Par Kader Bakou On ne compte plus, aujourd'hui, les «j'accuse». «J'accuse... !» est le titre d'un article rédigé par Emile Zola au sujet de l'affaire Dreyfus et publié dans le journal L'Aurore du 13 janvier 1898, sous la forme d'une lettre ouverte au président de la République française, Félix Faure. C'est l'un des articles de presse les plus connus au monde. Aujourd'hui, il est considéré comme une œuvre à la fois artistique et littéraire. Le «J'accuse...!» de Zola est aussi cité comme un exemple de «l'engagement intellectuel pour une cause juste» et du coup d'éclat médiatique qui bouleverse l'ordre établi et permet la concrétisation d'une action politique. Après la lettre de Zola défendant Alfred Dreyfus, officier français accusé à tort d'avoir livré des documents à l'Allemagne, et condamné à l'emprisonnement à perpétuité sur l'île du Diable, en Guyane française, nombreux ont été ceux qui, devant une erreur, une injustice, une cause à dénoncer, ont écrit leur «J'accuse...!». Dès la fin du XIXe siècle, la dénonciation d'un fait social par l'usage d'un média écrit est souvent un «J'accuse...!». La chanson a aussi ses «J'accuse». Sortie en 1976 dans l'album La Vieille, J'accuse est une chanson de Michel Sardou. Le chanteur français ne l'a pas l'interprétée sur scène pendant plus de dix ans, avant de la réintégrer dans ses concerts depuis 1991 tout en ayant modifié deux vers considérés comme «homophobes». Sardou dit (entre autres) : «J'accuse les hommes de salir les torrents, D'empoisonner le sable des enfants, De névroser l'âme des pauvres gens, De nécroser le fond des océans. J'accuse les hommes de violer les étoiles Pour faire bander le cap Canaveral, De se repaître de sexe et de sang Pour oublier qu'ils sont des impuissants. De rassembler les génies du néant, De pétroler l'aile des goélands, D'atomiser le peu d'air qu'ils respirent, De s'enfumer pour moins se voir mourir. J'accuse les hommes de crimes sans pardon Au nom d'un homme ou d'une religion. J'accuse les hommes. Je veux qu'on les condamne Au maximum, qu'on arrache leur âme Et qu'on la jette aux rats et aux cochons Pour voir comment eux ils s'en serviront. J'accuse les hommes, en un mot comme en cent, J'accuse les hommes d'être bêtes et méchants, Bêtes à marcher au pas des régiments, de n'être pas des hommes tout simplement». En 2010, le rocker français Damien Saez a publié l'album et la chanson J'accuse dans laquelle il dit, notamment : «Des OGM dans les biberons, Ouais c'est tant mieux ça f'ra moins con, Quand ils crèveront en mutation, Des grippes porcines sur des cochons, Oh non l'homme descend pas du singe, Il descend plutôt du mouton, Faut ressembler à des guignols, Faut passer à la télé, Faut rentrer dans les farandoles De ceux qui font le blé...» Alors que faire, cher Saez ? «Il faut foutre le portable aux chiottes, Et des coups de pioche dans la télé, Faut mettre les menottes A chaque présentateur du JT... J'accuse ! Au mégaphone dans l'assemblée ! J'accuse ! J'accuse ! J'accuse ! Au mégaphone dans l'assemblée !» Pour revenir a la lettre de l'écrivain et journaliste français, le manuscrit original de «J'accuse» est racheté, en 1991, aux descendants de Zola 5 millions de francs avec la participation du Fonds du patrimoine du ministère français de la Culture. Il est désormais conservé dans un coffre-fort au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France. Le plus célèbre et le plus précieux «J'accuse» est toujours le premier ! K. B.