Le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci, n'écarte pas la probabilité d'un fort choc externe en 2015. Face à cette éventualité, l'autorité bancaire compte renforcer davantage le contrôle du commerce extérieur et des changes. Cherif Bennaceur - Alger (Le Soir) La Banque d'Algérie maintient l'alerte sur la vulnérabilité de la balance des paiements et des finances publiques à la baisse poursuivie des prix du pétrole, le risque pour l'économie de subir un choc externe. Une probabilité d'un choc externe d'une certaine acuité que le gouverneur de l'Autorité monétaire n'écarte pas pour 2015. Ainsi, Mohamed Laksaci qui a réuni jeudi dernier les dirigeants des banques et établissements financiers a évoqué cette probabilité. Des effets négatifs sur l'économie attendus En effet, le gouverneur estime que l'Algérie, à l'instar des autres pays exportateurs de pétrole, subit le choc que connaissent les prix du baril à travers ses effets sur la balance des paiements et les finances publiques. Les pays exportateurs de pétrole, selon M. Laksaci, devraient enregistrer une détérioration des soldes des comptes courants de leur balance de paiements ainsi qu'une contraction de leur marge de manœuvre budgétaire, alors que les prix d'équilibre budgétaire sont souvent élevés. Ainsi, cette situation pourrait induire des effets négatifs sur les taux de croissance économique dans ces pays, considère le gouverneur de l'autorité tout en constatant que dans plusieurs pays exportateurs de pétrole, le niveau élevé du prix d'équilibre budgétaire témoigne de l'acuité de la vulnérabilité des finances publiques à la baisse tendancielle du prix du pétrole. L'impact a pu être atténué... Certes, Mohamed Laksaci atténuera sa mise en garde. Il relèvera en effet que l'impact du choc sur la balance des paiements et les finances publiques de l'Algérie a été atténué au 3e trimestre 2014, avec un prix moyen du baril de pétrole de 106,65 dollars sur les trois premiers trimestres de la même année. Comme il précisera que le niveau des réserves de changes de 185,273 milliards de dollars atteint à fin septembre 2014 reste adéquat pour permettre à l'Algérie de faire face au choc externe, tandis que l'encours historiquement bas de la dette extérieure de 3,666 milliards de dollars à fin septembre 2014 concourt à la solidité de la position financière extérieure nette. De surcroît, a-t-il ajouté, le très faible endettement en devises des entreprises du secteur des hydrocarbures et des banques contribuera à limiter les conséquences financières du choc externe. Pour autant, la capacité de l'Algérie à contrecarrer ce choc s'avère assez incertaine, semble-t-on considérer. Mais le risque de volatilité financière perdure D'où la nécessité de bien gérer ce risque et de minimiser le risque de volatilité financière qu'il induit, le gouverneur de la Banque d'Algérie adressant une invite en ce sens à l'adresse notamment de l'establishment bancaire et financier. Ainsi, Mohamed Laksaci assure que «vu l'acuité probable du choc externe en 2015, il est attendu des banques le strict respect de leurs obligations, en tant qu'intermédiaires agréés, au titre des opérations de commerce extérieur et de change, dans le cadre de la convertibilité courante du dinar». Le contrôle des changes sera renforcé Au-delà de l'appréciation négative sur l'engagement bancaire à prévenir toute volatilité, un engagement insuffisant et assez laxiste, laisse-t-on entendre, le gouverneur de la Banque d'Algérie indique en fait que l'autorité monétaire et bancaire compte renforcer davantage le contrôle du commerce extérieur et des changes. La Banque centrale, indique Mohamed Laksaci, veillera au respect par les banques de la nouvelle réglementation prudentielle, en renforçant le contrôle des changes sur pièces et sur place. Relevons que cette nouvelle réglementation concerne notamment le ratio engagements par signature rapportés aux fonds propres qui a été ramené de 4 à 2 depuis le 1er décembre 2014. Ce qui vise «à contenir les risques liés à l'implication des banques dans le financement des importations dès 2015, afin de contribuer à préserver un niveau approprié de stabilité financière en Algérie face à un environnement économique mondial porteur de risques à la hausse». A ce titre, les services de la Banque d'Algérie s'attacheront au cours de l'année 2015, assure Mohamed Laksaci, à «accentuer la cadence des missions de contrôle» sur place auprès des banques et intermédiaires agréés, dédiées à la «vérification des dossiers de domiciliation des transactions courantes avec l'étranger». Lutte accrue contre la fuite des capitaux En outre, avance le gouverneur qui évoque le renforcement de la lutte contre la fuite des capitaux, un accent particulier sera mis sur «les activités et les opérations d'importation à risque», c'est-à-dire, celles réalisées à partir de certains pays dont les systèmes fiscal, douanier et anti blanchiment sont notoirement réputés pour leur laxisme et tolérance. Plus encore, la Banque d'Algérie procédera à une «évaluation approfondie» des dispositifs de contrôle interne des banques et intermédiaires agréés. Ce qui permettra de s'assurer de la conformité des procédures internes des banques en matière de traitement des opérations aux prescriptions réglementaires en vigueur, de la mise en place d'un cadre organisationnel adapté et de la disponibilité des moyens humains et matériels leur permettant d'assurer, dans les meilleures conditions, la réalisation des opérations. Réserves de changes L'Algérie a perdu près de 9 milliards de dollars Les réserves de changes officielles se sont rétractées en neuf mois de près de 9 milliards de dollars (8,727 milliards de dollars exactement). Durant le premier semestre 2014, les réserves de changes se sont contractées de 0,731 milliard de dollars, passant de 194 milliards à fin décembre 2013 à 193,269 à fin juin 2014. Mais durant les trois mois suivants, les réserves se sont fortement contractées, indique la Banque d'Algérie. En effet, elles sont passées de 193,269 à la fin du premier semestre à 185,273 milliards de dollars à la fin septembre 2014, soit une diminution de 7,996 milliards de dollars. Pour autant, Mohamed Laksaci a considéré ce niveau des réserves de changes d'«adéquat permettant à l'Algérie de faire face au choc externe, d'autant que l'encours historiquement bas de la dette extérieure (3,666 milliards de dollars à fin septembre 2014) concourt à la solidité de la position financière extérieure nette». Comme l'on a également fait savoir, «le très faible endettement en devises des entreprises du secteur des hydrocarbures et des banques de la place contribuera à limiter les conséquences financières du choc externe».