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CHRONIQUE
En quelques mots : de-ci, de-l�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 23 - 12 - 2006


1) La m�diocratie encore et encore...
A quelques jours de la nouvelle ann�e, il serait vain et totalement illusoire de souhaiter � ses proches et amis � compatriotes s�entend � �une bonne ann�e�. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas d�un naturel pessimiste ou rabat-joie et je ne baisse jamais les bras face aux difficult�s.
Cependant, il faut �tre frapp� de c�cit� et atteint d�un ang�lisme politique incurable, pour croire, ne serait-ce qu�un instant, qu�avec les m�mes dirigeants politiques au niveau de l�Ex�cutif qui continueront � nous faire subir leur mode de gouvernance, leur r�gionalisme, leur n�potisme, leur r�pression f�roce, leurs discours creux et leurs humeurs 2007 sera meilleur que 2006. C�est en effet l� l�unique programme du premier magistrat du pays fort bien d�fini par le docteur Sa�d Sadi, secr�taire g�n�ral du RCD : �En dehors de la r�pression, je ne connais pas le programme du pr�sident� (� El Watan mercredi 20 d�cembre 2006, interview de M. Sa�d Sadi) peut-�tre pourrait-on alors souhaiter � ses proches et amis une meilleure ann�e ? A condition d�adjoindre cette phrase � sa carte de v�ux : �Puisse 2007 �tre enfin l�ann�e du changement et du grand nettoyage du printemps m�me si nous sommes en hiver...� On peut faire plus simple : �Puisse 2007 ne pas ressembler � 2006�. Le (ou la) destinataire comprendra alors qu�on lui souhaite d�en finir avec le terrorisme-islamiste, la pr�carit� �conomique et sociale et le verrouillage politique. Bien malin en effet celui qui oserait affirmer que 2006 (qui a ressembl� � 2005, � 2004, � 2003, � 2002, � 2001, � 2000, � 1999 Ouf !) fut une excellente ou modestement une bonne ann�e. Celui-ci serait mal inspir� car les r�alit�s parlent d�elles-m�mes. Lorsque le chef de l�Etat avait d�clar� lors de la r�union gouvernement- walis le 9 d�cembre 2006 �qu�il avait men� jusqu�au bout sa mission, tous les clignotants �tant au vert et qu�il pouvait m�me envisager d�organiser une �lection pr�sidentielle anticip�e, les cadres de la nation l�ont �videmment applaudi comme de coutume. Aucun d�entre eux ne s�est pos� la question de savoir en quoi en sept ann�es et neuf fois de mandat pr�sidentiel le sort des Alg�riens a-t-il a �t� am�lior� par leur pr�sident se f�licitant d�avoir accompli sa mission ? Sont-ils mieux �duqu�s ? Sont-ils log�s ou mieux log�s ? Sont-ils en meilleure sant� ? Ont-il les m�mes chances sur le march� du travail ? Le nombre des ch�meurs a-t-il diminu� ? La d�linquance a-t-elle baiss� ? La condition des femmes a-t-elle �volu� ? Le terrorisme-islamiste a-t-il �t� �radiqu� ? La r�conciliation si ch�re � Abdelaziz Bouteflika a-t-elle au moins diminu� les attentats, � d�faut bien �videmment de �r�concilier� l�inconciable : le bourreau et la victime ? L�opposition a-t-elle le droit de s�exprimer ? Les droits et libert�s dont la libert� d�expression sont-ils respect�s ? A toutes ces questions la r�ponse est non. Cent fois non. Les attentats commis par les islamistes ont �t� d�une grande f�rocit� rappelant les ann�es rouges plut�t qu�une paix illusoire, utopique chant�e et vant�e par son initiateur et promoteur, et ses courtisans. Ce n�est pourtant pas ce terrorisme- islamiste qui s�est attaqu� r�cemment � des �trangers (attentat de Bouchaoui le 10 d�cembre) et dont l�all�geance � El-Qa�da ne fait plus de doute qui donne du souci au pouvoir. Les assassins courent toujours dans la nature que ce soient ceux des militaires tomb�s dans des embuscades, ceux de Dergana, R�gha�a et ceux des victimes mitraill�es dans un bus � Bouchaoui, mais ce sont les d�mocrates que l�Ex�cutif harc�le et pourchasse. Eux, encore eux et toujours eux. C�est ainsi que le parti MDS s�est vu refuser l�autorisation de tenir son congr�s les 22 et 23 d�cembre. C�est l� la mani�re tr�s particuli�re pour ce m�me Ex�cutif de rendre hommage � la m�moire de feu Hachemi Ch�rif, ex-secr�taire g�n�ral de ce parti. Mais pourquoi donc cette interdiction ? Parce que l�unanimisme est une r�gle essentielle du mode de gouvernance bouteflikien. Toute voix discordante doit �tre �touff�e. Si l�on comprend cela, l�on comprend alors que le �repenti� sans repentance revenu d�Allemagne ait �t� re�u comme un h�ros � l�a�roport puis par le chef du gouvernement au si�ge du FLN, et qu�il ait eu l�autorisation de multiplier d�clarations et conf�rences de presse aux c�t�s d�un amnisti� fier de dire qu�il ne regrettait pas son pass� d�assassin. Avec un chef de l�Etat ayant concr�tis� ses sympathies et convictions islamistes avec sa �charte sur la paix� et la nomination de son chef du gouvernement en mai 2006 n�ayant jamais cach� son opposition � l�arr�t du processus �lectoral en 1991 et son accord plein et entier au pacte de Rome en 1995, on comprend alors que le pouvoir craigne le MDS et sa ligne �ditoriale r�publicaine, ou qu�il refuse jusqu�� ce jour d�agr�er le Front d�mocratique de M. Sid Ahmed Ghozali. On comprend surtout son incapacit� � mobiliser la nation vers le progr�s. D�o� la multiplication de discours pour faire diversion et faire oublier sa grande fragilit�. L�ann�e 2006 a-t-elle abouti � la finalisation d�une r�forme (une seulement) parmi toutes celles promises aux citoyens ? Non, par contre nous avons eu droit � de longues absences du chef de l�Etat pour des raisons de sant� dont lui-m�me a reconnu l�existence (lors de la visite de M. Nicolas Sarkozy) alors que Abdelaziz Belkhadem parlait de �vacances�, de �repos� du pr�sident. C��tait au moment o� il tentait co�te que co�te de �fourguer� sa r�vision constitutionnelle. Et s�il n�y avait pas eu de raisons imp�rieuses telle que celle attenante � sa sant�, le premier magistrat aurait-il fait allusion � la possibilit� d��lection anticip�e ? En d�autres circonstances peut-�tre nous aurait-il dit comme son homologue �gyptien : �Je resterai tant que mon c�ur battra�... Pour autant, on n�en sait toujours pas plus sur le �banal ulc�re h�morragique� du pr�sident annonc� en novembre 2005 par le professeur Zitouni. Il est vrai que ce probl�me de sant� n�a pas desservi le pouvoir puisqu�il meublait conversations ou discussions des uns et des autres. 1�re diversion de 2006 que celle-ci. L�autre diversion fut �videmment l�encre et la salive qu�a fait couler la corruption. Aux derni�res nouvelles celui qui a tent� de griller la politesse aux autres partis, voire aux membres de l�Alliance en s��rigeant en donneur de le�ons, �incorruptible� n�a pas �t� retenu comme �l�homme de 2006 en mati�re de lutte contre la corruption�. L�islamiste Aboujerra Soltani � puisque c�est de lui qu�il s�agit � a eu droit � une admonestation bouteflikienne publique. R�sultat ? Il est toujours en poste, toujours au sein de l�Alliance, le MSP ne souffre d�aucune turbulence car il ne fait pas peur au pouvoir � son alli� � comme le MDS, le RCD ou le Front d�mocratique. La cerise sur le g�teau se trouve dans le fait que la justice serait (conditionnel) sur le point de l�entendre comme t�moin ! De l�auto- saisine pour propos diffamatoires qui n�a jamais eu lieu, Aboujerra serait t�moin ! Rien n�emp�cherait un juge, me dirait-on, de l�inculper m�me en qualit� de t�moin. Bien entendu ! mais je pr�f�re suivre d�sormais le feuilleton �Clearstream� en France, sans doute plus compliqu� quant au fond, mais tr�s clair sur le plan proc�dural. Tellement clair que le Premier ministre, Dominique de Villepin, a �t� entendu. On n�a pas dit �pourrait �tre entendu... serait entendu...� Il l�a �t� point final. Alors la grosse blague de Soltani de mauvais go�t ne pr�te m�me plus � sourire. Elle n�est pas risible car le ph�nom�ne de la corruption a atteint des proportions terriblement inqui�tantes si l�on en juge par les mises en garde et conclusions de Transparency International sur ce fl�au dans notre pays. Et lorsque le ministre des Finances, Mourad Medelci, habituellement pond�r�, s�en prend � cette ONG avec virulence, l�accusant de vouloir semer le d�sordre, �l�Alg�rie �tant capable de lutter contre la corruption�, dit-il. On a juste envie de lui rappeler que la langue de bois n�est d�aucun secours dans ce cas pr�cis, car il a �t� le premier � avoir reconnu il y a � peine quelques jours que les scandales financiers des banques ont saign� l�Alg�rie et lui ont caus� un �norme pr�judice. Seuls les d�bats organis�s par El Watan sur la question et repris par ce quotidien m�ritent v�ritablement notre attention en raison de l�ampleur que prend ce ph�nom�ne. Et lorsque la pr�sidente de Transparency International recommande une justice ind�pendante et beaucoup plus de d�mocratie, on est au regret de lui dire que nous sommes orphelins de ces deux pr�alables et exigences � la lutte contre la corruption. Depuis son investiture en 1999, le premier magistrat du pays n�a pas cess� � chaque rentr�e judiciaire d�insulter le corps des magistrats (corrompus, incomp�tents...) pourtant ce pouvoir judiciaire, le chef de l�Etat l�a transform� en une simple fonction � son service et pour lui rendre service. Tous les magistrats ne sont pas des brebis galeuses, tous les magistrats ne sont pas des incomp�tents. Mais Abdelaziz Bouteflika a-t-il v�ritablement cherch� � prot�ger les juges int�gres et comp�tents ? L�affaire du congr�s du FLN (mars 2004) et les sanctions subies par des juges (r�vocation), ainsi que l�incarc�ration de Mohamed Benchicou et le harc�lement judiciaire contre d�autres de ses confr�res et cons�urs, sont autant de r�ponses � la question. Et lorsque Ma�mar El Kadhafi, dont la justice a condamn� � la peine capitale cinq femmes infirmi�res bulgares et un m�decin palestinien s�octroie le �droit� de faire condamner une journaliste alg�rienne d�un quotidien alg�rien et son directeur de publication parce qu�un article n�a pas �t� � son go�t, de quelle ind�pendance parle-t-on ? La corruption : deuxi�me diversion de 2006. Le ministre de l�Energie, lui n�a rien trouv� de mieux que de s�escrimer � diffuser une longue circulaire d�non�ant le harc�lement sexuel contre des employ�es de son d�partement. Pourquoi ne pas sanctionner les harceleurs puisqu�il avait sur son bureau les plaintes des femmes, donc les noms des auteurs de l�infraction ? Les ministres ressemblent � leur pr�sident : ils parlent, ils parlent sans arr�t... Autres diversions minist�rielles en tout genre. Et pour ne pas demeurer en reste, le chef de l�Etat a d�clar� �qu�il avait
honte de la salet� de nos villes et villages�. �La s�curit� publique est affaire du peuple�, (assises de l�architecture mardi 19 d�cembre 2006). Depuis bient�t huit ans, le premier magistrat du pays a honte de tout :
1) de la Constitution de 1996,
2) des victimes du terrorisme islamiste oppos�es � toute compromission appel�e �r�conciliation�,
3) de l��cole et de l�universit� alg�riennes,
4) de l�administration,
5) de la magistrature,
6) de son peuple,
7) de la sant�,
8) de la culture puisque nous sommes incultes.
Qu�-a-t-il donc fait pour que cela change ? Qu�a-t-il entrepris depuis tant d�ann�es pour que l�Alg�rien se comporte comme citoyen ? Abdelaziz Bouteflika aura pass� son temps � dresser un �tat des lieux mais encore ? La culture de l��meute �tant devenue la seule forme d�expression sous son r�gne, on est loin, tr�s loin de la citoyennet�. Quant � reprocher aux Alg�riens t�moins d�un vol, leur passivit�, il y a lieu de rappeler au chef de l�Etat ses gr�ces pr�sidentielles par fourn�es de 5 000, 6 000 d�linquants. La d�mobilisation citoyenne est d�abord l�affaire de l�Etat. Discours... diversions... encore et encore. Le premier magistrat du pays a entendu exercer le pouvoir pour le pouvoir en r�alisant des scores de 85%, 98% ! Que peut-on alors construire sur des fondations aussi fragiles ? La m�diocratie et rien d�autre. Se sentir responsable de la propret� et de l�embellissement de sa ville, de son immeuble, est certes affaire du citoyen mais elle est aussi affaire d�initiative, de d�mocratie donc de libert�, et non de blocage et de verrouillage politique. Une affaire par contre fera certainement du bruit : Ce sera celle des faux moudjahidine. Ceux qui ont d�cid� d�aller jusqu�au bout sont des personnalit�s honorables et connues pour �tre s�rieuses et ne pas parler dans le vide. Qu�il s�agisse du colonel Ahmed Bench�rif, du commandant Bougouba de l�ALN ou de M. Mellouk Benyoucef malmen�, emprisonn� pour avoir r�v�l� au grand jour les magistrats �faux moudjahidine�, en 1992 (� Hebdo lib�r� dont le directeur avait �t� emprisonn� aussi). Dieu fasse qu�enfin la v�rit� soit connue, ce sera justice pour les vrais martyrs et leurs familles. Les familles des victimes du terrorisme n�auront pas ce probl�me car sous le r�gne de Abdelaziz Bouteflika, ce sont les terroristes islamistes qui seraient sollicit�s par certains pour t�moigner qu�ils �taient dans leur camp en raison des indemnisations all�chantes ! Un jour on entendra parler d�une affaire de �faux terroristes�. Pour l�heure, l�affaire des faux moudjahidine n�est pas une diversion mais une affaire s�rieuse. A suivre... Ainsi donc prend fin 2006 : Soltani s�est tu, Zin�dine Zidane est reparti, Abdelaziz Bouteflika avoue avoir honte de diriger un peuple m�diocre habitant des villes sales. 2007 est � nos portes, le marasme et l�immobilisme, dispara�tront- ils ? C�est ce que je �nous� souhaite sans �tre s�re de quoi que ce soit.
L. A.
NB :
1) A propos de l�affaire du sang contamin� et du proc�s qui s�en est suivi en Libye on ne peut qu��prouver de la compassion pour les 393 enfants contamin�s. Mais l�on ne peut applaudir au verdict d�une s�v�rit� absolue surtout lorsqu�on entend le m�decin palestinien d�clarer : �J�ai �t� atrocement tortur�.� A supposer que les faits aient �t� �tablis � ce qui n�est pas certain � la peine capitale est une sanction inacceptable pour tout citoyen (ne) du monde �pris de libert�. Ce verdict est scandaleux et m�riterait que plus de voix se fassent entendre.
2) Vendredi 15 d�cembre 2006 s�est �teint M. Lakhdar Laggoune, ancien magistrat � la Cour supr�me. Alors que je d�butais en 1971 � la cour d�appel d�Alger, j�eus le privil�ge, l�honneur mais aussi le bonheur, d��tre conseiller � la chambre civile qu�il dirigeait outre ses fonctions de pr�sident de cour. Si je me permets de dire quelques mots en sa m�moire c�est surtout pour le remercier pour tout ce que j�ai appris aupr�s de lui : la rigueur dans le raisonnement, dans le comportement et l�int�grit� absolue. Celle qui �manait de tout son �tre, dans ses moindres faits et gestes. Je me souviens de son stylo bleu raturant, cochant les attendus de nos arr�ts de d�butants. Ma joie infinie �tait sa formule coutumi�re : �C�est bon�. Je me souviens de sa grande et profonde g�n�rosit�, consistant � nous donner tout ce qu�il poss�dait comme connaissances, comme astuces de juriste �m�rite. Je me souviens de ses conseils de p�re et de pr�sident de chambre : �Un magistrat n�a pas d�amis et n�a pas de vie sociale.� J�ai fait de ses recommandations un v�ritable sacerdoce. Je me souviens du jour o� soup�onnant un conseiller aujourd�hui d�c�d�, de corruption sans pour autant d�tenir des preuves tangibles il me dit : �Vois-tu ce qui me d�range c�est qu�il doit �manger� sur mon dos et sur ton dos.� Il le disait en plaisantant mais son Int�grit� avec un I devait sans nul doute en souffrir. Je me souviens que M. Laggoune Lakhdar fut le premier � avoir d�sign� une femme, Mme Nadia Hassani, pr�sidente de chambre, car p�re moderne et �volu� avec ses filles, Mme Hassani et moim�me qui avons le plus collabor� avec lui, �tions � ses yeux ses deux autres filles appel�es selon ses v�ux � avancer. Je me souviens des longues s�ances de travail avec lui o� un d�lib�r� �tait chose s�rieuse et enrichissante surtout lorsqu�il s�agissait du civil, du statut personnel et du r�f�r�. Nous ressortions toujours enrichis. C��tait cela la magistrature avec M. Laggoune Lakhdar. Je me souviens aussi de sa patience � toute �preuve de formateur g�n�reux. Un ma�tre au sens noble du terme. Je me souviens de mes visites � son bureau de conseiller � la Cour supr�me pour lui soumettre mes dossiers et mon point de vue. Je me souviens de sa disponibilit� et de ses conseils. Un homme s�en est all� discr�tement comme il a v�cu avec une vie bien remplie � l�instar des grands. Et le privil�ge des grands comme M. Lakhdar Laggoune est certes de nous quitter mais de ne jamais tomber dans l�oubli. De cela je suis convaincue. Qu�il soit remerci� pour tout ce qu�il m�a apport� et que sa famille soit assur�e de ma profonde compassion et de ma reconnaissance �ternelle � l��gard de mon ma�tre Si Lakhdar Laggoune.


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