La vulnérabilité de l'économie nationale risque de s'accroître. C'est l'avertissement, un autre, que le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci, a clairement lancé hier devant les membres de l'Assemblée populaire nationale (APN), dans le contexte actuel de baisse des prix du pétrole. Chérif Bennaceur - Alger (Le Soir) Intervenant à l'occasion de la présentation de la conjoncture économique et monétaire de l'année 2013 et du premier semestre 2014, Mohamed Laksaci estime que «la capacité de résistance (résilience) face aux chocs pourra s'éroder rapidement si les prix du baril restent à des niveaux bas pendant une longue période». Ayant auparavant observé la «fragilité» de l'économie par rapport à sa dépendance au secteur des hydrocarbures et des prix du pétrole, notant le «déclin» de ce secteur «malgré les efforts d'investissements», le gouverneur de la Banque d'Algérie estimera, certes tacitement, que les atouts dont dispose l'économie ne pourraient servir longtemps d'amortisseurs, comme mis en avant dans la rhétorique gouvernementale. En notant, entre autres atouts, des réserves de change de 193,269 milliards de dollars à la fin juin 2014 contre 194 milliards de dollars à fin 2013, permettant de couvrir plus de 30 mois d'importation, ainsi qu'un endettement extérieur quasi nul (3,719 milliards de dollars à la fin juin 2014 contre 3,396 milliards de dollars à la fin décembre 2013). Ceci en outre d'un faible endettement public, une croissance de l'engagement bancaire dans le financement de l'économie, notamment privée... Or, dans la mesure où les importations de marchandises, spécifiquement les biens d'équipements industriels et produits semi-finis, ainsi que des services notamment techniques et ceux liés aux travaux publics ont poursuivi leur tendance haussière, les exportations d'hydrocarbures étaient en recul tant quantitativement qu'en valeur et que les déficits de la balance commerciale, de la balance des paiements sont assez importants, accentués, les nombreux chiffres présentés par Mohamed Laksaci en faisant preuve, la vulnérabilité de l'économie nationale ne pourrait que s'accroître., voire, le matelas financier constitué durant la décade écoulée est menacé de s'effilocher, les disponibilités du Fonds de régulation des recettes (plus de 4 700 milliards de dinars à fin juin 2014 contre plus de 5 200 milliards de dinars à fin 2013), partiellement utilisées pour la résorption du déficit budgétaire d'équipements dans un contexte d'expansion des dépenses de fonctionnement, ne pouvant à terme perdurer. Même si le ton de son discours s'est voulu neutre, le gouverneur de la Banque d'Algérie a néanmoins invoqué la nécessité de préserver la position financière extérieure du pays, encore bonne mais fragile, de poursuivre la gestion prudente des réserves de change. De même qu'il aura insisté sur l'opportunité de consolider l'efficience des dépenses d'investissemements publics dans la génération de croissance hors hydrocarbures. D'autres indicateurs financiers et monétaires dont la dépréciation du dinar par rapport à l'euro et une inflation minime ont été communiqués par Mohamed Laksaci, au-delà des considérants avancés concernant la supervision et le contrôle bancaires... A l'issue de l'intervention du gouverneur, la latitude a été donnée à une soixantaine de députés d'intervenir, en réagissant essentiellement sur la situation économique actuelle, le rôle de la Banque d'Algérie, la question de l'allocation touristique et l'informel. Des interventions plus ou moins pertinentes qui ont duré des heures, la réponse du gouverneur étant attendue en fin de journée. La gestion des réserves de change a été assez fructueuse Répondant, hier en fin d'après-midi, aux préoccupations des députés, le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci a estimé que la gestion des réserves de change a été assez fructueuse. Ainsi, il fera état d'un rendement de 3,15 milliards de dollars et d'un taux de rentabilité de 1,66%, dans un contexte de taux d'intérêts relativement faibles dans les places internationales, et cela, même si le gouverneur de la Banque d'Algérie rappellera la politique de gestion prudente, sécurisée et optimisée des réserves de change. Par ailleurs, Mohamed Laksaci a indiqué que l'autorité monétaire procédera dès le début 2015 à la révision du cadre réglementaire régissant les bureaux de change et à l'agrément de nouveaux intervenants. En outre, il évoquera un projet de modernisation complet des systèmes de paiement en cours, dès février prochain. Ce faisant, le gouverneur s'est montré moins critique concernant la situation actuelle, arguant que les «signes précurseurs» d'un choc externe sont, certes, avérés mais que l'économie algérienne dispose cependant d'une capacité de financement encore soutenue, d'une marge de manoeuvre appréciable, au regard des atouts qu'il évoquait auparavant, et qu'il s'agit de «ne pas noircir» la situation en termes de stabilité financière. Invitant par ailleurs, les banques à se refinancer auprès de la Banque centrale, Mohamed Laksaci indique que l'autorité monétaire pourra, dès l'année prochaine, injecter des liquidités dans l'économie au lieu de les absorber.