La problématique de la détention préventive est de nouveau au centre d'un large débat. Hier, elle a été évoquée par le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini. Sur les ondes de la Radio Chaîne III, il a fait état d'un chiffre effarant. «Sur les 55 000 personnes formant la population carcérale, 20.000 d'entre elles sont en détention préventive.» Abder Bettache - Alger (Le Soir) Invité à s'exprimer sur les questions des droits de l'Homme en Algérie, notamment la problématique de l'application ou l'abrogation de la peine capitale, le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme a longuement commenté la problématique de la détention préventive et sa relation directe avec la question du respect des droits de l'Homme en Algérie. Le président de la CNCPPDH a rappelé que la détention préventive a donné lieu à «une industrie de mandats de dépôt». Et en guise d'exemple, l'invité de la Radio Chaîne III a avancé le chiffre de 20 000 personnes actuellement en détention préventive sur les 55 000 formant actuellement la population carcérale. Farouk Ksentini est resté égal à lui-même en réitérant les propos déjà tenus il y a peu de temps sur la problématique de la détention préventive. «Les textes sur la détention préventive sont d'une réalité éblouissante, mais ne sont pas appliqués. On applique le contraire de ce que disent les textes, c'est incroyable, terrible et inadmissible», s'est-il exclamé. Et d'ajouter : «Les textes sont très bons, il faut que les choses reviennent à la normale, le ministre actuel de la Justice qui fait un excellent travail doit décider d'une politique pénale que les magistrats doivent suivre», a encore relevé M. Ksentini pour qui les textes sont d'une modernité incroyable, malheureusement leur application est totalement déficiente. On applique le contraire de ce que disent les textes. Plaidoirie pour l'abolition de la peine capitale Sur un autre plan, M. Ksentini a procédé à un véritable plaidoyer au sujet de l'abrogation de la peine de mort. Selon lui, le débat est de nouveau relancé «à la demande de la Commission des droits de l'Homme des Nations unies». Il s'agit, a-t-il poursuivi, d'ouvrir des discussions sur ce sujet avec toutes les sensibilités du pays, «pour savoir s'il faut, ou non, abolir la peine de mort». A propos des avis contradictoires concernant cette question, l'invité de la Radio a déclaré qu'il s'agit là d'un «débat classique» où «des défenseurs de l'application de la peine de mort peuvent devenir ceux qui demandent son abolition et vice versa». M. Ksentini affirme, ensuite, que l'opinion publique «dans sa grande majorité» est contre la peine de mort sans, cependant, faire état des positions qui tendraient à confirmer cette tendance. Il a considéré que «si nous pouvons abolir d'un trait» la peine de mort, il faudra, cependant, la «laisser subsister pour les cas d'homicides volontaires, pour satisfaire aux vœux des croyants, vis-à-vis d'une disposition coranique, à laquelle il est hors de question de déroger». Citant le droit pénal algérien, le président de la Commission consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme rappelle que celui-ci fait état de 17 crimes qui sont passibles de la peine de mort. «Si nous en éliminons 16, il n'en restera, poursuit-il, qu'un seul : celui de l'homicide volontaire, et cela constituera un progrès.» Par ailleurs, la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme a évoqué la question de la dépénalisation de l'acte de gestion, prônant la levée définitive de cette épée de Damoclès suspendue sur la tête des gestionnaires. «Il est impératif de régler cette question pour redonner du souffle à l'économie nationale», a-t-il préconisé. Enfin, l'autre thème évoqué par Farouk Ksentini a trait au nombre de dossiers actuellement en étude au niveau de la Cour suprême. Selon lui, près de 230 000 dossiers sont actuellement en étude au niveau de cette magistrature suprême, d'où son appel pour renforcer l'institution judiciaire en moyens humains et matériels.