L�Ecole nationale d�administration (ENA) rend hommage aujourd�hui � Mohamed Hardi, ministre de l�Int�rieur et des Collectivit�s locales de 1992 � 1993 dans le gouvernement de Bela�d Abdesselam, assassin� le 4 mai 1996 � Oued Smar, � Alger. Homme de principes, r�publicain et progressiste, Mohamed Hardi incarna au plus fort de la crise politique et s�curitaire que traversait l�Alg�rie, la valeur des hommes et des femmes qui se sont �lev�s pour combattre la barbarie terroriste et sauvegarder l�Etat. Appel� par Bela�d Abdesselam, il accepte, lui qui a v�cu la majeure partie de sa vie dans l�opposition, d�int�grer le gouvernement en formation � un poste �minemment strat�gique et politique et dans un contexte difficile o� les fondements de l�Etat �taient �branl�s. Sa nomination le 19 juillet 1992 en qualit� de ministre de l�Int�rieur et des Collectivit�s locales, num�ro deux de l�Ex�cutif, cr�e la surprise. Parcours et profil atypiques que rien ne pr�destinait � une telle charge. Licenci� en sciences �conomiques de la Facult� des sciences juridiques et �conomiques d�Alger, titulaire d�un DES en sciences �conomiques de la Facult� de droit et des sciences �conomiques de Paris, dipl�m� du Centre d��tudes en programmes �conomiques de Paris, Mohamed Hardi avait pass� les onze ann�es pr�c�dentes � b�tir une brillante carri�re internationale en tant qu�expert, consultant et haut fonctionnaire des organisations du syst�me des Nations unies (Unesco, Onudi, CCI l�agence conjointe NU/OMC). Il avait auparavant occup� diff�rentes fonctions d�butant sa carri�re professionnelle, en 1962 en tant que journaliste chef de rubrique �conomique du quotidien Le Peuple, avant d�int�grer en 1966, sa licence, en poche la Soci�t� nationale de sid�rurgie pour y travailler en tant que cadre dirigeant charg� du commerce ext�rieur. En 1977, R�dha Malek, alors ministre de l�Information et de la Culture, fait appel � lui. Il rejoint le minist�re en qualit� de secr�taire g�n�ral. Un poste qu�il occupera jusqu�en 1981 o� il d�missionnera de ses fonctions. D�s la passation de consignes avec Larbi Belkheir, son pr�d�cesseur, Mohamed Hardi impose son style particulier dans tous les rouages de la s�curit� int�rieure de l�Alg�rie. Ceux qui l�ont connu se souviennent encore de ses prises de positions, de l�ardeur qu�il mettait � d�fendre ses convictions, � combattre les maux de l�Alg�rie. Peu habitu� � la langue de bois ou aux ronds de jambes, int�gre, il n�aura de cesse de d�noncer et de combattre le terrorisme, l�int�grisme, la corruption, la bureaucratie. Des maux toujours d�actualit� aujourd�hui. Le ministre de l�Int�rieur ouvre, de front, diff�rents chantiers. Fervent d�fenseur des institutions, il entame la d�licate mission de restaurer l�autorit� de l�Etat. Face au terrorisme, qu�il qualifie de �plan de destruction syst�matique� de l�Alg�rie, Mohamed Hardi pr�ne et impose une lutte implacable men�e par un Etat fort mais un Etat de droit. Il met fin, du jour au lendemain, � une situation de non-droit d�nonc�e de toutes parts et au plus haut niveau. Celles des camps d�internement des militants islamistes. Il met en demeure la justice d�assumer ses responsabilit�s. Faute d��tre poursuivis par le secteur judiciaire, les prisonniers sont lib�r�s et les camps sont d�finitivement ferm�s. Pr�s d�un mois apr�s son arriv�e, le 27 ao�t 1992, l�a�roport international d�Alger est la cible d�un attentat terroriste qui fera des dizaines de morts et des centaines de bless�s. Arriv� d�s les premi�res minutes, Mohamed Hardi impose des mesures draconiennes qui se solderont par l�arrestation du groupe responsable de l�attentat. Le ministre de l�Int�rieur exige la condamnation � mort du groupe, le minist�re public le suit et la justice lui donnera raison. Intransigeant face au terrorisme au plan s�curitaire, mais n�anmoins convaincu de la n�cessit� d�une solution politique, Mohamed Hardi initie d�s 1992 le d�bat sur la r�conciliation nationale. Il �tait inadmissible pour le ministre de l�Int�rieur que des Alg�riens s'entre-tuent, qu�ils s�attaquent � des populations civiles ou aux institutions de l�Etat. D�o� la n�cessit� d�une solution n�goci�e pour le retour � la s�curit� et � la paix. Il appelle en parall�le � un sursaut de la population, � un d�bat sur les causes profondes du terrorisme afin d��extirper les racines du mal� en trouvant des solutions globales politiques, �conomiques et sociales � la situation que traverse l�Alg�rie. Des solutions qui combattraient l�int�grisme et par -del� le terrorisme. Mohamed Hardi �tait convaincu que l�int�grisme et le terrorisme trouvaient leur terreau dans les conditions �conomiques et sociales. Et il n�aura de cesse de les d�noncer. La mal-vie, la hogra, l�accaparement des richesses du pays par une infime partie de la population� Des causes issues, selon Mohamed Hardi, des d�rives de la d�cennie pr�c�dente qu�il sera le premier � qualifier de �d�cennie noire�. Une d�cennie qui �a mis l�Alg�rie � genoux�. Le ministre de l�Int�rieur fera d�ailleurs de la lutte contre la corruption l�autre dossier majeur de son minist�re. Il d�noncera, sans ambages et sans complexe, la corruption qui mine l�Alg�rie, �l�exhibition �c�urante des richesses� et une �redistribution qui ne profite qu�� 10% de la population, les 90% restants en �tant totalement exclus�. En novembre 1992, en installant de nouveaux walis, il �carte ceux dont la r�putation est entach�e par les affaires de corruption, de passe-droits et de d�passements. Il instaure les contrats de performance et le syst�me de notation, initie des consultations avec les cadres ant�rieurement �cart�s ou en r�serve de la R�publique pour des calculs politiciens arguant que les comp�tences sont �au service de l�Etat et non du gouvernement�. Il travaille d�arrache-pied � valoriser les fonctionnaires de la police. Durant sa gestion du minist�re de l�Int�rieur, il fera multiplier par trois le salaire per�u par les policiers. Face � l�int�grisme, � l�islamisme politique et � ses d�rives, il lancera le d�bat sur la relation entre l�Etat et la religion, invitant chacun et particuli�rement les partis politiques � d�fendre leurs id�es loin du �terrorisme intellectuel et de salon�. C�est sous son �gide et apr�s maintes n�gociations qu�� l�occasion d�une visite officielle qu�il effectue en Tunisie que sera r�gl� le probl�me �pineux du trac� des fronti�res alg�rotunisiennes. C�est �galement sous son �gide que le conflit Azawad au nord du Mali est r�gl�. Mohamed Hardi quittera le minist�re de l�Int�rieur le 22 ao�t 1993 avec le changement du gouvernement laissant derri�re lui un bilan que beaucoup lui envient, un engagement assum� et des principes d�fendus. Malgr� l�appel de R�dha Malek, le nouveau chef du gouvernement, avec qui il avait d�j� travaill� au minist�re de l�Information et de la Culture et nonobstant le respect et la relation profonde qui le liait � lui, il refuse d�int�grer l�Ex�cutif en formation. Visionnaire, sans tabou, Mohamed Hardi avait publiquement d�fendu au plan politique le �concept d�alternance� � la base de la d�mocratie. La v�ritable alternance, ce n�est pas une succession formelle et formaliste d��lections�. L�alternance �tait pour lui un changement de politiques et d�hommes. �On ne peut pas �tre en m�me temps l�homme d�une politique et l�homme d�une politique contraire�, disait Mohamed Hardi pour qui �il n�y a pas eu r�g�n�ration du personnel politique�. Fort de ce principe, et parce qu�il avait �t� le num�ro deux d�un gouvernement oppos� � la politique de r��chelonnement de la dette alg�rienne, il se refusera de participer au gouvernement de R�dha Malek, � qui il vouait une profonde amiti�, qui, lui, allait vers le r��chelonnement. Le 4 mai 1996, il est assassin� � bout portant � Oued Smar sur le parking d�une soci�t� nationale. Mohamed Hardi est mort comme il a v�cu. Debout pour ses id�es et ses principes. A son assassin qui lui ordonnait de s�agenouiller, il aura une r�ponse embl�matique. �L�Alg�rie n�a pas pli�e face � la France, et vous voulez que moi je plie face � vous ?� furent les derni�res paroles d�un courage et d�une int�grit� exemplaires. L�hommage que lui rend l�Etat � travers l�ENA vient r�tablir des v�rit�s depuis oubli�es mais toujours d�actualit�.