L'association El Djenadia a édité récemment et simultanément deux nouveaux albums de musique andalouse, dans lesquels elle rend hommage aux musiciens disparus Tarek Hammouche et Djamel Missaoui. Nouveauté de taille, les nouveaux produits ont été enregistrés dans deux conceptions différentes qui mettent en valeur la recherche musicale dans des classiques du genre, revisités avec une instrumentation musicale occidentale. Dans le premier des deux albums intitulé «Noubet El Maya, Sahet Letyar» (nouba maya, cri des oiseaux), sorti aux éditions Ostowana, la troupe de l'association fait preuve d'une grande maîtrise dans l'exécution d'une série de m'sedder, de n'sraf et de tefricha, au qanoun comme au luth. L'album, enregistré sous la direction artistique de Mohamed Lamine Bouzar, restitue ainsi la nouba Maya avec l'authenticité du genre algérois sanaâ, enrichi par des clins d'œil à d'autres écoles andalouses, notamment la marocaine dans le morceau Men houbi fi kheir el ouara. La nouveauté, voire l'audace, est dans le second album, intitulé «Les amis de Tarek Hammouche», où l'association El Djenadia a fait appel au batteur Hassen Khoualef, au bassiste Akram Khalef, au guitariste Amine Hamerouche et à l'accordéoniste Margarita Doulache en plus de trois choristes, revisitant ainsi le patrimoine andalou en lui donnant une modernité dans le son et les formes. La touche des musiciens invités se décline clairement dans le morceau Ya rosn enaka, présenté sur le rythme de la valse, soutenu par une distribution instrumentale subtile, où l'accordéon, la guitare et la mandoline évoquent la musique sicilienne. L'instrumentation aux consonances classiques européennes de cet album s'est également enrichie par une cellule baroque comportant des violons et une clarinette et exécutant, par moments, des compositions pour piano. Par ailleurs, un détour par le châabi ou le hawzi est également proposé dans des morceaux comme Daâni Ya Nadim, Lakaytou Habibi, ou Mahboub El Kalb. Invitée de l'association, la chanteuse Lamia Maâdini, avec le soliste d'El Djenadia, ont formé un duo exceptionnel interprétant avec une belle complémentarité des textes du patrimoine andalou sur des rythmes aux mesures irrégulières, alternant entre le hawzi, le aroubi et le chaâbi. Créée en 1985 dans la ville de Boufarik à l'initiative d'un groupe de mélomanes, l'association El Djenadia, qui porte le nom de l'artiste de hawzi et de aroubi, Boualem Djenadi (1903-1972), œuvre, particulièrement, pour la préservation et la transmission du patrimoine musical andalou. Pour rappel, cheikh Djenadi est un artiste de talent natif de Boufarik, décédé le 23 décembre 1972. Plusieurs fois primée lors de festivals nationaux dédiés à la musique andalouse, l'association, qui a également donné des concerts en France, au Maroc et en Serbie, compte déjà à son actif une dizaine d'enregistrements de noubas andalouses.