Il est commun�ment admis que 10 000 � 12 000 milliards de dollars transitent en moyenne annuelle par les diff�rents paradis fiscaux de la plan�te. Ces flux ill�gaux ne viennent pas seulement des pays riches. Une bonne partie d'entre eux est issue des pays en voie de d�veloppement (PVD). Combien ? Telle est la question. Pour la quantifier, le gouvernement norv�gien a command� r�cemment un rapport � une commission d'experts, intitul� �Paradis fiscaux et d�veloppement�. Le r�sultat est �difiant. Les �conomistes norv�giens estiment qu'environ 20% des d�p�ts dans les paradis fiscaux proviennent des PVD, soit �une somme comprise entre 2 200 et 2 400 milliards de dollars, soit trente fois ce que les pays en d�veloppement re�oivent sous forme d'aide�. Si l'on en croit le rapport, l'�vasion fiscale au sein des PVD a repr�sent� pour l'ann�e 2006 une somme comprise entre 641 et 979 milliards de dollars. Par comparaison, les flux de capitaux entrants dans ces pays ont atteint en 2006, selon la Banque mondiale, 571 milliards de dollars. �M�mes les estimations les plus basses aboutissent au fait que les flux sortants de capitaux ill�gaux sont sup�rieurs aux flux entrants�, indique le rapport. L'�vasion fiscale des PVD repr�sente aussi environ 10 fois le montant de l'aide apport�e par les pays riches et environ 6% � 8,7% du produit int�rieur brut (PIB) de ces pays. Destruction d�lib�r�e d'institutions destin�es � pr�venir les sorties ill�gales de capitaux Par comparaison, les revenus fiscaux des pays les plus pauvres repr�sentent 13% de leur PIB. Tous ces flux ill�gaux n'aboutissent pas forc�ment dans les paradis fiscaux. Mais, et c'est l'un des points-cl�s du rapport, les places offshore contribuent � la �gangst�risation� des syst�mes politiques dans les PDV. Les paradis fiscaux �favorisent ainsi la corruption et les escroqueries men�es par les hommes politiques sur l'aide au d�veloppement, les ressources naturelles et les deniers publics�. Pis encore, le rapport ajoute que les exemples ne manquent pas �de destruction d�lib�r�e d'institutions destin�es � pr�venir les sorties ill�gales de capitaux, de pressions exerc�es contre des fonctionnaires afin qu'ils n�gligent leur mission sans parler de l'assassinat de ces fonctionnaires�. Le rapport cite ainsi l'exemple des Philippines, de l'Indon�sie et de la Malaisie o� les politiciens locaux ont d�lib�r�ment torpill� le r�le des agences locales de protection de l'environnement dans le but d'autoriser une exploitation intensive des for�ts tropicales. Les commissions occultes vers�es dans ce but ont presque fatalement atterri dans des paradis fiscaux. Responsabilit� des multinationales dans l'affaiblissement fiscal des pays du Sud Ces pratiques mafieuses facilit�es par l'existence des paradis fiscaux n'incitent gu�re les pays pauvres � investir en vue d'une meilleure efficacit� administrative. �La probabilit� de d�couverte d'un crime �conomique est plus basse dans les pays en d�veloppement�, indique le rapport qui ajoute que l'existence des �paradis fiscaux est un encouragement aux comportements criminels�. Le rapport norv�gien pointe avec une s�v�rit� particuli�re la responsabilit� des multinationales dans l'affaiblissement fiscal des PDV. La politique dite des �prix de transfert�, � savoir les diff�rentes techniques permettant de manipuler le prix des �changes internes � ou m�me des �changes avec des soci�t�s tierces � dans le but de transf�rer les profits dans les juridictions � fiscalit� z�ro, joue un r�le d�terminant dans l'affaiblissement fiscal de tous les pays du monde. Les pratiques comptables des multinationales norv�giennes engendreraient ainsi une perte fiscale de 30% pour le budget norv�gien. Parmi les recommandations prioritaires, les auteurs du rapport r�clament l'am�lioration des r�gles relatives aux prix de transfert et une modification des conventions fiscales pour que les activit�s r�elles d'une soci�t� d�terminent son domicile fiscal.