Transféré du Havre (2e div. française) à Leicester dans l'anonymat le plus complet en janvier 2014 pour 500 000 euros, l'ailier algérien Riyad Mahrez affole cette saison les compteurs en Angleterre et postule pour le titre de meilleur joueur de la saison. Mahrez (24 ans), un des principaux joueurs du leader surprise de Premier League, c'est l'histoire d'un gamin indolent de Sarcelles en région parisienne issu de la 2e génération d'immigrés. Un de ces gosses fluets qui a pris son temps, un de ces enfants en lequel la France n'y a pas cru et dont l'exil forcé est devenu une «Success story» outre-manche. «La mort de mon père (à 15 ans, ndlr) est peut-être le point de départ. Je ne sais pas si j'ai commencé ensuite à devenir sérieux mais, à sa mort, les choses ont commencé à tourner», expliquait-il en début de saison au Guardian. «Ils disaient tous que j'étais trop maigre, que tout le monde allait me prendre le ballon, poursuivait-il dans le quotidien britannique. Techniquement, ça allait mais physiquement je n'étais pas très fort. Ni rapide d'ailleurs. Quand vous êtes petit, vous évitez les duels. A Quimper, on m'avait dit : Joue en évitant le contact. Tu n'es pas fort, il faut que tu sois plus intelligent». Formé à l'AAS Sarcelles, le jeune Mahrez est repéré en 2009 par Quimper. Après une saison chez les amateurs, il est recalé par Lens et malgré l'intérêt conjoint du PSG, le club de sa région d'origine, et celui de l'OM, celui de son coeur, il opte modestement pour Le Havre. «L'Angleterre ce n'est pas pour toi...» D'abord comme stagiaire, puis comme pro au bout d'un an. Après des débuts timides, il perce en 2e division et Leicester, qui le suit depuis 18 mois, saute sur l'occasion en janvier 2014. «On me disait, Riyad, l'Angleterre ce n'est pas pour toi, c'est trop physique. L'Espagne te conviendra mieux. Et quand je suis arrivé, j'ai adoré, je me suis dit que j'avais été stupide d'hésiter, rigole-t-il maintenant. Si je jouais toujours en L2, personne ne s'intéresserait à moi». Six mois plus tard, Mahrez accroche la Championship à son palmarès et célèbre la montée en Premier League. Là encore, il lui faut une saison d'apprentissage avant d'exploser cette année. Avant le déplacement à Arsenal dimanche, le gaucher a ainsi inscrit 14 buts et délivré 10 passes décisives, et sa valeur est désormais estimée à 20 M EUR par les sites de référence. En décembre, quatre mois après avoir prolongé jusqu'en 2019, il devient même le premier Algérien à inscrire un triplé en Premier League. Snobé par l'OM «Cette année, Mahrez est pour nous un incroyable magicien, vient ainsi de reconnaître son entraîneur Claudio Ranieri. Je ne saurais dire à qui il ressemble. Il est devenu notre point de référence et quand il faut créer quelque chose, on lui donne juste le ballon». Originaire de Tlemcen par son père algérien, à la frontière du Maroc, le pays de sa mère, Mahrez a logiquement fini par attirer sur lui l'attention des Fennecs. Appelé pour la première fois en équipe d'Algérie en mai 2014, il a disputé le Mondial-2014 et s'est depuis affirmé comme un cadre. Désigné Ballon d'or algérien en 2015, il a inscrit quatre buts en 21 sélections. Rien que cette saison, il a marqué une fois et délivré quatre passes en six rencontres internationales. Une montée en puissance que n'a pu ignorer Marseille, dont le président Vincent Labrune, sollicité par un agent, l'avait snobé, «ne supportant pas d'être pris pour un gogo». «Pensez-vous réellement que des joueurs de Leicester peuvent aujourd'hui avoir leur place à l'OM ? De façon à gagner du temps, je me permets de vous préciser que nous essayons d'être professionnels et qu'en conséquence, la probabilité que nous prenions des joueurs de cette façon est égale à zéro», avait, visionnaire, répondu le dirigeant du 10e de L1.