Par Arris Touffan «Le mouton de cette année est chouia bark.» C'est l'affirmation péremptoire et irréfutable de khalti Garmya, ma tante préférée, que la succession pluri-décennale d'Aïd el-Kébir a transformée en vétérinaire instinctive. Dès le lendemain du sacrifice, ma tante véto a remarqué que le mouton prenait une allure de cadavre en putréfaction. Il vire presto au verdâtre et se met à schlinguer comme pas possible. Elle téléphone à partir de son portable à double puce à deux de ses sœurs qui confirment le constat du légiste. Les moutons sacrifiés chez mes autres tantes ont pareillement viré. Tante Garmya a décrété que c'est la première fois de sa vie qu'elle voit ça. Renseignements pris, elle apprend que le phénomène est répandu cette année. Facteurs naturels, disent les uns. Non, rétorque une association de défense des consommateurs qui soupçonne «une hormonothérapie prouvée par des points d'injections». «Nous avons eu des échos que des moutons ont été injectés par des corticoïdes ou carrément d'œstrogènes.» On les a dopés, les pauvres moutons, pour en mettre plein la vue. Et subséquemment, remplir les poches des vendeurs... Sauf que le consommateur a, en échange, de la viande verdâtre et même pas boucanée... A. T.