Par Katya Kaci Il est des personnages qui marquent les siècles de leur passage et ceux qui contribuent au changement et au bien de leurs semblables sans attendre louanges et lauriers. Le docteur Sayah Abdelmalek est de ceux-là : un personnage d'exception dont l'amour de son prochain semble être l'unique raison qui donne du goût et du sens à sa vie de médecin. L'amour de sa terre natale l'y a toujours enraciné. Sayah Abdelmalek est né à Bouira en 1963, originaire et natif de cette ville que la Grande Kabylie surplombe du haut de son majestueux Djurdjura, telle une aînée aux soins pour sa protégée. Il grandît au sein aimant et protecteur d'une famille modeste. Son père était à cette époque cadre dans le milieu hospitalier, il a donc, depuis sa plus tendre enfance, baigné dans le domaine aseptisé mais aussi plein de soins et de malades des hôpitaux. Ayant ainsi germé parmi médecins et infirmiers, et admiré les soins que ces derniers prodiguaient à leurs patients, Abdelmalek, poussé par ses parents, s'est retrouvé à rêver de revêtir un jour la fameuse blouse blanche, symbole de noblesse et distinction des grands. Après avoir décroché son baccalauréat en 1982, filière mathématiques, Abdelmalek s'est inscrit en médecine et a ainsi rejoint le sentier menant droit vers l'un des métiers les plus nobles de l'humanité. L'étudiant de médecine assidu et passionné a sillonné les hôpitaux du pays, entre Alger, Sétif et Constantine, Mohammed a suivi ses formations à l'institut Pasteur et dans les CHU de Sétif et Aïn Naâdja pour enfin se spécialiser dans la spécialité de biologie clinique. Le bagage bien garni et le diplôme en poche, retrouver sa terre natale fut d'une limpide évidence. Abdelmalek s'est donc naturellement réinstallé chez lui prenant les rênes de sa vie pour un parcours désormais dédié à la cause humaine et au bien-être des autres. Il a dès lors rempli la fonction de chef de service au niveau du Centre de transfusion sanguine (CTS) et des laboratoires à l'Hôpital central de Bouira, et c'est à cette époque-là qu'il prit contact avec le comité de donneurs de sang, présidé alors par le docteur Belkacemi, qui fut de ce fait la figure de proue dans le parcours futur ce cet activiste de la cause. Cette étape coïncidait avec la décennie noire qui a touché l'Algérie, et dix années de ténèbres eurent raison du comité des donneurs de sang, comme une dissonance. Alors que le peuple mourrait sous les balles et que les effusions de sang étaient devenues légion, le don de sang, dans le contexte médical, s'est vu menacé et les comités locaux se sont vu, dans l'obligation vitale, de cesser leur activité. En 1997, et voyant la nécessité de promouvoir ce don de soi, le docteur Sayah a voulu relancer ce comité mais n'en a pas eu encore tout le loisir. Ne lâchant pas pourtant prise face à ce qu'il considère encore comme une cause humanitaire incontournable, et sept années après la première tentative, le biologiste défenseur du don de sang a réussi non seulement à relancer de façon florissante l'activité du comité local des donneurs de sang, mais en a également pris les rênes pour en faire, par la suite, un exemple de réussite cité par les plus grandes instances internationales. C'étaient les débuts grandissants du comité des donneurs de sang de Bouira. La remise sur les rails du comité des donneurs de sang de Bouira a nécessité une équipe fraîchement constituée dont les membres devaient impérativement faire preuve de fiabilité et de crédibilité, et ce, en raison des desseins toujours grandissants du nouveau président. Ainsi, l'équipe fut constituée par, entre autres personnages-clés, Saïd Bouakil, Sliman Habel, Ouchen Hocine, qui se sont ainsi établis en équipe de choc, prêts à redonner et arracher encore davantage ses titres de noblesse à la cause humanitaire du don de sang. Au vu des précédentes tentatives, conventionnelles et peu efficaces de la promotion du don de sang auprès d'une population meurtrie par les stigmates pas encore cicatrisés de la violence, l'équipe du docteur Sayeh a tôt fait de revoir ses copies en tentant de conquérir les cœurs et les consciences de manière plus pénétrante et surtout plus concluante et visèrent ainsi une nouvelle tranche de citoyens ; les jeunes et les sportifs. En sportifs accomplis et convaincus que les enfants et les jeunes représentaient les meilleurs alliés de leur cause, le docteur Sayah et ses collaborateurs se lancèrent ainsi dans l'organisation d'événements culturels et sportifs pour la promotion de leur cause. Des concours de dessin autour du thème du don de sang furent lancés à travers différents établissements scolaires sur tout le territoire de la wilaya et portèrent leurs fruits auprès des enfants considérés comme de potentiels futurs donneurs, mais aussi auprès des parents à qui ces enfants font prendre conscience de l'importance de ce geste. Par ailleurs, la première édition du semi-marathon des donneurs de sang de Bouira a vu le jour en avril 2004, et a de suite conquis les habitants de la wilaya et des wilayas voisines, notamment les sportifs en manque d'opportunités du genre. Cette course, d'une vingtaine de kilomètres entre Bouira et Aïn Bessem, a tout de suite eu un franc succès et vu la participation de quelques six cents participants, venus de Bouira, Béjaïa, Tizi-Ouzou, Alger et Boumerdès. Le semi-marathon des donneurs de sang de Bouira a, par la suite, été homologué par la Fédération internationale d'athlétisme, et a, de ce fait, réussi à entrer dans l'agenda officiel des événements sportifs avec comme adjectif épithète, la cause humanitaire du don de sang. Cinq années de semi-marathon, devenu maintenant un événement national, ont porté de beaux fruits, surtout auprès des autorités locales qui ont soutenu de plus en plus les organisateurs de l'événement, même si, du point de vue financier, le semi-marathon se faisait encore avec les moyens personnels des membres du comité. Et en 2009, la renommée et le succès aidant, le semi-marathon des donneurs de sang de Bouira est devenu un événement international et ainsi l'hôte d'athlètes de renom venus du Maroc, de Tunisie et des pays d'Afrique noire afin d'honorer cette course pour la vie. Le don de sang étant à son apogée grâce aux initiatives de cette équipe de choc, Bouira est devenue l'une des rares wilayas à disposer d'une banque du sang humaine, faite de ces milliers de citoyens et de citoyennes, réunis autours du sport pour le salut de ce don si intime et tout aussi vital.