justesse de la cause défendue depuis des décennies par le peuple sahraoui. «Quarante années de lutte, de résistance, de défis, de réalisations et d'acquis sont autant de preuves qui attestent de la justesse de la cause du peuple sahraoui et de la nécessité de sa victoire », a-t-il souligné. Face à lui, des hommes et des femmes engagés, las d'attendre que leur sort se décide chaque année à des milliers de kilomètres de là. Guerre d'usure Dans les territoires libérés et dans les camps, la question du retour à la lutte armée est tranchée depuis déjà très longtemps. «Les Sahraouis ont remporté toutes les guerres, contre les Espagnols et les Mauritaniens et même contre les Marocains», explique Mohamed Salem, combattant engagé à l'âge de 17 ans dans les rangs de l'ALPS. Agé aujourd'hui de 46 ans, le torse déformé par des éclats d'obus, il reste persuadé que le retour à la guerre est la seule solution qui s'offre au peuple sahraoui. «J'ai connu les affres des combats, j'ai vu mes compagnons mourir devant moi. J'ai subi des souffrances atroces suite à une blessure. Mais j'estime que la dignité est au-dessus de tout. Je veux offrir à mes enfants une autre vie, loin de l'enfer des camps de réfugiés, dans le pays de leurs ancêtres. Nous avons fait confiance aux Marocains et aux Occidentaux, mais aucun d'eux n'a respecté ses engagements. Nous avons gagné trois guerres, les Marocains nous ont finalement engagés dans un quatrième conflit depuis la signature du cessez- le-feu en 1991. Une guerre d'usure.» Aujourd'hui, Mohamed Salem se dit prêt à reprendre les armes. Son fils, lycéen à Mostaganem, lui a annoncé qu'il se battra à ses côtés. Dans la Hamada, génération après génération, les Sahraouis perpétuent le serment des 17 combattants d'El Khanga.