Il y a plus de 2000 ans, le talmud babylonien stipulait que �si deux fr�res d�c�daient de complications h�morragiques apr�s circoncision, le troisi�me enfant devait en �tre dispens� en expliquant qu�il y a des familles chez qui le sang est fluide tandis que chez d�autres il coagule. Par Lamh�ne Latifa* Cette observation permet d�appr�cier l�anciennet� et la gravit� de cette maladie dite aussi �maladie des rois�. Elle a atteint une des plus c�l�bres familles royales en Europe, celle de la reine Victoria qui a perdu son fils par h�morragie c�r�brale et qui par ses filles a transmis la maladie � leurs descendances en Russie et en Espagne. Aucun des descendants h�mophiles de Victoria n�a d�pass� l��ge de vingt ans. L�h�mophilie est une pathologie grave de la coagulation du sang dont la prise en charge th�rapeutique ne peut �tre banalis�e. Actuellement, un traitement bien conduit permet une vie proche de la normale en termes d�esp�rance et de qualit� de vie. L�h�mophilie est un trouble g�n�tique, rare, de la coagulation du sang. Elle atteint les sujets de sexe masculin avec une incidence de 1/5000 naissances m�les. Dans un tiers des cas, il n�y a pas d�histoire familiale d�h�mophilie. L�anomalie appara�t dans une famille et va se transmettre aux autres g�n�rations. La maladie est due � l�absence ou � la diminution d�un des facteurs de la coagulation habituellement pr�sent dans le sang. Il y a deux types d�h�mophilie ; l�h�mophilie A (d�ficit en facteur VIII) et l�h�mophilie B (d�ficit en facteur IX). Les saignements et les risques encourus sont identiques et pour le malade et son m�decin, la diff�rence r�side principalement dans le traitement de substitution � administrer pour chaque cas. Dans l�h�mophilie, les malades ne sont pas tous atteints de la m�me fa�on et l�on distingue 3 types selon leur degr� de s�v�rit� et le taux de facteur pr�sent dans le sang. Les formes s�v�res sont les plus fr�quentes, plus de 60% des cas. L�h�mophilie se caract�rise par des saignements dans les muscles et les articulations qui se r�p�tent et entra�nent des s�quelles faisant du patient non ou mal trait�, un v�ritable handicap� moteur � l��ge adulte. Malheureusement, il est souvent ch�meur en raison des absences � l��cole et l�impossibilit� de faire un m�tier manuel. Les h�morragies d�butent avant l��ge d�un an (vaccinations, plaies h�morragiques, h�matomes lors des premiers pas�). La fr�quence des saignements reste �lev�e tout au long de la vie, parfois m�me, sans cause apparente (saignements spontan�s). La gravit� des sympt�mes fait qu�il est souvent plus �vident de faire le diagnostic chez un h�mophile s�v�re que chez un h�mophile mod�r� ou mineur, car dans ces cas, la maladie est d�couverte un peu plus tard voire m�me � l��ge adulte lors d�une intervention chirurgicale (qui peut le conduire � la mort). Les h�morragies chez les h�mophiles peuvent �tre externes donc visibles � l��il nu et internes telles que les h�matomes et les h�marthroses (h�morragies articulaires), tr�s invalidantes � long terme allant souvent jusqu�aux handicaps moteurs s�v�res. Celles-ci n�cessitent dans tous les cas des consultations en urgence pour un traitement pr�coce voire m�me des hospitalisations dans la plupart des cas. Quelle que soit la nature du saignement, il est important de transfuser rapidement le produit de substitution (facteur manquant) afin d�arr�ter les saignements et les douleurs ainsi que toutes les autres complications. Un traitement pr�coce n�cessite une quantit� moins importante de facteurs � injecter, ce qui au bout du compte revient moins cher en terme de co�t. En Alg�rie, nous pr�voyons de trouver pr�s de 3000 h�mophiles en tenant compte des statistiques, mais nous n�en n�avons recens� que 1300, en raison de la m�connaissance de la maladie, le non-suivi des malades, l�absence de diagnostic syst�matique � la naissance voir les d�c�s. De ces malades d�clar�s, plus de 90% sont des handicap�s physiques (un handicap qui est redout� plus que la mort) et sociaux (scolarit� rat�e � cause des hospitalisations r�p�t�s, manque de qualification, ch�mage, rejet social�.) Et malgr� la marche progressive de la science et l�existence de traitements de substitution, de nos jours, certains actes m�dicaux tels que la circoncision peuvent �tre consid�r�s comme mortels car cette petite chirurgie, en temps normal banale, peut causer le d�c�s chez les h�mophiles par ignorance de la maladie, car l�absence d�ant�c�dents familiaux ou parce que le bilan pr�-op�ratoire normalement syst�matique n�a pas �t� fait (en l�occurrence le bilan d�h�mostase). La principale probl�matique quotidiennement v�cue par les h�mophiles, et n�anmoins pas des moindres, reste l�indisponibilit� des traitements de substitution. De ce fait, tr�s souvent, les circoncisions se font lors des hospitalisations pour un tout autre probl�me de sant� qui, bien �videment, n�cessite une consommation de m�dicaments anti-h�mophiliques. De ce fait, l�Association alg�rienne des h�mophiles interpelle les autorit�s, encore une fois, pour assurer une disponibilit� permanente des m�dicaments anti-h�mophiliques et insiste sur le diagnostic qui constitue la cl� de vo�te (ou le berceau) de la prise en charge de la maladie et surtout dans le sujet qui nous int�resse aujourd�hui, qu�un bilan pr�-op�ratoire aussi basique qu�il soit se fasse avant tout acte chirurgical m�me minime (circoncision, extraction dentaire). Aussi, nous souhaiterions profiter de cette occasion pour rappeler que le traitement substitutif � domicile, au m�me titre qu�un diab�tique avec son insuline, reste la solution la plus appropri�e pour sortir du gouffre. Les malades h�mophiles alg�riens ne r�clament aucune �couronne� pour cette maladie des rois, mais seulement un acc�s convenable aux soins, ils aspirent � une vie plus digne et ne veulent plus �tre berc�s d�illusions avec des promesses qui ne voient malheureusement toujours pas le jour. L. L. * Lamh�ne Latifa, pr�sidente de l�Association des h�mophiles alg�riens.