Le médecin généraliste a incontestablement un rôle très important à jouer dans le système de santé publique en Algérie, et bien sûr aux côtés des praticiens spécialistes. Puisque c'est lui qui est, en principe, le premier à être consulté si des symptômes inquiètent le patient ou son entourage. Aujourd'hui, la réalité est tout autre, les malades sont nombreux à vouloir consulter directement un médecin spécialiste. Ces attitudes peuvent bouleverser leur prise en charge et pourraient être désormais considérées comme un préjudice moral et financier pour le praticien généraliste. Des patients témoignent. Farouk, 47 ans «Au début de l'hiver 2009, j'ai consulté un médecin généraliste en ville suite à une douleur thoracique, il m'a demandé d'emblée un scanner. Après lecture du compte rendu, ce praticien m'a bien préparé pour m'informer et avec précaution que cet examen complémentaire révèle une image suspecte et qu'il pourrait probablement s'agir d'un lymphome, une affection maligne du sang. J'avais alors 43 ans, marié, deux garçons et une fille, sans emploi stable. Ce médecin généraliste m'a rassuré en m'affirmant qu'il allait m'orienter immédiatement vers un hématologue. Ce dernier était très content de m'avoir reçu à temps et m'a assuré que le pronostic n'est pas aussi mauvais que je l'imaginais. Il m'a expliqué en détails les différentes étapes de la conduite à tenir et les attitudes thérapeutiques préconisées devant mon cas ainsi que les résultats espérés. Aujourd'hui tous les examens ont confirmé ma rémission. Je serais éternellement reconnaissant envers toutes les équipes médicales qui m'ont pris en charge comme il se doit, et plus particulièrement ce médecin généraliste qui a eu le réflexe de me demander en première intention un scanner, en suspectant chez moi un problème sérieux. Je dirais enfin, soyons attentifs à respecter les étapes et la hiérarchie de notre système de santé. Je souhaite à toutes et tous qui liront ce témoignage de prendre mon cas comme exemple. Le fait d'avoir consulté en premier lieu un médecin généraliste, m'a permis de sortir vainqueur d'un combat contre le cancer, cette maladie qui fait toujours peur.» Embarka, 64 ans, retraitée de l'éducation Très émue, et retenant difficilement ses larmes en se remémorant le bon vieux temps où «le médecin de famille était si cher au cœur de toutes les familles. On avait dans le temps deux médecins généralistes qui s'occupaient de toutes les familles de notre région à Guelma et ses environs. Il y avait le docteur Pancrazi, un Français d'origine italienne et le docteur H'mimed, appelé communément T'bib Laarbi. Ces deux praticiens occupaient les premiers rangs de la société, et leur titre de médecin était très valorisant. Aujourd'hui, c'est l'anarchie totale dans la chaîne de soins et en plus les patients sont rarement satisfaits. A mon avis, il devient urgent de protéger la fonction du médecin généraliste dans notre pays, si l'on ne veut pas qu'elle disparaisse purement et simplement du système de santé publique. Malheureusement, on assiste à la mort programmée du médecin de famille qui est forcément un médecin généraliste. Les malades oscillent entre les praticiens spécialistes du secteur public, des médecins-fonctionnaires, le plus souvent aux abonnés absents et une médecine payante aux tarifs exorbitants. Franchement, s'agit là d'un constat amer, qui pénalise fortement le patient et son entourage.» Mohamed, 75 ans, malade aux antécédents d'origine cardiovasculaire L'attaque cardiaque dont il a été victime il y a presque une année lui a fait prendre conscience de l'importance d'une prise en charge médicale dans les plus brefs délais. «Le temps est un facteur-clef, notamment en cas d'accident cardiaque. En ce qui me concerne, je ne dois mon salut qu'à l'intervention de mon médecin de famille, une praticienne généraliste. Quand j'ai eu mon infarctus, j'étais seul chez moi, Dieu merci j'ai pu reprendre conscience le temps de faire appel à ce médecin qui savait que j'avais des antécédents familiaux. Elle a rapidement appelé les secouristes de la Protection civile. Ces derniers m'ont évacué de chez moi au pavillon des urgences de l'hôpital ; franchement, ça été une dure journée, Dieu merci je suis toujours en vie. Sincèrement, je suis un véritable rescapé. Mais je tiens à lancer un appel à tous les sujets à risque de choisir un médecin généraliste traitant pour remplir soigneusement leur fiche de renseignements, afin de pouvoir bénéficier de cette intervention de première urgence, au bon moment, et gagner donc un temps précieux. Enfin, je pense qu'il est important que les gens prennent conscience que la prise en charge d'un malade est un tout indissociable et lorsqu'un des chaînons de la chaîne est brisé, c'est tout le système de santé qui est chamboulé.»