Quelle belle et passionnante monographie que celle que vient de signer Salim Koudil et parue aux éditions Dalimen ! L'ouvrage est consacré à Kaci, le grand bédeiste et illustrateur connu mondialement mais si peu évoqué en Algérie. Ce petit livre-là se savoure comme une BD adaptée d'un conte des Mille et Une Nuits. Le parcours de Kaci, en effet, et tel qu'il est retracé, fait penser aux voyages fantastiques de Sindbad le marin. Mais un Sindbad des temps modernes, bien réel celui-là et dont les aventures sont authentiques. Le plaisir du lecteur est donc double : en plus de le faire rêver, toutes ces séquences de vie, peu banales, lui feront sentir combien il respire la vie à son tour. Salim Koudil a réussi cette sorte d'osmose (la complicité entre le lecteur et le personnage de son récit) grâce à une écriture enlevée, des dons de conteur et un texte découpé comme le scénario d'un film ou, plutôt, d'une bande dessinée. Oui, ce serait plus juste de parler de BD, celle-ci étant un genre situé à mi-chemin entre le livre et le cinéma ou la vidéo. Avec Kaci lève le voile, le lectorat exigeant a entre les mains une monographie réalisée par un professionnel. Le travail éditorial est lui aussi œuvre de professionnels, que ce soit pour la qualité de l'impression et des illustrations que pour la savante mise en forme de cet ouvrage en deux parties (suivies de notes, repères et références en annexe). La photo de Kaci jeune, en couverture, invite déjà à ouvrir ses yeux d'enfant. La curiosité du lecteur est mise en appétit, son imagination alertée. Ce regard novateur qui s'éveille est relancé, juste après, par un dessin du Hic, puis par la préface signée du même Baba-Ahmed Hicheme. «Kaci, un nom ! un pseudonyme ! Plutôt un label... et je n'exagère nullement. Rachid Ahmed Aït-Kaci, un personnage injustement et ‘'honteusement'' méconnu en Algérie, chez nous... chez lui», écrit le Hic. Et il continue de croquer son personnage. A belles dents. Un bel hommage rendu à son aîné, ce «Kaci (...) aussi cosmopolite que ses œuvres sont universelles». Le Hic laisse surtout éclater son admiration pour celui qui, entre autres exploits, «a fait le tour du monde en moins de 80... ans !» Le lecteur, définitivement conquis, se laisse ensuite prendre par la main par Salim Koudil pour porter un regard neuf sur «ce personnage atypique au parcours incroyable», mais qu'une «ombre floue entoure». L'histoire de Kaci peut alors commencer. Comme un conte qui fait un clin d'œil à un western des années perdues : «Il était une fois dans l'Ouest. un 21 février 1942 naissait Rachid Ahmed Aït-Kaci...» C'était à Mostaganem. «Trois ans plus tard, la famille retourne au Maroc (...). C'est en terre marocaine que Rachid a (re) connu son talent pour le dessin», relève Salim Koudil. Par la suite, le futur Kaci fera d'autres escales : Alger, Sofia en Bulgarie, Paris, New York, Saint-Domingue.. Il ira un peu partout et, tout comme Ernest Hemingway, il se passionnera pour tout ce qui est la vraie vie, rencontrera des personnages à sa mesure. Surtout, il restera un homme libre. «Moi, on ne m'a jamais acheté», disait Kaci. Cette vie tumultueuse, Salim Koudil la raconte suite à une série de rencontres avec l'artiste et grand voyageur. Le quatrième face-à-face (en France), puis la cinquième rencontre à Alger (grâce au dernier Fibda) ont permis la rédaction et la publication de cet ouvrage à découvrir absolument. On ne vous dit pas plus... Hocine Tamou Salim Koudil, Kaci lève le voile, éditions Dalimen, 68 pages, 400 DA.