Alger a abrit� cette semaine le congr�s des pays arabes, consacr� � la question du ch�mage et de l�emploi des jeunes. Le taux de ch�mage dans ces pays est �valu� � 16 % avec des pics pour la classe d��ge 16-24 ans. Bien �videmment, l�Alg�rie n��chappe pas � ce probl�me et la gravit� du ch�mage qui frappe notre soci�t� est un r�el probl�me, et ce n�est pas le traitement social qui en est fait aujourd�hui qui pourra r�gler la question. Nous pouvons relever, en effet, que l�emploi cr��, ou plus exactement la gestion du ch�mage qui est mise en �uvre par le gouvernement, ne r�gle en rien ni la pr�carit� (80 % des emplois cr��s sont des emplois pr�caires) ni la pauvret� des travailleurs en plus qu�elle co�te tr�s ch�re � l�Etat. Le prix du p�trole chute et� bonjour les d�g�ts ! Dans quels termes est abord�e la question du ch�mage et de l�emploi en Europe, notamment en France. La question est d�autant plus pertinente qu�on peut difficilement contester que la politique sociale de l�Alg�rie s�inspire tr�s fortement du mod�le fran�ais. On sait, par ailleurs, que le mod�le social fran�ais repose sur l�Etat providence, cet Etat qui doit procurer, gr�ce � la protection sociale, c�est-�-dire la s�curit� sociale, les allocations familiales, le droit � la retraite et, plus tard, l�allocation ch�mage, un revenu diff�r� �au travailleur et � sa famille� afin de les prot�ger des al�as de la vie. Or, il est largement admis aujourd�hui que ce mod�le social fran�ais est en crise. La France conna�t, en effet, depuis plusieurs ann�es ce que les �conomistes appellent un ch�mage de masse (9,6 %), un syst�me scolaire in�galitaire, un d�ficit de la s�curit� sociale, un �chec de l�int�gration des immigr�s (cf. la crise des banlieues), une �panne de l�ascenseur social�. Les causes de la crise sont nombreuses : croissance molle, politique �conomique inappropri�e, absence de politique de recherche-innovation qui entame s�rieusement la comp�titivit� de l��conomie. Mais le facteur explicatif central r�side incontestablement dans la mondialisation lib�rale de l��conomie, mondialisation que nous subissons plus fortement encore en Alg�rie. Le march� int�rieur, soutenu par les transferts sociaux de l�Etat providence, ne suffit plus � assurer une croissance �conomique solide et durable. Le moteur, le second moteur, est aujourd�hui constitu� par les exportations, et les exportations exigent des entreprises une comp�titivit� accrue. La comp�titivit� demande � son tour un all�gement des charges, notamment sociales, qui p�sent sur les entreprises. Le co�t du travail devient dans les pays capitalistes, la variable d�ajustement, surtout que les pays asiatiques �mergeants fondent leur comp�titivit� sur des co�ts de travail tr�s faibles. Ce co�t doit baisser et les patrons rechignent de plus en plus � verser les cotisations qui alimentent le Fonds de protection sociale. L�exigence de comp�titivit� que charrie en son sein le processus actuel de mondialisation de l��conomie remet en cause aussi l�autre pilier du mod�le social europ�en : le contrat de travail � dur�e ind�termin�e (CDI) qui garantissait au salari� une protection �� vie� au sein de l�entreprise. Aujourd�hui, la croissance �conomique n�est pas aussi cr�atrice d�emplois qu�elle l�a �t� durant les d�cennies pass�es. L�entreprise recherche constamment des gains de productivit� et le m�me nombre de salari�s produit plus de croissance que par le pass�. C�est ce qu�on appelle aujourd�hui la croissance � faible contenu d�emploi. L�entreprise veut �tre lib�r�e des lourdes contraintes qui p�sent sur elle lorsqu�elle est dans l�obligation de sortir des �sureffectifs�, c�est-�-dire des travailleurs dont elle n�a plus besoin pour assurer son niveau de production. Cette peur des contraintes qui accompagne les plans sociaux am�ne l�entreprise � �viter au maximum d�embaucher de nouveaux travailleurs, si elle n�a pour le faire � sa disposition que des CDI. Alors, il y a partaout introduction de nouveaux contrats de travail qui installent la flexibilit� du march� du travail : 70 % des nouveaux emplois cr��s le sont aujourd�hui en contrats � dur�e d�termin�e (CDD). L�entreprise a le droit pendant une p�riode d�essai de un an en moyenne de licencier le salari� sans pr�avis, sans formalit� administrative et sans indemnit�s. Mais dans le m�me temps, cette facilit� de sortie du march� du travail qui menace le salari� est accompagn�e d�une facilit� d�entr�e sur ce m�me march� du travail puisque les entreprises, lib�r�es des charges et des contraintes, embauchent plus. De son c�t�, l�Etat assure aux salari�s une assurance- ch�mage significative, un suivi personnalis� durant la p�riode de recherche d�un nouvel emploi, une formation de requalification qui facilite au ch�meur sa r�insertion sur le march� du travail. Le Danemark, la Su�de, la Finlande, la Grande-Bretagne ont r�ussi par la flexibilit� (pour l�entreprise) et la s�curit� (pour le salari�) � faire baisser leur taux de ch�mage de moiti� en 15 ans : 10/11 % au d�but des ann�es 90 et 5/6 % en 2006. Et il ne s�agit pas l� de statistiques non fiables comme peuvent l��tre les n�tres. En mati�re de politiques d�emploi et de lutte contre le ch�mage, les exp�riences danoises de �flexibilit� et britannique de flexibilit� sont celles qui sont le plus cit�es comme exp�riences r�ussies. Au Danemark, les entreprises peuvent licencier sans difficult� en fonction de la conjoncture �conomique et de leurs carnets de commandes. Et cela en accord avec les syndicats. Mais le salari� licenci� b�n�ficie de quatre ann�es d�indemnit�s de ch�mage plafonn�es � 80 % de son salaire. Il doit, cependant, �tre constamment � la recherche d�un emploi, ne pas refuser une r�int�gration dans la vie active et suivre des cycles de formation qui facilitent sa r�insertion. En Grande- Bretagne, les m�mes principes sont en �uvre : le salari� peut �tre remerci� sans difficult� (p�riode d�essai d�un an) ; il est inscrit � l'allocation-ch�mage et aupr�s d�un job-center qui est charg� de le replacer. Le ch�meur n�a pas le droit de refuser l�emploi qu�on lui propose, sous peine de ne plus b�n�ficier de l�allocation- ch�mage. Le financement de ce soutien de l�Etat aux ch�meurs � la recherche d�un emploi est rendu possible gr�ce � une fiscalit� pr�lev�e par l�Etat, notamment aupr�s des entreprises. Ainsi, flexibilit� d�un c�t�, s�curit� de l�autre : le march� du travail est tr�s fluide, les salari�s tr�s mobiles avec facilit� d�entr�e et de sortie du march� du travail. Les nouvelles politiques de l�emploi et de lutte contre le ch�mage semblent avoir concili� r�gulation sociale et comp�titivit� �conomique impos�e par la mondialisation de l��conomie, partout o� elles sont mises en �uvre en Europe. Peut-on en tirer quelques le�ons pour notre pays ? Il faudrait alors que l�Etat revoie fondamentalement son r�le et la nature de ses interventions : en lieu et place du financement tr�s co�teux des emplois aid�s, pr�caires et tr�s souvent sans lendemain, il doit r�organiser le march� du travail, l�encadrer et mettre en place de v�ritables outils de recyclage, de requalification et de formation des travailleurs. Est-il n�cessaire de rappeler, encore une fois, que dans ce domaine aussi, nous sommes� �loin du compte � !