La baisse des prix du pétrole devrait s'accélérer en 2016, prévoit le professeur d'économie, Ali Boukrami. L'émission d'emprunts obligataires par les entreprises devrait reprendre fortement à court terme. Chérif Bennaceur - Alger (Soir) Intervenant, hier, à l'hôtel El Aurassi lors du premier colloque scientifique de la Commission d'organisation et de surveillance des opérations de bourse (Cosob), le professeur d'économie et ancien secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Prospective et de la Statistique, Ali Boukrami, a lancé un appel à la vigilance en matière de gestion des finances publiques. Mettant en avant «la dispersion dans la reprise» (économique) dans le monde, Ali Boukrami a ainsi noté des signes de relance probants aux Etats-Unis. Or, dans la mesure où les taux de change de la monnaie américaine ont toujours évolué de manière contraire aux cours du pétrole, le professeur d'économie estimera que la situation ne changera pas à court terme. En ce sens, l'intervenant relèvera que les taux d'intérêt aux Etats-Unis devraient croître à 1% en 2015 et à 2% en 2016. Ce qui couplé à l'effet de l'exploitation des gaz de schiste, induira une forte appréciation du dollar. Par conséquent, l'augmentation des taux d'intérêts induira, dira-t-il, le fait que «la baisse des prix du pétrole va s'accélérer», notant en ce sens que l'or noir a déjà subi ces derniers temps une diminution de 12 dollars par baril. Certes, Ali Boukrami observe que «l'Algérie s'est toujours méfiée des turbulences» financières internationales, en prônant « la stabilité». Une politique qui a «le mérite» d'être, une forme de «sagesse» que l'ancien secrétaire d'Etat louera, tout en indiquant que le mode de gestion de financement économique «n'est pas soutenable à terme». A ce titre, il fera état d'un financement public basé sur des concours définitifs du Trésor, un «financement à fonds perdus», marqué par une allocation des ressources loin d'être optimale. Mais aussi d'évoquer les dépenses et transferts sociaux qui représentent «le tiers» du Produit intérieur brut (PIB), couplés à l'octroi de «subventions latentes» en matière d'énergie mais dont la répartition est assez inégalitaire, disparate selon les catégories sociales. Certes, l'excédent structurel des liquidités «est bien géré», de manière «judicieuse» par la Banque d'Algérie dans le cadre de la politique monétaire et de maîtrise de l'inflation, note Ali Boukrami. Néanmoins, il s'agit de «faire attention», notamment en termes d'attractivité des placements bancaires et choix d'investissements par voie budgétaire, avertit l'économiste qui en appellera à développer la transparence qui est «synonyme de gouvernance», à «élargir le consensus» en associant et en «écoutant» les véritables entrepreneurs. L'opportunité d'appeler à développer le financement économique à d'autres segments alternatifs au concours budgétaire ou bancaire, par le biais du marché financier national dont la dynamisation est en cours. Il s'agit ainsi du renforcement de l'alimentation en titres de capital (action) de la Bourse d'Alger, notamment par le biais de l'ouverture du capital des entreprises publiques ou l'introduction d'entreprise privées. Certes, une dynamique de privatisation partielle par voie de bourse de 8 entreprises publiques (Mobilis, le CPA, Cosider Carrières, trois cimenteries du groupe public GICA, la CAAR et Hydro-Aménagement), portant sur la cession d'au moins 20% des actions, a été avalisée par les pouvoirs publics. Une introduction qui est en bonne voie, assurera le président de la Cosob, Abdelhakim Berrah, en marge de ce colloque dont l'intitulé porte sur l'introduction en bourse ; gouvernance et transparence : quel enjeux ?». Cela même aucune des entreprises publiques concernées n'a encore déposé de dossier au niveau de la Cosob, dans la mesure où la finalisation des processus liés à l'évaluation financière, la fixation des paramètres de cotation, le choix des intermédiaires et l'obtention de l'aval des organes et instances dirigeantes et autres préparatifs diffèrent, selon les entreprises, certaines étant bien avancées et d'autres non. C'est également le cas pour nombre d'entreprises privées, intéressées par leur introduction en bourse mais qui restent encore au stade de la préparation, de la quête de l'information, d'une meilleure conviction. Et ce, d'autant que l'introduction durant ces deux dernières années de deux compagnies privées (Alliance Assurances et NCA Rouiba) a été, certes, encourageante mais encore insuffisante pour booster la Bourse d'Alger. En attendant donc l'augmentation des titres de capital cotés, la bourse d'Algérie verra entre-temps son compartiment obligataire (titres créances) s'élargir. En effet, plusieurs entreprises publiques d'envergure, et même des institutions financières et fonds publics de premier ordre devraient lancer des emprunts obligataires, s'endetter auprès du marché financier pour assurer leurs programmes d'investissements et de développement. Un intérêt pour le segment obligataire que deux entreprises privées au moins affichent également. Escomptée pour les prochains mois, la concrétisation de cet intérêt tant public que privé permettra de consolider davantage le compartiment obligataire, jadis considéré comme une alternative fiable mais qui a pâti ces dernières années d'une certaine désaffection des opérateurs économiques. Ainsi, l'encours du marché obligataire qui a baissé à quelque 32,4 milliards de dinars actuellement devrait à court terme quadrupler, voire quintupler. Et ce, dans le contexte où le retour à l'orthodoxie financière, la prudence, l'optimisation des choix d'investissements et de financements constituent des incontournables pour l'Algérie.