Les islamistes ont appelé à manifester dimanche contre le coup militaire en Egypte faisant redouter de nouveaux heurts dans le pays plongé dans la crise et la violence qui a fait en quatre jours plus de 750 morts. Samedi, alors que la police a évacué de force des centaines d'entre eux retranchés dans une mosquée du Caire, les partisans du président islamiste renversé Mohamed Morsi ne sont pas parvenus à mobiliser et seuls quelques groupes de manifestants avaient bravé le couvre-feu pour défiler en soirée. Mais ne désarmant pas, l'Alliance anti-coup d'Etat, la coalition des pro-Morsi, ont promis de nouvelles manifestations sous le slogan "la semaine du départ du coup d'Etat". Elle a appelé à des défilés après la prière, vers 14H00 GMT. Pour le premier jour de la semaine, dimanche dans le pays, le trafic est revenu néanmoins à la normale dans les rues du Caire avec la reprise des transports publics et le retour des résidents à leur travail. L'épreuve de force et les heurts sanglants n'ont pas connu de répit ces derniers jours malgré les condamnations internationales et les appels à la retenue, et l'Union européenne a averti qu'elle était prête à "réexaminer" ses relations avec ce pays si la violence ne cessait pas. Depuis la destitution et l'arrestation de M. Morsi le 3 juillet, l'Egypte, sous état d'urgence et gagnée par des scènes de guerre inédites, est divisée en deux camps qui semblent désormais irréconciliables: d'une part l'influente confrérie des Frères musulmans dont est issu M. Morsi et de l'autre les partisans de la solution sécuritaire de l'armée qui l'a emporté sur les rares voix prônant le dialogue au sein des nouvelles autorités. Les heurts entre forces de l'ordre et pro-Morsi ont débuté fin juin avec des manifestations monstres appelant au départ du premier président d'Egypte élu démocratiquement, sur lesquelles le nouvel homme fort du pays, le chef de la toute-puissante armée, le général Abdel Fattah al-Sissi, s'est appuyé pour justifier sa destitution. Ils ont fait près de 600 morts mercredi, journée la plus meurtrière depuis la révolte populaire qui a renversé le président Hosni Moubarak début 2011, durant laquelle les forces de l'ordre ont réduit à néant deux campements pro-Morsi au Caire. Vendredi, décrétée journée "de la colère" par les islamistes, 173 personnes ont péri dans les violences. "L'Egypte combat le terrorisme" Le gouvernement, qui répète à l'envi combattre des "terroristes", a autorisé ses forces de l'ordre à ouvrir le feu sur les manifestants hostiles, accusant les pro-Morsi de nombreuses attaques contre des postes de police, des bâtiments officiels ou des églises. Alors que la télévision affiche désormais en permanence un bandeau "l'Egypte combat le terrorisme", en anglais, et que la presse, unanime, dénonce le "complot" des Frères, le gouvernement a de nouveau assuré que les membres des Frères musulmans pourraient participer au processus de transition, tout en précisant qu'il n'y aurait "pas de réconciliation avec ceux ayant du sang sur les mains". Le 25 août, s'ouvre le procès des principaux dirigeants de la confrérie, dont son Guide suprême en fuite Mohamed Badie, pour "incitation au meurtre" de manifestants anti-Morsi. Le président destitué, lui, est toujours détenu au secret et a également été inculpé. Samedi, après avoir sorti de force des centaines d'islamistes retranchés dans la mosquée Al-Fath du Caire --dont certains ont ensuite été tabassés par une foule en colère--, les autorités ont dit avoir arrêté 385 personnes. L'imam d'Al-Azhar, plus haute autorité de l'islam sunnite, a condamné les attaques contre les églises coptes et appelé "tous les Egyptiens à la réconciliation". Condamnations internationales "Lutte contre le terrorisme" Face à l'appel aux nouvelles manifestations, les Etats-Unis ont annoncé que leur ambassade au Caire resterait fermée dimanche, premier jour de la semaine en Egypte. A l'étranger, la communauté internationale multiplie les critiques, dénonçant un "usage excessif de la force" contre les manifestants, comme Londres et l'ONU, et appelant au "dialogue", seule solution pour éviter la "guerre civile", selon Berlin. La Bolivie est allée bien plus loin, qualifiant la répression de "génocide" et Cuba a condamné "la mort de civils innocents". En revanche, Amman et surtout Ryad qui a annoncé l'envoi de trois hôpitaux mobiles en Egypte, ont affirmé soutenir le pouvoir égyptien "face au terrorisme". Durant la première année de son mandat marquée par une crise et des violences, M. Morsi élu en juin 2012, était accusé par ses détracteurs d'avoir accaparé le pouvoir et d'avoir achevé de ruiner une économie déjà exsangue. Les pro-Morsi refusent de participer au processus de transition en qualifiant d"illégitimes" le président et le gouvernement intérimaires installés par l'armée et réclament le rétablissement de M. Morsi dans ses fonctions.