De l�avis de nombreux observateurs, le rassemblement organis� dimanche dernier par l�opposition libanaise, qui regroupe les deux formations chiites, Hezbollah et Amal, ainsi que le Courant patriotique libre (CPL) de Michel Aoun, les Marada de Sleimane Frangi�, l�autre parti chr�tien, le courant sunnite d�Omar Karam�, rejoints depuis une semaine par le Parti communiste libanais, �tait un �v�nement sans pr�c�dent. Encore une fois, l�opposition libanaise a r�ussi son pari. Non seulement d��tre capable de mobiliser au 10�me jour un nombre encore plus important que vendredi dernier, premier jour du sit-in massif qu�elle avait organis�, mais elle a d�montr� que ni la lassitude, ni la peur de provocations � il y en a eu � n�ont eu d�effet sur la mobilisation populaire. Plus encore, cette d�monstration de force a montr� que les lignes de fracture ne sont d�sormais plus religieuses � chr�tiens contre musulmans ou chiites contre sunnites � mais politiques. Pourtant, tout a �t� fait pour faire ressurgir le vieux spectre des clivages politico-confessionnels. La participation des partis chr�tiens, dont le CPL, � cette vague protestataire a �t� volontairement minor�e par les m�dias proches de la majorit� au pouvoir. Or, ses militants et sympathisants, qui occupent la place des Martyrs, l�une des deux places de ce rassemblement populaire permanent, avec celle de Riadh-Solh, sont bien visibles avec leur couleur orange (CPL) et vert (Marada). Comme l�est, depuis dimanche dernier, le PC libanais avec sa dizaine de tentes de toile dans un espace n�goci� avec les organisateurs. Le fait d�avoir choisi un dimanche pour organiser cette nouvelle d�monstration de force n�est pas fortuit. Cela a permis aux partisans du g�n�ral Michel Aoun et des autres partis chr�tiens d��tre pr�sents en force juste apr�s que des milliers d�entre eux ont assist� � la messe dominicale. Ce qui ne fut pas le cas lors de la manifestation du vendredi 1er d�cembre o� les partisans du Hezbollah et d�Amal �taient plus nombreux. Raidissement des positions Le rassemblement d�hier intervient dans un contexte de raidissement des positions des protagonistes de la crise : apr�s l�ultimatum de Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah, demandant la formation d�un gouvernement d�union nationale ou un cabinet de transition pour organiser des l�gislatives anticip�es, la promesse de Michel Aoun de plonger l�ex�cutif libanais dans �un coma profond�, voil� que le chef de l�Etat, Emile Lahoud, refuse d�ent�riner le projet de cr�ation de tribunal international devant juger l�affaire Rafik Hariri, projet que lui a transmis le gouvernement. Refus motiv� du fait que ce m�me gouvernement est, selon lui, rendu anticonstitutionnel par la d�mission de six de ses ministres dont cinq chiites. R�torquant au discours du chef du Hezbollah et de ses alli�s, le Premier ministre, Fouad Siniora, qui vient de recevoir l�appui remarqu� de Paris et Washington, a rejet� les demandes de l�opposition qui demande la formation d�un gouvernement d�union nationale avec une minorit� de blocage et emp�cherait la cr�ation du tribunal international. En attendant, si Michel Aoun a pr�venu que �lors des prochains rassemblements (�) les barbel�s ne prot�geront plus le S�rail� (si�ge du gouvernement libanais) tout porte � croire que l�opposition libanaise a d�cid� de donner une chance aux m�diations arabes pour d�nouer la crise. Autrement, elle menace de bloquer les ports et a�roports et les institutions si le gouvernement Siniora continue de refuser l�id�e d�un cabinet d�union nationale. Les m�diations arabes Pour d�nouer cette crise et renouer le fil du dialogue, les m�diations n�ont pas manqu�. Le secr�taire g�n�ral de la Ligue arabe, Amr Moussa, a propos� l��laboration d�un compromis sur les points de cristallisation : le gouvernement d�union nationale, le tribunal international, des �lections l�gislatives et pr�sidentielle anticip�es. De son c�t�, l�Eglise maronite a rendu public un document, accueilli favorablement par toutes les parties, y compris par le Hezbollah, proposant, parall�lement � la d�mission du chef de l�Etat Emile Lahoud, la formation d�un cabinet d�union nationale ou de transition. Le probl�me est que la majorit� actuelle, elle, fait de la d�mission du chef de l�Etat et de la convocation du Parlement devant d�signer un nouveau pr�sident de la R�publique des pr�alables � la formation d�un cabinet d�union nationale. A l�inverse, l�opposition exige un tiers des postes du gouvernement, ce qui lui conf�re de fait un pouvoir de blocage, ou, � d�faut, un cabinet de transition charg� d�organiser des �lections anticip�es sur la base d�une nouvelle loi �lectorale. Dans ce dernier cas de figure � tous les sondages l�indiquent � l�opposition l�emporterait. Et si la majorit� actuelle accuse ses adversaires d��tre manipul�s par Damas pour emp�cher la mise en place du tribunal international devant juger les crimes politiques commis au Liban, mais aussi par T�h�ran, l�opposition r�torque que ce gouvernement est � la solde de l��tranger : il ne ferait rien sans en r�f�rer � Jeffrey Feltman, l�ambassadeur des Etats- Unis au Liban, que d�aucuns comparent � Paul Bremer, l�ancien administrateur am�ricain en Irak. �Il n'y a pas d'initiative arabe pour r�soudre la crise, mais des id�es. Il y a des efforts dans ce sens depuis ma premi�re visite�, s�est born� de dire Amr Moussa hier � la presse libanaise. Hassane Zerrouky