Entamée féériquement le 15 de ce mois, cette présente édition du Mondial messieurs de handball s'achèvera ce soir avec la grande et inédite finale qui opposera l'inattendu Qatar à la redoutable France. Cette confrontation aura pour cadre la somptueuse et ultramoderne salle de Lusail Sport Arena. Et dire que cette affiche était impensable, il y a quatre années, en janvier 2011, lorsque ce petit émirat obtint l'organisation de ce 24e Mondial après un surprenant vote favorable qui a pour cadre l'hôtel de Malmö en Suède. Donc rare était, en ce temps-là, la personne qui prédisait ce résultat puisque l'émirat ne possédait aucune équipe nationale susceptible d'avoir un tel parcours. Il devient ainsi le premier pays non européen à disputer une finale de Championnat du monde. A un degré moindre, seules l'Egypte (5e) et la Tunisie (4e) s'en étaient rapprochées... A comparer ces deux ensembles, il y a un vrai déséquilibre entre eux et personne ne pourra contredire cette sentence. D'un côté, la France a un éloquent palmarès avec 6 finales gagnées, à savoir les quatre Mondiaux de 1995 en Islande, 2001 en France, 2009 en Croatie et 2011 en Suède ainsi que les deux tournois olympiques de 2008 et 2012. Par contre, le Qatar a un palmarès vierge au niveau mondial où sa meilleure place était la 16e place au Mondial 2003 au Portugal. Il n'a aucune participation aux Jeux olympiques. Ses seuls faits d'armes sont au niveau du championnat d'Asie où il a disputé et perdu les finales de 2002 et 2012. Pour pouvoir réaliser un parcours le plus réussi possible, les responsables de la Fédération qatarie de handball où le Tunisien, Abdellatif Bohli en est le Directeur technique national, soutenus conséquemment par leur émir, entament la prospection tous azimuts pour constituer une équipe nationale de qualité, sans lésiner sur les salaires faramineux pour attirer les meilleurs joueurs. D'abord, un coach est recruté et pas n'importe quel coach. Il s'agit de l'Espagnol Valero Rivera qui a mené son pays au titre mondial en 2003. Comme carte de visite, ce coach en a des plus étoffées en remportant, avec le FC Barcelone, six fois la Ligue des Champions d'Europe (1991, 1996, 1997, 1998, 1999 et 2000). Ensuite, le coach, profitant de la souplesse du règlement de la Fédération internationale de handball (IHF) qui stipule que tout joueur n'ayant pas joué avec son équipe nationale pendant trois ans peut changer de sélection nationale, établit une liste de joueurs issus des quatre coins du monde. D'ailleurs, le Qatar n'est pas le premier à avoir profité de ce règlement car avant lui, il y a eu l'Espagne (le Russe Dujshebaev et l'ex-Yougoslave Arpad Sterbik). En peu de temps, l'effectif est constitué avec des joueurs d'une mosaïque de nationalités (Bosnie, Espagne, France, Cuba, Iran, Tunisie, Syrie et Monténégro). Seuls quelques joueurs sont qataris de souche mais rien n'est sûr quant à leur nationalité d'origine. Parmi cet effectif «doré», le coach fait un recrutement intelligent en ramenant deux gardiens de buts de classe mondiale, à savoir le Bosniaque Daniel Saric et le Monténégrin Goran Stojanovic sans oublier l'Espagnol Borja Vidal, le Cubain Rafael Capote. Aussi, 8 des 16 joueurs qataris ont pu peaufiner leurs automatismes dans le même club de l'armée qatarie «El Jeich», celui de l'armée. Pour être au top, le championnat a été laissé en jachère depuis plusieurs mois pour mieux préparer le Mondial. Avant de pouvoir animer cette finale, les deux ensembles qatari et français ont connu des fortunes diverses pour franchir tous les obstacles menant à cette ultime confrontation. L'aventure «feutrée» du Qatar dans cette édition a commencé dés le tirage au sort, au Ritz Carlton de Doha, où il a bénéficié du choix du groupe à intégrer, en tant que pays organisateur. C'est toute logique que les Qataris portent leur dévolu sur la poule A. Aussi, cette «équipe-patchwork» bat le Brésil (28-23), le Chili (27-20), la Slovénie (31-29) et la Biélorussie (26-22) avant de s'incliner face au détenteur du titre mondial, en l'occurrence l'Espagne (25-28). Au tour principal avec les matches de 8es, quarts et demi-finale, le Qatar, bénéficiant de la surprenante deuxième place du Danemark, évite ce pays pour affronter un autre ensemble européen, l'Autriche qui s'incline difficilement (27-29). Puis c'est la redoutable Allemagne qui fait les frais de la détermination qatarie en se faisant sortir de la course au titre (27-29). Rien n'arrête le Qatar qui écarte la Pologne (31-29). Et maintenant, place à la France pour la grande finale. De son côté, le Sept tricolore est allé crescendo dans ses productions du tour préliminaire. En effet, la petite victoire acquise face à la République de Tchéquie (30-27) est suivie d'une autre face à l'Egypte (28-24). Ensuite, le nul subi devant l'Islande (26-26) et le succès devant Algérie (32-26) avant d'être ponctué par l'importante victoire face à la Suède (27-25) qui donne la 1re place aux Tricolores. Au tour suivant, les Français, bien rassurés par le gardien de but Thierry Omeyer, se promènent devant les Argentins (33-20), puis face aux Slovènes (32-23). En demi-finale, la France affronte l'Espagne qui accuse un retard de 4 buts en 1re mi-temps et qu'elle ne pourra rattraper s'inclinant devant plus fort (24-26). Le coach français Claude Onesta est vacciné dans ce genre de confrontation. Il doit retenir les échecs des coaches allemands, polonais et autrichiens qui ont sous-estimé les Qataris. De leur côté, les Qataris n'ont plus rien à perdre, eux qui ont dépassé tous les objectifs tracés. Il faut dire que chaque coach a ses atouts à faire valoir. Du côté français, il y a le keeper Omeyer, Karabatic, Guigou, Narcisse entre autres et en face, il y a les gardiens Saric et Goran Stojanovic, les gros bras que sont Zarko Markovic, Rafael Capote, Vidal Borja. Que penser de cette ultime confrontation ? Ce sera l'expérience des Français face à l'enthousiasme qatari. Théoriquement, les Tricolores partent favoris mais doivent évacuer tout excès de confiance.