A Tala-Bouzrou, un village de quelque 12 000 habitants dans la commune de Makouda, il existe, depuis ces derni�res ann�es, un d�bouch� r�el, mais risqu� pour le ch�mage. La p�rilleuse et r�mun�ratrice profession est la taille de la pierre pour la d�coration. Les d�cors offerts aux visiteurs et acheteurs potentiels sont d�un raffinement rare. Il suffit au propri�taire d�une villa de demander et d�imaginer n�importe quel dessin et les d�corateurs se chargent de l�ex�cution. Le r�sultat est souvent irr�prochable. Le gisement de roche dans ce village est intarissable. Il est exploit� intensivement depuis des d�cennies par une jeunesse en mal d�argent et d�emploi. Le travail harassant et pr�cis passe par plusieurs �tapes pour arriver au chantier de d�coration. Et chaque �tape est assur�e, en g�n�ral, par une �quipe sp�cialis�e, car le processus exige une concentration rigoureusement artistique. Le prix du m�tre carr� de la pierre simple est de 2 700 DA. Les d�corateurs ex�cutent les dessins souhait�s par les propri�taires de construction � embellir � raison de 4 500 DA. Les entrepreneurs-d�corateurs ach�tent les pierres �pr�cieuses� et se chargeront, avec leurs ma�ons, de leur pose pour une valeur de 5 000 DA le m�tre lin�aire. Evidemment, il y va sans dire que ces derniers, sans prendre le moindre risque pour leur sant�, se taillent la part du lion dans les b�n�fices de ce travail. Leur situation demeure l�ambition de tous les manipulateurs de burin et de marteau � Tala-Bouzrou. Ce travail singulier est, comme l��cole, un passage presque oblig� pour tous les jeunes du village. Et pour se tailler une petite place parmi les multiples exploiteurs, le nouvel arrivant n�a besoin que d�un burin aff�t�, de deux marteaux dont un sp�cial pour la finition du produit et d�une �querre pour ouvrir sa cabane parmi les nu�es �rig�es le long de la route. Le travail de la pierre s�est intensifi� depuis une dizaine d�ann�es d�j�. Pour ce qui est du choix de ce �m�tier� c�est le ch�mage qui en est la cause. Tout le monde d�bute, �histoire� de d�panner, mais le manque de perspectives les condamne � rester. De plus, le travail rapporte visiblement. En effet , de nombreux nouveaux riches du village se comptent parmi les exploitants de la roche. Le fruit de son travail, aussit�t fini qu�il est achet� par les constructeurs qui en redemandent toujours plus. C�est d�ailleurs, ce d�bouch� qui encourage les ch�meurs locaux � s�investir dans ce travail � haut risque pour la sant�. Et chose dramatique, la majorit� des tailleurs travaillent sans masque de protection et ce, malgr� la connaissance r�elle du danger. Pour rappel, le premier villageois, qui s��tait sp�cialis� dans la taille de pierre et sa construction, est mort des suites d�une longue maladie des poumons contract�e durant les vingt ann�es d�exercice. D�autres personnes accul�es par la mis�re et le d�nuement ou app�t�es par le gain ont repris le m�me chemin p�rilleux que le premier lapidaire du nouveau genre. Le village compte aujourd�hui de nombreux malades pulmonaires. Ils sont jeunes et parfois mineurs. Ils travaillent au milieu de vapeurs de poussi�re faites de fines particules sans autres protection que des torchons enroul�s sur la bouche et le nez. Ce dispositif de fortune, en fait, ne prot�ge gu�re. Questionn�s � ce sujet, les ouvriers nous expliquent que �travailler avec un masque nous �touffe. Car des particules s�incrustent dans les bouches de respiration et bloquent la libre circulation de l�oxyg�ne�. Cela dit, les poumons re�oivent et emmagasinent, dans les alv�oles, les grains et particules microscopiques que m�me la toilette des branches matinale n�arrive pas � extirper. Et c�est ainsi que le processus de la silicose et de la fibrose se d�clenche � l�insu du travailleur. Et le mal ne se manifeste, par des douleurs, qu�une fois qu�il est � un stade relativement avanc�. Enfin, l�autre malheur de ce travail est qu�il est d�pourvu de toute couverture de la s�curit� sociale.