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L'entretien de la semaine Dr BELILET NOUHAD, Maître-assistante en gynécologie obstétrique, au soirmagazine :
«Ne pas réussir à concevoir un enfant est souvent synonyme de honte où l'accusée reste la femme»
Belilet Nouhad nous éclaire sur les différentes notions de stérilité, en particulier celle secondaire, puisque c'est d'elle qu'il s'agit dans cet entretien. Elle explique, à cet effet, qu'«on ne peut détacher la stérilité secondaire de sa dimension psychologique». Soirmagazine : Que signifie stérilité secondaire ? Belilet nouhad : Je pense qu'avant tout, il est nécessaire d'expliquer quelques notions sur la stérilité du couple destinées à l'opinion publique. Cela permettrait aux lecteurs de pouvoir faire la distinction entre différentes notions et définitions en relation avec la stérilité. Tout d'abord, la fertilité est la capacité de concevoir, de féconder, d'être fécondé à un moment donné. Il s'agit du concept d'aptitude.La fécondité est la capacité de concevoir, de féconder, d'être fécondé au cours d'une période donnée. Il s'agit du concept de résultat. La stérilité est l'impossibilité totale de concevoir, pour un homme, pour une femme ou pour un couple à un moment donné. Cela peut être réversible ou irréversible et définitif. La stérilité primaire est l'absence de grossesse après un minimum d'un an de rapports sexuels réguliers non protégés chez une femme qui n'a jamais eu de grossesse. La stérilité secondaire est l'absence de grossesse après un minimum d'un an de rapports sexuels réguliers non protégés chez une femme qui a déjà eu une ou plusieurs grossesses. Comment peut-on déduire que l'on est atteint de stérilité secondaire ? C'est lorsqu'un couple en cohabitation régulière n'utilisant aucun moyen de contraception et désireux d'une autre grossesse ne parvient pas à l'avoir au bout d'un minimum d'une année. Comment la diagnostiquer ? Le couple doit consulter un spécialiste seul habilité à établir un diagnostic après un interrogatoire soigneux et un examen clinique des deux conjoints. Ceci guidera les examens complémentaires nécessaires afin d'étayer le diagnostic de la stérilité et déterminer son origine masculine ou féminine. Les examens complémentaires sont biologiques et radiologiques, voire même chirurgicaux (cœlioscopie). Quelles sont les principales causes de cette stérilité secondaire ? Pour en donner les principales causes, je pense que le mieux est de les scinder en deux. Il y a les causes féminines : Les facteurs tubo-péritonéal, intéressant les trompes de Fallope ou le péritoine suite à des agressions soit infectieuses (MST, tuberculoses, infection du post-partum ou post-abortum), soit traumatiques (manipulation endo-utérines curetages, stérilet...), soit chirurgicales lors d'une intervention sur le pelvis (appendicectomie, kystectomie...). L'endométriose qui est une maladie invalidante souvent difficile à traiter. Les facteurs ovulatoires : les anovulations associées à une spanioménorrhée (cycle très long) ou à une aménorrhée (absence de règles) se voient dans les syndromes d'ovaires polykystiques avec excès de poids ou anovulation chez les sportives surentraînées. Elle peut être liée aussi à une ménopause précoce, ou bien aux troubles centraux par atteinte de l'axe hypotalamo-hypophysaire de cause tumorale (comme dans les adénomes à prolactine avec hyperprolactinemie) ou par insuffisance globale comme dans le cas du syndrome de Sheehan (séquelle d'une hémorragie importante lors d'un précédent accouchement). Le facteur utérin : anomalies de la cavité utérine par la présence d'un fibrome, une synéchie (adhérence de la cavité), une endométrite (infection de la couche la plus interne de l'utérus qui est l'endomètre), voire une adénomyose (qui est une endométriose de l'utérus). Le facteur cervical : c'est l'existence d'un polype, un fibrome du col, une synéchie ou encore une glaire (fluide produit par les glandes du col indispensable au transfert des spermatozoïdes au niveau de la cavité utérine) trop acide et hostile pour les spermatozoïdes. Quelques pathologies endocriniennes notamment thyroïdiennes avec perturbations hormonales. Les causes masculines : Comme pour la femme, ce sont des anomalies acquises : - comme les atteintes centrales hypotalamo hypophysaires soit tumorales primitives ou de voisinage, traumatiques, vasculaires, voire entrant dans une maladie grave et chronique. Les atteintes testiculaires : elles s'expliquent par l'absence totale de fabrication de spermatozoïdes suite à une chimiothérapie ou radiothérapie ; castration appelée anorchidie pouvant être aussi post-traumatique, infectieuse ou tumorale. Les orchites : infections virales ou bactériennes. Les varicocèles correspondent à une dilatation des veines du cordon spermatique, uni ou bilatéral. L'atteinte des voies génitales masculines par infection ou obstructions. Les troubles érectiles ou éjaculatoires (de causes neurologiques, vasculaires, métaboliques toxiques, hormonales ou médicamenteuses). Comment y remédier ? Il ne s'agit pas d'un gold standard. Le traitement se fait au cas par cas. A chaque étiologie son remède sauf dans les cas de pathologies irréversibles. Nous avons un large palier thérapeutique médicamenteux et chirurgical. Enfin, l'assistance médicale à la procréation est salvatrice dans de nombreux cas. Cependant, nous restons unanimes sur le fait que la suppression des facteurs exogènes comme les toxiques (tabac, alcool, drogues) et la régulation du poids (concernant les BMI supérieur à 25) restent nécessaires dans la prise en charge de la stérilité. Y a-t-il des statistiques relatives à la stérilité secondaire ? L'infertilité secondaire concerne plus l'homme ou la femme ? Il semblerait que la prévalence chez les femmes reste plus élevée, de l'ordre de 33% (les troubles ovulatoires et anomalies tubaires sont les plus fréquents de l'ordre de 35%). Elle est de 21% chez l'homme. Cependant, l'origine mixte est de 39%. Quel est le rôle du psychique ou du moral sur la stérilité secondaire ? Le couple, algérien notamment, sort-il indemne d'une telle expérience ? Il est à retenir que des causes supra-hypothalamiques psychogènes et nutritionnelles influent négativement et peuvent être à l'origine de ces stérilités qu'elles soient féminines ou masculines. Il faut savoir que 7% des stérilités restent inexpliquées. Cependant, même devant une organicité du problème, nous ne pouvons détacher la stérilité secondaire de sa dimension psychologique (douleur morale, fatigue, stress...) formant ainsi un cercle vicieux. Chaque couple possède ses propres souffrances, il faut savoir l'écouter. Certains psychanalystes accusent ces souffrances d'être à l'origine de certaines difficultés de conception. Ne pas réussir à concevoir un enfant est encore trop souvent synonyme de honte vécu comme un drame où l'accusé reste unanimement la femme même si celle-ci a réussi à concevoir une ou plusieurs grossesses. Nous recevons dans nos consultations des épouses souvent seules croyant être la cause du problème. En même temps l'acceptabilité de quelques maris pour faire les bilans nécessaires au diagnostic reste difficile. Ils considèrent cela comme une atteinte à leur virilité surtout si ces derniers ont déjà enfanté.