Vaillant maquisard, r�volutionnaire accompli et visionnaire lucide, le colonel Amirouche A�t- Hamouda n�a pas �t� �pargn�, comme, sinon plus que d�autres chefs de la R�volution, par ceux qui ont tendu une embuscade � l�Histoire pour la pervertir dans ses r�alit�s tangibles. C�est arm�s de mensonges les plus habiles qu�ils se sont lanc�s � l�assaut de la l�gende vraie. Mais un bonsa� peut-il jeter son ombre sur un peuplier ? Souvent, il suffit d�un t�moignage, d�une restitution d�un v�cu partag� pour que l�intox fonde comme neige au soleil. C�est � ce travail que s�est adonn� Hamou Amirouche qui fut secr�taire particulier du colonel Amirouche entre 1957 et 1958. Dans un volumineux ouvrage qui m�le histoire et autobiographie, paru aux �ditions Casbah, Hamou Amirouche livre, par s�quences saccad�es, des tranches de vie et des actes qui font appara�tre le chef de la Wilaya III historique dans son immense humanisme, son imperturbable rectitude, son in�galable bravoure et rigueur militaires et sa lucide vision politique. Avec Akfadou, un an avec le colonel Amirouche, Hamou Amirouche se soulage d�une grossesse port�e pendant pr�s de cinquante ans et accouche d�une �uvre qui soustrait son sup�rieur hi�rarchique aux g�monies auxquelles les d�molisseurs de l�gendes l�ont vou�. Contrairement aux contrev�rit�s entretenues et � funestes desseins r�pandues, le colonel Amirouche ne nourrissait pas une sainte horreur pour les lettr�s et les intellectuels. Au contraire, il les avait en estime. �Ceux qui calomnient Si Amirouche et l�accusent d��tre anti-intellectuel occultent d�lib�r�ment sa clairvoyance et sa vision qui l�incit�rent � �tablir ce centre d��tudiants avec les fonds de la Wilaya III. Aucun autre chef de Wilaya, � ma connaissance, ne fit preuve d�une aussi sagace initiative � (page 259). L�auteur r�v�le que c�est sur initiative de Amirouche que fut cr�� en 1957 � Tunis, le centre des �tudiants de la Wilaya III. Un centre financ� par la Wilaya III, du moins jusqu�en 1959 qui vit l�implication du GPRA. �En mars 1959, parmi les dol�ances �labor�es � l�issue d�un conseil de wilaya r�uni en session extraordinaire et que Si Amirouche devait pr�senter en personne au GPRA, figurait une demande d�aide mat�rielle r�guli�re, une bourse en quelque sorte, � accorder aux �tudiants dont la prise en charge, selon le conseil de Wilaya, incombait au gouvernement et non � la Wilaya III.� On ne peut pas avoir en horreur les lettr�s et les intellectuels et les entourer d�un soin si particulier, en l�occurrence cr�er un centre pour les �tudiants � Tunis. L�auteur a fait partie des �tudiants � qui le colonel Amirouche enjoignit l�ordre d�aller poursuivre leurs �tudes. Preuve vivante, si besoin, de ce que le chef de la Wilaya III vouait une grande estime aux intellectuels. Amirouche pensait d�j� � doter l�Alg�rie ind�pendante d�encadrement. L�arm�e des fronti�res saborda ce r�ve. Affaire �la bleuite�, le complot qui alimenta le d�nigrement Les pourfendeurs du colonel Amirouche ont us� et abus� de l�affaire dite �la bleuite�, au point de donner de lui l�image de sanguinaire, occultant d�lib�r�ment le contexte de l��poque, c�est-�-dire la situation dans les maquis de l�int�rieur, pour ne retenir que les ex�cutions commises. Hamou Amirouche, qui ne fut pas t�moin direct des ex�cutions, a r�colt� les t�moignages de responsables de l�ALN et de moudjahidine qui faillirent faire les frais du complot tiss� par le capitaine L�ger (�). Le capitaine L�ger n�a pas dirig� et orchestr� un complot de �manipulation et d�intoxication � destin� � faire croire au colonel Amirouche que sa Wilaya �tait noyaut�e : elle �tait infiltr�e par des �agents doubles, militants ou maquisards retourn�s� et �ce n�est que lorsque certains d�entre eux furent d�masqu�s que le capitaine L�ger d�cida de faire croire aux responsables des Wilayas IV et III que le mal avait atteint un niveau et des proportions surr�els (�)�, �crit Hamou Amirouche qui rapporte que des centaines de moudjahidine ont �t� tortur�s et pass�s par le fil du rasoir � cause de cette grande suspicion qui gagna les maquis en cette ann�e 1958. Le colonel Amirouche, qui eut � nettoyer auparavant les maquis infest�s par les gens du MNA sous le commandement de Bellounis, Mohand Chougar, un rescap� de la �Bleuite�, s�est ouvert � l�auteur dans un t�moignage � donner des frissons. Il a t�moign� aussi de ce que le colonel Amirouche reconnut �l�erreur � mais pas �l�injustice �. �Vers la fin, m�me Si Amirouche a reconnu sa terrible m�prise. En octobre 1958, cinq mois avant son d�part � Tunis, il nous a r�unis. Des compagnies, des bataillons, il y avait des milliers de personnes. � �Mes fr�res, nous dit-il, beaucoup de gens disent que l�ALN se livre � des injustices. Je veux vous dire que l�ALN ne commet pas d�injustices, elle commet des fautes.� Le colonel Amirouche avait ajout� que �dans l�histoire, il n�y a pas une guerre o� il n�y a pas eu d��garement (�) mais il vaut mieux perdre par erreur, mille, dix mille moudjahidine, plut�t que de perdre l�Alg�rie. Les gens disent que nous commettons des injustices. Je le r�p�te, nous ne commettons pas des injustices, nous commettons des erreurs.� (page 419). Les chefs de Wilaya contre l�EMG Entre le colonel Amirouche et l�arm�e des fronti�res, ce n��tait pas la bonne entente. Alors que les maquis de l�int�rieur �touffaient, sevr�s d�armements, 30 000 soldats se roulaient les pouces de l�autre c�t� des fronti�res. Le colonel Amirouche ne pouvait rester sans r�agir face � ses troupes et leur commandement qui ne font rien pour assister le front int�rieur. La situation �tait devenue tellement grave qu�il r�unit, du 6 au 12 d�cembre 1958, au Nord- Constantinois, les chefs de Wilaya. Ali Kafi, alors chef de la Wilaya II, n�assista pas � cette r�union. �Dans un t�l�gramme adress� au GPRA, imm�diatement apr�s la r�union, les quatre colonels (Si El Hadj Lakhdar, Si M�hamed, Si-Houes et Si Amirouche, ndlr) �crirent : �regrettons absence injustifi�e colonel n�2� consid�rons son attitude incompatible avec la tradition r�volutionnaire. M�me s�il se refusait � cautionner les actions entreprises en Wilaya 3 pour faire face au complot de la Bleuite, son devoir �tait de leur porter ses r�serves devant ses pairs r�unis chez lui, et de leur faire partager sa sagesse et sa comp�tence�, �crit Hamou Amirouche, ajoutant : �Bien plus tard, j�appris que dans les dol�ances pr�sent�es par le conseil de Wilaya r�uni en session extraordinaire le 2 mars 1959, Si Amirouche allait encore plus loin : �Demandons offensive coordonn�e et efficace de la ligne Morice� pour permettre le passage de mat�riel et de munitions dont nous avons grandement besoin.� (Page 251). Pour le conseil de Wilaya, l�attitude de l�arm�e des fronti�res proc�dait �de la n�gligence criminelle �. C�est avec la ferme intention de demander des comptes aux militaires stationn�s de l�autre c�t� de la fronti�re que le colonel Amirouche avait d�cid�, en compagnie du colonel Si El-Haoues, de se rendre � Tunis. Il ne parviendra pas. Il fut tu� pr�s de Boussa�da. Sofiane A�t-Iflis Qui est Hamou Amirouche ? Militant du PPA-MTLD, Hamou Amirouche est n� � Tazmalt (B�ja�a) en 1937. Apr�s le certificat d��tudes primaires et trois ann�es de labeur dans la forge familiale, il est admis au centre d�apprentissage de B�ja�a. Il fut l�un des organisateurs de la gr�ve des �tudiants de mai 1956. Il rejoint le maquis quelque temps apr�s et devient le secr�taire particulier du colonel Amirouche, entre 1957-1958. En mars 1958, il est d�sign� par le colonel pour faire partie d�une mission qui achemine le courrier et les fonds vers la Tunisie. A Tunis, il est nomm� responsable du foyer des �tudiants cr�� par Si Amirouche en 1957. Sur ordre du colonel, il reprend ses �tudes et d�croche son baccalaur�at. Il est envoy� par la suite aux Etats-Unis o� il poursuit des �tudes en �conomie politique � l�Universit� Wesleyan et obtient un DES en sociologie politique � l�Universit� du Colorado. Apr�s avoir occup� plusieurs postes de responsabilit� en Alg�rie � il a �t� dans le cabinet du ministre Bela�d Abdeslam durant de longues ann�es �, Hamou Amirouche retourne en 1994 aux Etats-Unis o� il enseigne � l�Universit� de San Diego.