Le devoir de m�moire n'est pas un simple slogan ou une mode passag�re en France. Pour avoir — encore ! — exprim� des points de vue qui pourraient donner � penser que l'occupation de ce pays n'�tait pas la trag�die que l'on conna�t, Jean-Marie Le Pen a soulev� une v�ritable temp�te qui n'est pas pr�s de s'att�nuer. Et si les commentateurs sont nombreux � penser que le sinistre personnage d'extr�me droite agit beaucoup plus pour faire parler de lui que pour remuer les couteaux dans la plaie de l'histoire, ils n'en expriment pas moins leur d�go�t face � des th�ses r�visionnistes qui pourraient banaliser le crime nazi et d�culpabiliser les assassins SS et leurs collaborateurs. L'unanimit� qui a marqu� cette r�action collective de la France, toutes opinions confondues, exprime bien la vigilance de la classe politique et de la soci�t� civile face � toute tentative de travestir la r�alit� historique et d'ouvrir la porte � de nouvelles d�rives qui pourraient trouver un terrain favorable au cas o� la garde baisserait. Cette sorte de veille, non codifi�e et non institutionnalis�e, est la force d'une r�publique. On l'a vue se manifester massivement lorsque le peuple fran�ais a senti le danger au cours de l'�lection pr�sidentielle, r�pondant collectivement � l'appel de la conscience pour barrer la route � ce m�me Jean-Marie Le Pen qui a eu l'insigne privil�ge d'acc�der au second tour, par la faute d'un parti socialiste born� et sans imagination. La justice fran�aise trouvera des arguments forts pour sanctionner les errements de ce n�o-nazi dont le parcours est une suite ininterrompue d'atteintes aux droits de l'homme et beaucoup peuvent t�moigner de sa brutalit�. Et ce lien avec notre pays nous am�ne � parler de la triste r�alit� que nous impose aujourd'hui une amnistie g�n�rale qui va laver de leurs crimes abominables les terroristes int�gristes qui ont d�pass� les Allemands dans leurs basses et ignobles œuvres. O� est le devoir de m�moire ? Seules certaines veuves �plor�es continuent de s'y attacher dans les colonnes de quelques quotidiens encore ouverts aux id�es de progr�s et de justice. Existe-t-il chez nous une conscience collective qui mesure les dangers d'une telle entreprise pour l'avenir de nos enfants, eux qui vont vivre sur l'id�e d'un "grand pardon" qui aura mis le criminel et la victime sur un pied d'�galit�. Mais qui pardonne qui ? Et qui pardonne � qui ? S'il est admis que la r�conciliation nationale est une issue in�luctable que personne de sens� ne peut ignorer, la suite qui lui est donn�e dans le cadre de l'amnistie g�n�rale va la vider de toute sa substance. L'amnistie est une tentative de gommer une partie de notre histoire en occultant l'h�ro�que r�sistance du peuple alg�rien et de ses �lites face � la machine � tuer. Elle vise � passer sous silence les v�ritables crimes contre l'humanit� commis � l'encontre du peuple alg�rien et dont les principaux artisans et les auteurs resteront impunis. Il y a quelques jours, dix-huit braves soldats de l'Arm�e nationale populaire tombaient au champ d'honneur du c�t� de Biskra. Ni deuil, ni hommage. S'ils avaient �t� victimes d'une explosion de gaz, ils auraient eu l'hommage de la nation… L'amnistie et sa philosophie sont en marche… M. F.