Pour le sous-directeur de la protection du patrimoine forestier, la lutte contre les incendies de forêt n'est pas une question de moyens et d'investissements. Ce phénomène naturel nécessite, selon lui, l'organisation, la coordination et l'implication des différents acteurs concernés. Rym Nasri - Alger (Le Soir) - Le long épisode de feux de forêt qu'a connu l'Algérie durant cet été est loin d'être inhabituel. Selon Abdelghani Boumessaoud, la perte d'une surface de 83 603 ha du patrimoine forestier durant cette saison n'est pas du tout «exceptionnelle». Il rappelle ainsi que la surface ravagée par les incendies a atteint 221 600 ha en 1983, dépassé 271 000 ha en 1994, et frôlé les 100 000 ha en 2012. Toujours est-il, il affirme que les feux de forêt sont «un phénomène naturel qui revient chaque année mais il représente un risque majeur qui peut causer des dégâts sur les populations et leurs biens». Intervenant jeudi dernier, sur les ondes de la radio nationale Chaîne 3, le sous-directeur de la protection du patrimoine forestier précise que 2 791 départs de feu ont été enregistrés depuis le 1er juin jusqu'au 4 octobre dernier. «Plus de 50% de ces incendies ont touché la formation forêt, soit 28 690 ha, puis les maquis avec 10 296 ha suivent les broussailles avec 14 617 ha», détaille-t-il. Quant à la répartition des feux de forêt, il souligne que la partie est du pays a été la plus affectée par le phénomène. «Elle a enregistré la destruction de 44 282 ha provoquée par 1 095 feux, soit 82% des incendies. D'ailleurs, la wilaya d'el-Tarf est la plus touchée avec 19 443 ha, soit 36% du total national. Le centre du pays a enregistré 7 148 ha incendiés et l'ouest 2 173 ha», dit-il. Pourquoi y a-t-il eu autant de dégâts ? Qu'est-ce qui manquait ? Qu'est-ce qui n'allait pas bien ? L'invité de la radio pointe du doigt un «manque» dans l'organisation et dans la coordination pour la lutte contre les incendies de forêt. Une campagne de lutte qui, précise-t-il, implique outre les services de forêt et la protection civile, d'autres acteurs notamment les collectivités locales, les travaux publics et l'agriculture. «Généralement, les départs de feu ne prennent pas naissance à l'intérieur du périmètre forestier. Ils peuvent provenir d'une voie de circulation d'où le rôle des travaux publics dans le nettoyage des accotements des axes autoroutiers, routes nationales et chemins de wilaya. Idem pour les chemins vicinaux qui dépendent des communes. Les agriculteurs disposant de parcelles limitrophes aux forêts eux aussi doivent créer des tournières à la périphérie de leur exploitation agricole parce que nombre de feux prennent naissance lors de l'opération moisson-battage», explique-t-il. Pourtant, poursuit-il, «seuls la protection civile et les services de forêt sont omniprésents à chaque incendie. A l'exception de certaines communes, où se trouvent les responsables des communes lors de l'opération de lutte contre les incendies de forêt ? Lors de l'exécution de l'action de prévention et de lutte, nous nous retrouvons à deux, trois, voire quatre corps seulement». Ce n'est pas une question de moyens Abdelghani Boumessaoud estime, par ailleurs, que les moyens de lutte ne vont pas résoudre le phénomène des incendies de forêt. «Les moyens ne font que diminuer les dégâts». Toutefois, il exprime le souhait de voir un jour les moyens aéroportés de lutte contre les incendies de forêt renforcer les moyens terrestres. Il insiste ainsi sur la sensibilisation et pas uniquement dans les écoles. Selon lui, ceux qui provoquent les incendies ne sont pas les écoliers mais des adultes dont les profils sont identifiés : des agriculteurs, des éleveurs et toutes ces personnes qui utilisent pour des besoins domestiques. Optimiste, il affirme que la nature se reconstitue d'elle-même mais à condition qu'elle ne soit pas agressée à fréquence très répétitive. Il appelle ainsi à préserver le patrimoine forestier pour éviter les érosions hydriques, l'envasement des barrages et l'ensablement des terrains agricoles.